Je suis content de voir que ce sujet a suscité des réactions ! Pour vous répondre, non je ne suis pas archéologue, je suis géologue. J'ai néanmoins déjà participé à des chantiers archéologiques, en tant que fouilleur bénévole et comme consultant pour des questions d'ordre "géo-archéologique" (ressource lithique, géomorphologie, sédimentologie, etc...). Par conséquent, je connais assez bien le milieu et j'y ai des contacts. Personnellement je considère le patrimoine archéologique au même titre que la culture, c'est à dire que ce sont les individus qui décident d'y contribuer, d'y adhérer, de s'y intéresser. Si ce n'est pas le cas, c'est tout simplement que ça ne les atteind pas (les gouts et les couleurs, les intérêts et les passions) ou qu'ils ont d'autres priorité dans leur vie (un chômeur, vous pouvez toujours lui donner des livres ou des concerts gratuits, ça occupera son temps libre mais il n'aura toujours pas de travail). C'est donc aux citoyens de participer à la sauvegarde du patrimoine archéologique, à titre personnel ou associatif, avec leurs économies ou leur force de travail, etc... Je n'ai jamais entendu parler d'histoire de pillage par des archéologues dans mon entourage, peut être parce que les périodes visées et les objets retrouvés auraient peu de valeur, en dehors de leur intérêt archéologique. Mais je crois que l'on rencontre des voleurs partout (mais chez les convoyeur de fonds, c'est pour dire). Par contre, quelque chose me surprend : "Attention, le financement à déjà été "trouvé". Quand un entrepreneur, un promoteur, veut réaliser une construction, il y a des fouille- merdes qui suivent les tracto-pelles. Si un machin qui intéresse l'Histoire est mis à jour par les engins, le chantier est stoppé. L'entrepreneur a alors deux solutions: 1- il persévère dans son projet de construction: il doit alors financer l'intégralité des fouilles et attendre leur fin... 2- il abandonne son projet et dans ce cas, les fouilles sont abandonnées. Parfois, dans certains cas exceptionnel (c'est devenu extrêmement rare), l'Etat finance les fouilles si l'entrepreneur a abandonné son projet." "Mais la plupart du temps, les chantiers sont arrêtés pour pas grand chose, des fausses alertes." "Et finalement, ce qui coute très cher, c'est quand on découvre quelque chose qu'il va falloir traiter pour le conserver à l'air libre." L'archéologie préventive n'interrompt pas des chantiers de construction. La DRAC (Direction régionale des affaires culturelles), lorsqu'elle est informée d'un projet d'aménagement, peut prescrir un diagnostic archéologique suivant différents critères : zone concernée, étendue, profondeur des travaux, etc... Le diagnostic correspond à l'ouverture de tranchées sur le terrain pour couvrir environ 10% de se surface totale; il fournit alors un avis positif ou négatif sur le site : potentiel archéologique, nature des éléments détectés, densité, datations, etc... Et c'est à nouveau à la DRAC de décider si oui ou non il faut prescrir une fouille archéologique, suivant l'intérêt archéologique estimé par le diagnostic. Mais toutes ces opérations ont lieu en amont des travaux, pas durant ceux-ci. Les archéologues n'ont pas vocation à stopper ou retarder les entrepreneurs (mais vous avez raison pour le financement, la fouille est à la charge de ces derniers). Le site de l'INRAP (Institut national de recherches archéologiques préventives) sera plus clair et détaillé que moi là dessus : http://www.inrap.fr/archeologie-preventive/L-archeologie-preventive/Les-etapes-de-l-archeologie-preventive/Le-diagnostic/p-265-Le-diagnostic.htm "Mais tiens, je te pose une question : tu es entrepreneur dans le cas que tu mentionnes ci-dessus, tu veux faire ton taf, c'est très bien, mais si on tombe sur un truc pas trop mal archéologiquement parlant, j'imagine que tu ne serais pas contre laisser des archéologues jeter un oeil quelques heures, au nom du patrimoine quand même, c'est cool d'aider la recherche non? Et si jamais le chantier doit être interrompu quelques jours le temps de prendre les éléments interéressants, tu aurais un intéressement suite à cet effort de patience, que ce soit financier (par exemple un pourcentage sur la revente des trucs trouvés) ou même symbolique (du genre une petite expo est organisée, et on explique que c'est grâce à Rocou qu'on a trouvé tout ça, etc.)." Globalement, c'est ainsi que les entrepreneurs et les archéologues procédaient par le passé. Mais plusieurs affaires (sites détruits...) ont poussé l'État à légiférer sur la protection du patrimoine archéologique, en généralisant notamment les opérations d'archéologie préventive (en 1998). "La vrai question à se poser est : pourquoi n'y a-t-il pas de possibilité pour les enprepreneurs de BTP de s'assurer "contre" les découvertes archéologiques ?" Certains aménageurs (ceux qui ont de gros moyens) engagent parfois des archéologues pour estimer le potentiel archéologique de terrains qui les intéressent, pour optimiser autant que possible l'implantation de leurs travaux : autrement dit, éviter les sites archéologiques pour ne pas avoir à modifier leur projet ou payer des fouilles. Par ailleurs, l'archéologie (comme la géologie) renvoie à la question : "Ce qui se trouve dans notre sous sol nous appartient-il ?" En ce qui concerne les objets découverts lors des fouilles archéologiques, la prochaine réforme "Patrimoine" risque de changer pas mal de choses : l'État pourrait notamment devenir propriétaire de la totalité des vestiges matériels... ou au contraire laisser ce droit au propriétaire du terrain (avec évidemment tout un tas de contraintes lourdes, strictes et rebutantes).