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Tout ce qui a été posté par Vilfredo
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Oui en effet, et je reconnais que ça commence à sortir du champ de la question que tu posais. Bah j'ai commencé à m'intéresser à cette question justement. Peut-être qu'inconsciemment ma première réponse visait à orienter le débat vers ce qui moi m'intéresse mais puisque tu me tends la perche je crois que c'est vraiment l'optique de Kant dans la Critique de la faculté de juger. L’interrogation centrale de Kant peut être résumée comme suit : comment un jugement singulier peut-il, sans règle, prétendre à l’universalité? L’universalité du jugement de goût ne provient pas de l’objet mais de la communicabilité du jugement à lui tout seul. Pour Kant, le jugement esthétique, dans la mesure où il est "réfléchissant," est une propédeutique à la moralité et la socialité/vie sociale. Je peux développer Comment se peut-il que j’affirme que River Phoenix est beau, supposant donc que mon affirmation est universelle et nécessaire, alors que, contre toute apparence, elle ne porte pas tant sur l’apparence de River Phoenix que sur le sentiment de plaisir que j’ai à le regarder, càd la chose la plus intime ? Il convient ici de préciser que Kant distingue le sentiment, intellectuel, de la sensation, physique, parce que le propre du sentiment esthétique est d’être détaché de la question de l’existence de son objet, contrairement à Hume, qui relie la contemplation du beau à un sentiment agréable du corps et à une disposition confortable de l’esprit, qu’il nomme pride, par opposition à l’humility. Hume est en cela plus proche de Nietzsche, qui rejette le dualisme et l’intellectualisme de Kant. Pour Kant en effet, le beau n’est ni un concept (connaissance), ni un agrément (plaisir) : il est bien plutôt une invitation à la recherche conceptuelle, par le libre jeu de l’entendement sous la conduite de l’imagination. L’entendement ne cesse de proposer des concepts sans pouvoir arriver à satiété. Cette voie ouverte, qui rend possible la discussion entre gens instruits, est la « forme de la finalité d’un objet sans représentation d’une fin ». La discussion suppose le partage, comme l’expérience partagée de l’œuvre, dans la postulation d’un sens commun : le plaisir esthétique est donc tout différent du désir érotique, qui aspire à la possession exclusive. La beauté, pour finir au sujet du sens que lui accorde Kant, ne pourrait être expliquée ni en termes de finalité objective, à savoir par la perfection de l’objet en son genre (même si, et je ne plaisante pas, on pourrait présenter comme ça la beauté physique, et Dieu sait si on l'a fait, et puis il faudrait aussi aborder la magnifique idée grecque que la beauté du corps et la santé de l'âme se reflètent), ce qui suppose une connaissance de l’objet pour pouvoir le trouver beau, et donc un jugement déterminant, ni en termes de finalité subjective. Symétriquement, seul ce qu’on ne peut produire, même en le connaissant parfaitement, relève de l’art : le génie ne connaît pas les règles de sa production, car il est l’intermédiaire par lequel la nature donne ses règles à l’art. La nature est le concept qui permet d’articuler, dans Kant, le jugement esthétique et le jugement moral : elle nous permet de postuler notre accord avec nos semblables, mais seulement en termes d’art. L’art est comme le moyen par lequel nous approchons la compréhension de la nature. L’idée selon laquelle l’art nous permet de voir la nature autrement, ou de la voir telle qu’elle est vraiment, est promise à une longue postérité : Wilde et Bergson défendent la première option, tandis que Schopenhauer, en écrivant dans le livre III du Monde comme volonté et représentation, que l’art nous révèle la force de la volonté dans le cosmos, défend plutôt la deuxième. Kant renverse donc totalement la perspective métaphysique qui prévalait jusqu’alors, qui posait une cause initiale dans le monde (Timée, 29e–30c). Kant effectue ce renversement en distinguant la fin naturelle (Naturzweck) de la fin de la nature (Zweck der Natur) : la première suppose la connaissance des intentions du créateur, ce que la Critique de la raison pure nous a appris à considérer comme dépassant largement notre entendement, tandis que la seconde désigne quelque chose qui nous paraît internement organisé, simultanément moyen et fin, qui ne nous force pas à concevoir la nature comme un tour objectivement organisé, même si, subjectivement, il nous y incite ; c’est d’ailleurs ce qui explique les postulats de Kant sur l’histoire comme processus de moralisation de la nature humaine, ce qui nous incite semblablement à ne pas nous attarder sur les massacres ou les erreurs, qui ne sont que des errements en chemin (cf. Idée d’une histoire universelle…, 7e proposition). Il s’agit in fine d’un impératif moral : il faut que je veuille un règne des fins pour obéir à mon devoir (ou pour que l’obéissance à mon devoir ait un sens, même si Kant ne le dirait pas comme ça). Ainsi définie, la beauté n’a de valeur que pour les hommes, êtres raisonnables. On peut relever (enfin moi je vais pas me gêner) une consonance entre l’argumentation kantienne, qui fait du sentiment esthétique le propre de l’homme, et celle d’Aristote sur la citoyenneté, en tant qu’elle exclut bêtes et dieux, car le beau, pour Kant, « n’intéresse empiriquement que dans la société », et offre un modèle de disposition à la morale, dans la mesure où il suppose de s’affranchir de l’intérêt au monde physique (et pour Kant, la morale est une question métaphysique). Quoique désintéressé, le sentiment esthétique peut donc produire un intérêt social, moral, avec cette différence que le jugement esthétique produit un intérêt « libre », alors que le jugement moral produit un intérêt « fondé sur une loi objective ». Le jugement de goût présente donc une analogie avec le jugement moral (Kant parle « de la beauté comme symbole de la moralité ») : il rend possible le passage de l’ « attrait sensible » (déconstruit par le désintéressement que suppose l’expérience esthétique) à l’ « intérêt moral habituel ». On peut pousser l’esthétique de Kant jusqu’à dire, sans contresens, que ce n’est pas l’objet mais le jugement qui nous plaît. En cela, Kant nous éloigne radicalement du rapport entre beauté sensible et monde intelligible de Platon, en faisant de la contemplation esthétique une activité plaisante pour elle-même pour tout homme. Bien sûr on peut reprendre tout ce que j'ai dit et ajouter comme un ado attardé "... ou pas!" Ça vous donnera l'oeuvre de Nietzsche. Pour continuer mon aventure je lirais bien L'Art et l'illusion de Gombrich, bien sûr, mais aussi The Sense of Beauty de Santayana. Ce qui m'importe c'est que j'aie réussi à argumenter en faveur d'une "éthicité" des jugements esthétiques, ce qui était, je crois, ta question. Pour tes 4 questions d'hier, je ne suis pas assez instruit en sciences cognitives ou psycho pour répondre ou apporter des éléments sur (1) mais j'espère que le présent wot apporte des éléments sur (2).
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À ce propos j’ai récemment eu dans mes pattes ceci https://www.hup.harvard.edu/catalog.php?isbn=9780674919211 mais ça avait l’air trop matheux pour moi
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Callicles devait probablement avoir monsieur phi en tête quand il disait que les philosophes ressemblaient à des adultes ridicules n’ayant pas grandi et qui jouaient encore avec les concepts comme les enfants
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Mélenchon, le Tout Petit Père des Peuples
Vilfredo a répondu à un sujet de Johnathan R. Razorback dans Politique, droit et questions de société
Ou alors le mec cherche les emmerdes et Mélenchon a très bien fait de le remettre à sa place. -
Je raconte my life 9 : hache de bûcheronnage et vaporetto
Vilfredo a répondu à un sujet de poney dans La Taverne
Bon moi je vais me faire livrer un bouquin la nuit pour la première fois (Amazon). Ma commande affiche "Livraison aujourd'hui avant 22h". Ticking, ticking. (Comme j'attends de voir ce qui va se passer dans 10 min (en fait ça se trouve et meme assez probablement il est déjà livré, je vais aller voir), Amazon me propose d'acheter Penser dans un monde mauvais de Geoffroy de Lagasnerie. Ce titre ) -
Ben voyons. C'est le début du roman, c'est la grande époque des moralistes, des libertins, du roman épistolaire, du théâtre bourgeois, de Marivaux, de Diderot, mais sinon c'est pas fou fou? (edit cinq heures plus tard: sans oublier les mémorialistes) La France n'est pas le monde entier. On a écrit des romans avec des narrateurs plus complexes et plus de niveaux méta. Je vois pas en quoi ça "tue" davantage l'idée de roman que Bouvard et Pécuchet ou Salômbo ou Tristram Shandy. Et franchement Céline ne change pas grand chose à l'art du roman comme narration ou récit. C'est vraiment pas ce qui frappe quand on lit ses premiers livres (ceux que les gens ont lu). Les derniers romans sont plus abstraits et avant-garde mais on en parle bcp moins justement: des romans sans intrigue, parfois quasiment illisibles sous la couche d'exclamations et d'onomatopées. C'est plus de la musique.
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Bof. Il n'y a rien eu de "comparable" à Céline avant ou après Céline. D'un certain point de vue Céline est un écrivain d'un autre temps que le sien, un écrivain en "verve" (la "verve" étant une qualité qui disparaît au XXe, je crois que c'est Drieu qui fait remarquer ça dans son Journal) qui appartient davantage, littérairement parlant, au monde des fabliaux et des satires romaines qu'au monde du roman contemporain. Mais quand on arrête d'estimer la valeur d'une période entière à l'aune d'une autre comme si c'était comparable ou, pire, à l'aune d'un seul auteur, on se rend compte que "la littérature" se porte aussi bien que jamais. Un exemple de pourquoi cette approche ne marche pas: au XVIIIe siècle en France, il n'y a aucun poète. Zéro. A part Chénier, à la toute fin. Comparé aux deux siècles précédents, ça fait mal. Et? "La littérature" est devenue moins bien pour autant parce qu'on n'avait plus notre Ronsard?
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Comparer les antivax aux Bolchéviques, j'aurai vraiment tout lu. Je m'en fiche des conneries des antivax. Les gens suffisamment cons ou manipulateurs pour les produire influenceront le choix des gens suffisamment cons pour y croire. C'est la vie. Les antivax ne font pas "bien pire": on a d'un côté des gens qui influencent l'opinion (en mal, ok), de l'autre des gens qui applaudissent des agressions. Et le gouvernement n'a aucun rôle dans la méfiance vis-à-vis des MSM bien sûr...? C'est un peu facile de renvoyer tout le monde dos-à-dos.
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Eh bien @Johnnieboy nous parlions de Céline, événement littéraire de l'année: on vient de mettre la main sur les manuscrits volés à la Libération! Il l'avait toujours dit, c'était vrai. Il s'agit, entre autres, de la fin de Casse-pipe et d'un roman inédit (!), intitulé Londres apparemment. Je frétille d'impatience. https://www.la-croix.com/Culture/Lincroyable-reapparition-manuscrits-disparus-Louis-Ferdinand-Celine-2021-08-05-1201169545
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Ce que je voulais surtout dire est que peut-être tous les êtres humains ne sont pas susceptibles d'agir moralement. Sinon on n'aurait pas d'exempli, on ferait juste comme tout le monde et on appellerait ça "agir moralement", ou on créerait tous nos propres valeurs, et ça ne risque pas d'arriver. Well je pense qu'on peut faire plus de choses que ça avec le dégoût. Je ne veux pas parler des livres que j'ai pas lus *mais* Haidt en fait la pierre de touche de ses études sur les fondements psychologiques des orientations politiques si je me souviens de son podcast chez jbp. Et il a aussi un rôle dans le comportement sexuel. Mais au-delà de ça, ce à quoi je voulais tendre était plutôt un mécanisme tel que la théorie implique les jugements qui sont portés sur elle (et c'est pour ça que je prenais comme illustration les théories de la vérité). A partir du moment où seuls certains êtres d'une constitution précise peuvent porter des jugements sur la théorie, par proxy (le proxy étant ces êtres), la théorie implique les jugements qui sont portés sur elle. Nous ne sommes que les outils de la théorie pour réaliser le bien moral sur Terre. Dites-moi si je délire. En revanche, je suis d'accord qu'il est sans doute difficile de faire pour 'courageux' ce que Carnap a fait pour 'soluble'. Ni très fascinant d'ailleurs. Mais c'était joli dans le raisonnement. On pourrait aussi dire que je choisirais de la répéter dans une autre vie (l'éternel retour). Mais ça laisse ouverte la question: qu'y a-t-il de spécifiquement moral dans cette action? Il y a beaucoup de choses que je choisirais de répéter dans deux instances identiques modulo le nombre de brins d'herbe mais qui ne sont pas morales. Ni immorales d'ailleurs. 99% des trucs que je fais ces jours-ci par exemple. On en revient bien au problème de caractérisation de la moralité des actions.
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Macron : ministre, candidat, président... puis oMicron
Vilfredo a répondu à un sujet de Nigel dans Politique, droit et questions de société
Je deviens dylsexique -
Guerre civile culture, IDW, SJW & co
Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Ce mec est vraiment Bryan Mills -
Détroit, Californie, New York : le socialisme Made in USA
Vilfredo a répondu à un sujet de NoName dans Europe et international
La vidéo où il se justifie de toucher les joues d'une femme à un mariage, et qui a fait la Une du NYT, est quand même incroyable. Ah oui et il lui a dit 'ciao bella'. Un vrai danger public. -
Guerre civile culture, IDW, SJW & co
Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
C'est incroyable cette liste d'articles (principalement de la BBC pour ce que j'ai lu) autour de Matt Damon, que sa fille aurait convaincu de ne pas employer le mot "faggot" (qui n'est même pas écrit en entier dans les articles comme s'il fallait conjurer la présence de Voldemort; il n'y a pas si longtemps on censurait Fairytale of New York de The Pogues pour cette raison je rappelle). D'abord celui-ci: https://www.bbc.com/news/entertainment-arts-58053709 Ensuite ça: https://www.bbc.com/news/entertainment-arts-58069170 Parce que oui, après qu'on a appris qu'il ne dirait plus "faggot", il y a eu des gens pour se scandaliser qu'il ne décide d'arrêter de le dire que maintenant! Qu'est-ce qu'il est supposé faire? Certes, dans un premier temps, ce qu'il serait supposé faire c'est pas d'autocritique sur son vocabulaire. Mais maintenant qu'il nous en a gratifié, comment va-t-il rétroactivement dédire chaque occurrence de "faggot" dans son passé? Je ne sais même pas qui est le plus pathétique entre les gayzelles horrifiées par le langage de Matt Damon (comme les parents qui disent à leurs gosses "language!") et Matt Damon lui-même. -
Ouch. Vu toutes les conneries qu'ils publient, à la place de Mucchielli je serais vexé.
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L'un des 5 libéraux français arrive pour grossir les rangs
Vilfredo a répondu à un sujet de Airgead dans Forum des nouveaux
Il *faut* que je me souvienne de dire ça à quelqu'un IRL quand l'occasion se présentera -
J'aime bien les mariages. C'est seulement au matin d'un mariage que j'ai eu l'occasion de manger des pizzas froides au petit déjeuner. C'était bizarre mais c'était bon.
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L'un des 5 libéraux français arrive pour grossir les rangs
Vilfredo a répondu à un sujet de Airgead dans Forum des nouveaux
On a tous notre petit côté Pinochet -
L'un des 5 libéraux français arrive pour grossir les rangs
Vilfredo a répondu à un sujet de Airgead dans Forum des nouveaux
Mmmhhh? -
Cela dit je suis d'accord avec @cedric.org sur le fait qu'il est possible de distinguer l'obligation morale de l'obligation politique. Mais même moralement ça ne tient pas.
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Bah non il a raison. A partir de quel ratio commence la responsabilité?
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La question que je me pose est: est-ce que la "valence morale" de l'action est une propriété de l'action ou de l'agent (quoiqu'on puisse rabattre le second ensemble sur le premier et vice-versa, surtout dans un cadre virtue ethics)? La raison pour laquelle je pose cette question est qu'il y a une tendance à définir un archétype d'agent moral (l'homme de bien e.g.) qui fonctionne, dans la théorie morale en question, comme une simulation, dans la mesure où son trait distinctif est: faire de bonnes actions, et à ce titre, il devient effectivement archétypique. Je parle de simulation parce que la manière dont ça fonctionne est: je prends un individu, je lui fous en 'attributs' whatever I need pour le faire agir moralement, et une fois que je l'ai programmé pour agir moralement comme on remonterait une petite voiture, je le laisse évoluer et je regarde. C'est tautologique et ça ne fait que déplacer le problème d'un cran si l'on se demande ce qu'il faut faire ou pas faire, mais ça change l'orientation de la réflexion si on cherche où regarder pour identifier dans le monde réel ce qu'est une bonne action. Dans une perspective un peu NT, je crois que c'est cette fonction archétypique qui est remplie par les saints et, avant, par les exempli latins (Plutarque, la Vie des hommes illustres), de façon radicalement inutile en fait, parce que le problème de l'application de l'action à des circonstances différentes, ou du degré auquel l'action peut-être abstraite (quelque chose qui ressemble à la question: "y a-t-il une "action" indépendante des circonstances? ce qui nous déplace de la métaéthique à la métaphysique, puisque c'est la même question que: y a-t-il quelque chose comme le concept de "chien" ou une différence entre "chien" et "tel chien" etc.?) reste entier. Cela dit, pour être honnête, ce problème est en fait au coeur de la casuistique... à laquelle je ne connais malheureusement rien Je remonte à la question qui occupe ton oisiveté: la première chose qui me vient à l'esprit est une analogie avec une théorie de la vérité qui dirait quelque chose comme: est vrai un fait dont l'occurrence me force à produire un jugement vrai à son propos. Par exemple: si une version radicale du déterminisme matérialiste (:= absolument toutes nos actions sont déterminées par des réactions physiques et, pourquoi pas, programmées dans notre essence individuelle à notre naissance) est vraie, alors elle l'est aussi nécessairement, et donc dans le jugement porté sur la théorie est déjà déterminé par la théorie. J'imagine un truc pareil pour une théorie de l'action morale. C'est pas absurde pour une classe d'actions mauvaises (je pense aux explications darwiniennes du dégoût, et JBP aurait des choses à dire sur le rapport de tout ça avec le péché originel) mais surtout ça réconcilie l'interrogation sur la nature de l'action avec celle sur la nature de l'agent: une action bonne est telle qu'elle est nécessairement considérée comme bonne, voire réalisée, par un homme (de nature) bon. Si je reprends mon analogie avec la théorie de la vérité, la valence des actions serait un être ontologiquement accessible uniquement à certains êtres comme... les êtres bons. Donc généralisable, dans une certaine mesure, et par définition pas universalisable, parce que les hommes ne sont pas tous égaux. Que ce soit généralisable ne veut pas dire qu'on ait la recette pour le généraliser. Le jugement sur l'action 'bonne' n'étant accessible qu'aux hommes 'bons', à partir du moment où l'un des attributs de 'bon' est le souhait de généraliser l'action, le souhait de généraliser l'action est une conséquence de sa constitution. Ça peut se comprendre dans une perspective à la Nietzsche où les théories morales sont des systèmes de valeurs qui sont tout ce qu'il y a de plus réel, et par là façonnent, au niveau biologique, notre perception du monde. A cet égard, les métaphores qui tournent autour de l'idée de perception et de myopie dans N sont légion (un seul exemple dans Le Cas Wagner: "on ne réfute pas le christianisme, on ne réfute pas une maladie des yeux"). Cette contrainte déterministe qui te force à reconnaître la bonté de l'action morale quand elle se présente à toi pourrait être un sens de l'expression 'loi morale' non pas de façon analogue à la loi juridique, qui peut toujours être désobéie, mais à la loi physique, du coup. On pourrait l'appeler 'la loi des corps moraux'. La modernité a vraiment foutu le bordel en distinguant les faits et les valeurs. That's my theory Le problème maintenant, c'est que ça n'empêche pas d'autres hommes de produire des jugements moraux positifs sur des actions qui ne le méritent pas. On peut toujours botter en touche analytiquement et dire que bah ce sont pas des vrais jugements moraux positifs alors, mais le problème est que ça y ressemble drôlement. Je ne suis pas sûr que ce soit un gros problème cela dit: l'autre point commun entre la valeur de vérité d'une proposition et la valence morale d'un jugement est qu'elles présupposent l'intention de l'agent, donc oui on peut produire des propositions vrais sans s'en rendre compte ou par hasard (c'est le fameux Gettier problem) mais ça n'empêche pas l'ensemble de la théorie de fonctionner. Par ailleurs, si qqn produit un jugement moral erronné, la discrepancy entre ce qu'il dit et ce qu'il fait apparaîtra à ceux à qui elle est 'accessible' et ne cessera donc pas d'exister (pour eux (après on peut avoir un débat pour savoir si des choses existent quand personne ne peut les voir... je ne cesse de me poser la question)). Ça pose quand même un risque dans la théorie, ces faux jugements moraux. Du coup le facteur que je voudrais interroger est la valence morale du prédicat 'généralisable'. On pourrait par exemple considérer que le souhait de généraliser une action, même bonne, est moralement mauvais, précisément à cause du risque de se tromper. Une sorte de prudence épistémologique appliquée à l'action morale. Je fais encore un peu du Nietzsche pour NT avec son histoire de créer ses valeurs, qui coupe l'herbe sous le pied, là aussi, à toute généralisation (Le Gai Savoir, 335). On retombe donc sur une théorie de la nature de l'agent comme présupposée par l'action: un agent est défini comme un être tel qu'il est capable de produire plutôt tel ou tel type d'action, c'est pourquoi la plupart des attributs moraux sont des termes dispositionnels. Je pense un peu à Ryle ici, dans la mesure où il écrit que ce qui est apprécié dans une action est le savoir-faire (skill) qu'elle manifeste. Personne ne conteste qu'une action soit réelle (au sens néopositiviste bateau), mais le savoir-faire n'est pas occulte non plus, pas plus que n'importe quelle disposition en fait (prenons 'soluble' par exemple). Le propre d'une disposition est de se manifester naturellement dans un certain contexte: c'est même la définition logique d'une disposition, et c'est la forme que prennent les énoncés de réduction bilatéraux qu'utilise Carnap dans Testability and Meaning pour réduire 'soluble' en termes observationnels. Donc si on pousse jusqu'au bout mon naturalisme moral, il doit exister une manière de formuler des énoncés de réduction bilatéraux pour 'courageux' et 'bon' de façon analogue à 'soluble' sans qu'on ait à se préoccuper activement de la possibilité d'une généralisation du comportement individuel comme critère définitoire de la valence morale de l'individu agent. Maintenant une raison de ne pas valuer positivement le prédicat 'généralisable' (qui a à voir avec mon point métaphysique du début sur la difficulté d'abstraire une action comme on ferait pour un concept: la différence évidente est que l'action n'est pas là dehors, elle est effectuée par un agent, et l'agent est tel qu'il est disposé à effectuer tel type d'action): je suis profondément convaincu que la bonne action dans le dilemme du trolley est de changer de voie et de causer proximalement la mort d'un ouvrier. La raison pour laquelle je pense ça est que cette action n'est pas un meurtre, dans la mesure où mon intention n'est pas de tuer l'ouvrier. On peut vérifier ça (dispositionnellement) en imaginant le contrefactuel où l'ouvrier saute au dernier moment de la voie et échappe à la mort. Dans la 'simulation', est-ce que je dégaine alors mon fusil à lunette pour achever le sonofabitch pendant qu'il détale? Non. Si on revient donc à la première 'simulation', celle où il meurt, force est de constater que, comme je suis la même personne dans cette simulation (ou ce monde possible, pour prendre une terminologie plus morale) que dans l'autre, je ne suis pas un meutrier et donc mon action n'est pas un meurtre (parce que, pour être bien clair, manque l'intention de tuer). Maintenant, qu'est-ce qui est généralisable dans ma bonne action? Bah franchement, j'en sais rien.
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Oh et il y a l'épisode avec "Gaupette". Cette prostituée qu'il suit pendant des dizaines de pages dans la banlieue de Lyon. C'est presque une petite nouvelle en soi dans le roman, comme faisait Stendhal par exemple avec la Fausta dans La Chartreuse (inspiration évidente de Rebatet). Non vraiment c'est super horny comme bouquin.
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C'est vraiment très, très bien. Mon exemplaire est abîmé d'avoir circulé dans les mains de tous mes copains justement. Je ne le relirais pas maintenant, j'ai peur de perdre le plaisir que j'avais eu à le dévorer assis sur mon lit pendant 6 jours, le gros bouquin posé sur mes genoux. J'avais mal aux fesses et aux jambes à la fin à force. C'est sans doute la seule tentative réussie en France d'écrire un roman dostoïevskien. Et cette fin
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Ouh laugh react mais non, il y a une scène de sexe épique à la fin des Deux Etendards plus la scène où il brûle de sexer cette pute d'Yvonne qui m'avait fait exploser de rire. Je crois que ça se termine il lui demande juste de foutre le camp sinon il va l'enfoncer jusqu'à la tête. Edit grillé par JB
