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Sécurité des particuliers et accroissement de l'Etat


Boz

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Dans un autre fil, Harald a posté ces très intéressantes statistiques :

Le taux global des homicides pour la Belgique, l’Angleterre, la France, l’Allemagne, l’Italie, la Suède et la Suisse, de 1950 à 1995, montre une nette augmentation qui a débuté vers 1970. Grosso modo, d’environ 0,9 à 1,5 pour 100 000 habitants. Au vu de cette courbe, l’observateur pourrait penser que la violence est un phénomène typique du monde moderne. Néanmoins, un graphique sur une très longue période démontre plutôt le contraire.

Les taux d’homicides ont chuté de quelques 30 à 50 par 100 000 habitants au moyen-âge, à 20 au XVIème siècle et encore moins pour chaque siècle suivant, pour parvenir à une moyenne tournant autour de 1 pour 100 000 au XXème siècle. En calculant les moyennes par siècle on ne se rend évidemment pas compte de l’escalade qu’il y a eu depuis 1970, mais cette augmentation apparaît très modeste sur l’arrière-plan de la baisse à long terme. Cette baisse se vérifie dans toutes les régions européennes pour lesquelles nous avons suffisamment de données, mais plus tard dans le Sud de l’Europe que dans les autres pays.

Lorsqu’ils sont examinés par pays ou par ville, les taux d’homicides montrent parfois des fluctuations ou des poussées temporaires. Ainsi les

taux d’homicides d’Amsterdam sont d’abord conformes au modèle européen, avec une baisse de presque cinquante au XVème siècle à juste

un peu plus de vingt à la fin du XVIème . Au cours des années 1660 et 1670, ils sont très bas – avec probablement un sous-enregistrement –

juste au-dessus de trois. Puis entre 1690 et 1720 on note un pic autour de neuf, après quoi la baisse reprend, avec un taux d’environ deux au début du XIXème siècle. Dans les années 1990 le taux d’homicides à Amsterdam était de nouveau à six. L’augmentation moderne s’est intensifiée à Amsterdam parce que la violence moderne se concentre dans les grandes villes cosmopolites. Pour l’ensemble des Pays-Bas, la hausse est beaucoup plus modeste : d’environ 0,4 dans les années 1950 à environ 1,4 dans les années 1990.

Constatant que dans un grand nombre de pays européens les taux d’homicides sont plus faibles depuis 2000 que dans les années 1990, nous

avons une indication que la poussée récente est peut-être terminée, voire en train de redescendre. Récemment, Amsterdam a connu une chute spectaculaire. Alors que la police comptait trente-cinq homicides en 2005, en 2006 il n’y en avait que dix-sept. Dans son discours de janvier 2007, le chef de la police Bernard Welten a déclaré : Nous avons arrêté la vague des liquidations. Il entendait dire qu’avec l’arrestation de quelques chefs supposés du crime organisé, la violente compétition entre les organisations illégales avait plus ou moins cessé. Cette affirmation doit bien sûr être soumise à une étude scientifique. Elle souligne le fait incontestable qu’aujourd’hui, comparé au passé, un plus grand nombre d’homicides ont leur origine dans le crime organisé. Cette conclusion découle d’un certain nombre de recherches approfondies, mais c’est un élément qui reste souvent dans l’ombre dans les analyses des taux globaux au niveau national.

La deuxième grande tendance à long terme de l’homicide concerne une augmentation importante de la proportion des victimes intimes. Les

données de recherches effectuées en Angleterre, aux Pays-Bas et en Allemagne, montrent que jusqu’au XVIème siècle le pourcentage des

victimes intimes d’homicides était nettement en dessous de dix, avec cinq comme moyenne. Il a grimpé à seize au XVIIème siècle, trente au XVIIIème , tandis que quarante ou plus était assez courant après 1800. À Amsterdam le changement est survenu vers le milieu du XVIIIème siècle. Entre 1700 et 1750 la victimation par des étrangers comptait pour 44% et par des intimes pour 14,7%. Au cours des soixante années suivantes ce rapport s’est inversé : 17,5% pour 42,5% (ces derniers chiffres étant probablement quelque peu tendancieux). Il faut aussi ajouter que puisque les taux d’ensemble diminuaient dans une proportion beaucoup plus élevée, le taux de victimation intime diminuait également. Une évaluation approximative, basée sur un ensemble de données européennes, donne 2 homicides du côté des intimes sur une population totale de 100 000 habitants au moyen-âge et 0,5 après 1800. Ces évolutions s’observent non seulement dans le cas des homicides, mais plus généralement dans de nombreuses formes de violence interpersonnelle. Pour la période contemporaine, les études sociologiques en France et en Allemagne suggéraient que cette tendance continue avec une force renouvelée, grâce à deux processus sociaux majeurs.

- Premièrement, une hausse des dénonciations de certains types de violence : violences contre les femmes et les enfants, dans l’environnement domestique mais aussi au travail, à l’école et dans de nombreux endroits où les jeunes vivent – y compris les établissements judiciaires – qui étaient beaucoup plus tolérées dans le passé.

- Deuxièmement, il y a un processus de « judicialisation » lié en partie aux nouveaux styles de vie, moins de liens communautaires, l’augmentation des conflits familiaux et conjugaux concernant le divorce, séparation et garde des enfants. Par exemple, la propension à signaler la violence domestique est probablement due à une plus grande sensibilisation plutôt qu’à un changement dans les

comportements en soi.

(Remarque liminaire : je n'ai aucune connaissance en criminologie, je m'excuse donc d'avance si mon propos semble naïf).

La première idée qui m'est venue, en jouant à l'avocat du diable, est : il y a donc corrélation entre accroissement de l'Etat et accroissement de sécurité (hors guerres). Ou encore : accroissement de sécurité avec l'avancement de la "modernité" (en fait on peut dire beaucoup de choses vagues à partir de là). Je vois aussi des objections presque immédiates : la pauvreté matérielle de temps plus difficiles donne nécessairement des chiffres d'homicides plus élevés, donc le rapport est à établir en réalité avec les progrès alimentaires, médicaux et plus généralement techniques. On peut aussi affirmer que ces chiffres auraient été encore bien plus calamiteux sans la morale et la foi de l'époque, si on veut aller par là…

Bref, ma question est simple : qu'en pensez-vous ? Est-il seulement possible de répondre ou cela restera-t-il une simple question d'opinion, le problème étant trop complexe à aborder de manière rigoureuse ? Certaines réponses ou propositions de réponses existent-elles déjà, mon ignorance étant alors à blâmer ? Les pics ou recrudescences locaux d'homicides à certains moments précis peuvent-ils être reliés à un facteur unique, quelques facteurs identifiables, ou la contingence est-elle insurmontable ? (C'est en tous cas une question passionnante car elle touche de près beaucoup des nombreuses sensibilités présentes sur ce forum).

Harald a déjà donné un élément de réponse intéressant, je le cite :

Bien sûr qu'il y a de mauvaises passes, enfin nous les définissons comme telles aujourd'hui alors que nous vivons dans un monde où la surproduction est la norme et lorsqu'il y a une année un peu moins bonne la seule incidence porte sur la hausse des prix et non pas sur la raréfaction des produits. C'est pour cela que les périodes moins heureuses ne sont pas criminogènes, tout le monde peut manger à sa faim et dans des proportions qui n'ont rien à voir avec les temps passés.

Sur le plus d'Etat, n'oubliez pas qu'en 1905 on répertoriait pas moins de 400.000 vagabonds errants sur les routes de France, que ces derniers vivaient plus ou moins de rapine et autres larcins pratiqués à des degrés divers. Ce qui a changé notablement la donne, ce n'est pas tant le plus d'Etat mais plutôt l'intrusion de la technologie dans le monde de la sécurité.

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Ce que j'aimerais avoir, c'est un taux de criminalité incluant aussi les crimes commis par l'état contre la société civile (séquestrations, exécutions policières injustifiées par le droit naturel, etc.)

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Ce que j'aimerais avoir, c'est un taux de criminalité incluant aussi les crimes commis par l'état contre la société civile (séquestrations, exécutions policières injustifiées par le droit naturel, etc.)

M.Weber: l'Etat a le monopole de la violence legale…

libertarien va…. je ne te denoncerai pas aux RG, pour cette fois :icon_up:

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