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Des élites Inutiles?


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Bien sûr, vous etes déjà tous lecteurs du blog Chacun Pour Soi, un des derniers articles de votre serviteur parlait de l'incroyable partialité mediatique en ce qui concerne la campagne pour le TCE, en referendum le 29 mai prochain. (voir: http://chacun-pour-soi.blogspot.com/2005/0…nt-le-oui.html)

Hé bien l'article que j'ai écrit, ce n'est qu'un des points traités par l'excellent JM Vittori, j'aurai voulu écrire le même éditorial, tant il m'a impressionné dans la justesse de l'analyse. Vous allez me dire, c'est pas un constat nouveau. Et c'est vrai.

Des élites inutiles ?

L'ANALYSE DE JEAN-MARC VITTORI

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Bienvenue en Oceania ! A en croire des voix de plus en plus nombreuses et surtout de plus en plus vigoureuses, la France de 2005 ressemble de plus en plus au cauchemar de « 1984 ». Comme dans le célèbre roman de George Orwell, nous vivons dans un vaste ensemble régional appelé Oceania (ou Union européenne, dans le jargon officiel). Notre réflexion paraît s'organiser en slogans officiels, parmi lesquels « L'Europe, c'est bien » aurait remplacé « L'ignorance, c'est la force ». Le ministère de la Vérité diffuse la propagande officielle par tous les moyens possibles, allant jusqu'à réécrire l'histoire pour y effacer les erreurs du pouvoir. Et une petite minorité opprimée tenterait de résister au rouleau compresseur de la dictature intellectuelle qui plane sur les pays à moins de trois semaines du référendum sur le Traité constitutionnel européen.

C'est ici que la fiction rejoint la réalité. Avant-hier, 200 manifestants se sont réunis place de l'Europe à Paris avec des panneaux indiquant « Discours unique, démocratie en danger ». L'Observatoire français des médias y a dénoncé un « véritable matraquage » de l'information. A France Télévisions, une pétition circule sur « Le «non» censuré dans les médias, ça suffit ! ». Sur Internet, des centaines de sites et de blogs dénoncent la propagande en faveur du « oui » exercée par les médias dans leur couverture de la campagne du référendum sur le projet de Traité constitutionnel européen. La radio France-Inter est vertement critiquée par ses auditeurs pour ne vanter que les charmes du « oui ».

A l'occasion d'une campagne électorale, aurions-nous basculé dans la tyrannie médiatique ? La question est trop grave pour être prise à la légère. Mais la réalité n'est pas facile à décrire. Suivie distraitement, la campagne laisse trois impressions successives. D'abord un amoncellement de banalités convenues sur les raisons de voter « oui ». Puis une irruption brutale du « non » avec des volées d'arguments puissants mais parfois faux. Et enfin, ces derniers jours, un débat qui commence vraiment, avec ses inévitables petites phrases pour animer la galerie et ses vrais débats de fond. Avec un vif intérêt du public, qui se traduit de mille façons, de la forte consultation des articles relatifs à l'Europe sur le site Internet des « Echos » aux succès des livres consacrés à la Constitution (cinq des dix meilleures ventes de la catégorie essais, selon le dernier classement de « Livres-Hebdo »). De quoi faire mentir tous ceux qui soutiennent que « l'Europe, ça ne fait pas vendre ! »

Certains chiffres, toutefois, indiquent un net déséquilibre dans la couverture médiatique de la campagne. Selon l'émission « Arrêt sur image » de France 5, seulement 29 % des intervenants à la télévision sur le traité constitutionnel au premier trimestre 2005 étaient favorables au « non ». Et pour reprendre l'exemple de la tranche matinale de France Inter, les éditorialistes et animateurs penchent tous en faveur du « oui ». Fin mars, le chroniqueur Daniel Schneidermann soutenait dans le quotidien « Libération » que « le «oui» semble aussi naturel aux grands médias que l'air qu'ils respirent. »

Les magnats des médias auraient-ils enfin réussi à organiser un complot visant à imposer une pensée unique ? Par bonheur, il existe la liberté d'Internet, largement affranchie des exigences économiques. Et la lecture des journaux ne donne pas l'impression d'un traitement unilatéral. Aux « Echos », nous avons déjà exprimé à plusieurs reprises en incidente notre préférence pour le « oui » dans des éditoriaux. Le journal le refera de plusieurs manières dans les semaines à venir. Mais cela ne l'empêche pas de s'efforcer de couvrir la diversité des positions en présence dans la campagne au fil de ses pages (Actualité, Enquête, Idées…).

Au-delà de la thèse du complot de presse, la vérité est à la fois plus simple et plus inquiétante. Il se passe dans les médias le même mouvement que dans la société toute entière : les dirigeants sont tous favorables au « oui » alors que le sentiment est plus mêlé chez les autres. C'est vrai dans les journaux, du « Figaro » à « Charlie-Hebdo » et « Alternatives économiques ». Dans les partis politiques : les patrons de l'UMP, du PS et de l'UDF prônent le « oui » (seuls les dirigeants des partis protestataires appellent au « non »). Au gouvernement, dont le chef Jean-Pierre Raffarin est tombé dans la marmite du « oui européen » quand il était petit. Et aussi dans les syndicats : Bernard Thibault (CGT), François Chérèque (CFDT), Jean-Michel Lemétayer (FNSEA) et Ernest-Antoine Seillière voteront tous « oui », alors qu'une bonne partie de leurs troupes penche en faveur du « non ». C'est vrai jusque dans la famille Mitterrand où Danièle, retraitée, dira ce soir son « non », tandis que son fils Gilbert, maire de Libourne, préfère le « oui » ! Cette préférence systématique des responsables explique au moins en partie la surexposition médiatique des partisans du « oui ».

Qu'elle soit due au comportement moutonnier des élites ou au contraire à leur capacité à avoir une vision globale de la société, cette rupture entre « la France d'en haut » et la « France d'en bas », entre le « Parti intérieur » et le « Parti extérieur » complété des « Prolétaires » pour reprendre la nomenclature orwellienne, est inquiétante (1). Elle montre une nouvelle fois les failles de la démocratie représentative. Les élites représentent mal le peuple alors que la démocratie participative, dont se réclament nombre de partisans du « non », n'a pas encore trouvé ses marques, ses relais, sa légitimité. Et, surtout, la rupture montre que les élites ont perdu une part de leur pouvoir d'entraînement, leur capacité à transcender les oppositions, leur aptitude à faire avancer le pays par leur vision de l'avenir. Or, c'est ainsi que Charles de Gaulle mit fin à la guerre d'Algérie ou que François Mitterrand abolit la peine de mort. La recomposition des élites pourrait finir par devenir la priorité absolue en France. Comme en 1789.

JEAN-MARC VITTORI est éditorialiste aux « Echos » jmvittori@lesechos.fr

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J.-M. Vittori est d'autant plus crédible que, si je comprend bien, il défend le "oui".

Aux « Echos », nous avons déjà exprimé à plusieurs reprises en incidente notre préférence pour le « oui » dans des éditoriaux
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Ca me fait penser au discours populiste de Villiers… Je ne le comprends pas ce type, c'est un libéral ou pas ? Sans doute un bushiste…

Bah c'est simple il n'est pas libéral du tout, son projet de société le confirme, mais comme tous il défend des idées libérales ici ou là … comme les Verts, comme le PS, comme le FN, comme Miguet (tiens ca fait longtemps !) , comme Robert, vendeur de muguet improvisé le 1 er mai, et voisin de Jean Claude et Francine, …

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