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Tout ce qui a été posté par Vilfredo
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oui cest vrai jai jamais rien écrit de développé sur la critique de leudemonisme ou de l’hédonisme dans Nietzsche ou kant, sur tes interprétations farfelues du premier et sur les études “empiriques” bidon sur le bonheur (auxquelles tu aurais bien sûr répondu dans les six mois je n’en doute pas) et de manière générale je ne me casse jamais les pieds à écrire des wall of text, je devrais vraiment faire un effort et lutter contre ma tendance irrésistible à la concision pour te faire plaisir Exemple typique de cas où tu as clairement pris en compte les trouzmille objections soulevées contre ta position par quasiment tous les membres du forum Quand je parle de réduire le malheur je considère le libéralisme en question comme une pensee politique qui s’occupe donc du pouvoir et de la sphère publique (les hommes en tant que citoyens) et pas de la vie privée (hommes et femmes). Le malheur n’est pas définissable sans avoir en creux la vie bonne? Je sais que le vol c’est mal ça veut pas dire que je sais ce qu’est la vie bonne. Si tu me réponds “une vie où on vole pas” ça va pas suffire pour conduire ma vie. Comme tu le dis c’est purement négatif. Donc je veux bien que tu me reproches d’avoir une conception négative du bien mais va pas ensuite m’expliquer que j’ai une conception de la vie bonne cachée. “Moi je”
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TL;DR Il n'y a pas d'éthique de la discussion ou d'intersubjectivité qui tienne dans la relation analysé/analysant parce que l'analysé n'entend pas ce qu'il dit et que seul le psy peut y conférer un sens et ainsi, pace Habermas, on arrive à la vérité. Mais de façon générale et caractéristique, je ferai des réponses plus courtes quand j'aurai encore plus lu (Lacan). Ma facilité à résumer Putnam et Nozick dans le message à Lancelot et ma difficulté à résumer Lacan dans ce message incomparablement plus long montre assez bien mon degré de maîtrise des auteurs respectifs. Mais then again, Lacan n'est pas le genre d'auteurs qu'on peut "maîtriser". Mais je crois quand même que je ferai mieux dans six mois. Arriver à passer de "penser à l'écrit" à "expliquer".
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Ce n'est pas de la fausse modestie: je ne suis pas du tout un spécialiste de Lacan (je commence juste à pouvoir répondre à certaines questions sur r/Lacan) et je pense même qu'une des grosses difficultés qu'il y a à lire Lacan, et c'est précisément la réponse à ta question, c'est que Lacan met en évidence que le type de savoir qu'il transmet est fondamentalement différent de la philosophie (il dit quelque part, et c'est célèbre: "je m'insurge contre la philosophie") au sens où ça n'est pas un savoir théorique ou un contenu qu'on peut maîtriser délivré par quelqu'un qui dit des choses vraies dont on peut discuter. Il y a un discours universitaire et un discours de l'analyste. Le psychanalyste ne "maîtrise" pas un savoir comme un philosophe qui écrit un livre ou fait une conférence et répond à des questions: il faut un savoir et une pratique immense pour ensuite pratiquer, càd savoir jouer un certain rôle devant le patient, de façon différente avec chaque patient, ce qui est aussi une immense responsabilité. Quand un philosophe lit Lacan, il fait avant tout l'expérience d'un discours qui ne lui est pas adressé. Donc je pense que, à part Zizek (qui n'est pas psychanalyste, même si on le présente parfois comme tel), à peu près aucun philosophe ne peut prétendre connaître Lacan. Il faut se référer à des psy pour the real stuff (Jacques-Alain Miller, Bruce Fink, Joel Dor) même si Zizek est fun et brillant. C'est pertinent pour la question que tu soulèves, parce que Lacan s'oppose historiquement à l'ego psychology qui, aux USA, reprend des bouts de la théorie freudienne, càd qu'ils traitent Freud comme un mec qui dit des trucs vrais ou faux, faut voir. En gros, ils le traitent comme un philosophe (ou un scientifique, ça revient au même du point de vue du discours). Lacan le traite comme un maître, càd quelqu'un qui a une autorité. Quand il a rompu violemment avec l'Ecole freudienne de Paris et créé l'Ecole de la cause, il s'est adressé à ses disciples comme "à ceux qui m'aiment", parce qu'il pensait que la seule façon de transmettre un enseignement psychanalytique était transférentielle (le transfert c'est quand tu tombes amoureux de ton analyste (je résume hein), en tout cas quand les résistances cessent de se manifester et c'est le début de la cure; pratiquement, ça veut dire qu'au lieu d'être assis face au psy, tu passes sur le divan où tu ne vois plus que le plafond). Alors on entend déjà crier les critiques de Lacan (genre Chomsky): vous voyez bien, c'est un imposteur, il raconte n'importe quoi à des ouailles fanatisées, c'est un obscurantiste. Bien au contraire: Lacan veut plutôt dire que le discours lui-même, l'univers symbolique comme il l'appelle, et le "grand Autre" (tout ça c'est la même chose), a une structure par définition autoritaire, et la psychanalyse (je vais donner un exemple tout de suite) vise à nous en délivrer plus ou moins. Mais il faut comprendre ça dans un sens psychanalytique: quand tu es allongé sur le divan et que tu associes librement comme un con, tu blablates dans l'air en attendant la réponse, la remarque, ou le silence, de l'analyste: l'analyste est celui qui va, par un mot, une phrase, donner soudain un sens à ce que tu déblatères, un sens qui s'entend dans ce que tu dis. Selon la formule lacanienne: « Qu'on dise reste oublié derrière ce qui se dit dans ce qui s'entend ». (Explication no bullshit de cette phrase) Le psychanalyste te fait entendre ce que tu dis. Tu es l'esclave (celui qui travaille) et il est le maître (dans Hegel). On peut aussi se souvenir de la phrase de Freud das Ich kein Herr sei in seinem eigenen Haus. L'idée est que l'analysé n'est pas le maître de sa chaîne signifiante (la combinaison des signifiés, voir exemple ci-après). Devant cet acte de donation de sens, si on veut, il n'y a pas la rétraction possible de: ah mais discutons-en, je ne suis pas d'accord avec vous etc. (la discussion éclairée habermassienne) De toute façon tu peux très bien le dire mais ce qu'il t'a dit ne cesse pas de signifier quelque chose pour toi qui remet en question ton univers symbolique. Je vais prendre un exemple: il y a un cas de Lacan où une femme avait été enlevée par la Gestapo et était évidemment traumatisée (source) et Lacan se lève soudain et lui caresse doucement la joue ("geste à peau"): en faisant ça, il lui donne la possibilité de réinvestir ce signifié (Gestapo) en son contraire (d'un souvenir de torture en une marque de tendresse) et donc de sortir du traumatisme en réorganisant l'univers symbolique. Evidemment, ça ne supprime pas la douleur, ça serait obscène de prétendre ça, mais la psychanalyse n'a jamais rendu personne heureux. On n'est pas chez les hippies. Quand je parle de libération, ça n'a rien à voir avec la libération sexuelle. Et quand Lacan parle de "ne pas céder sur son désir", il n'a pas non plus en tête quoi que ce soit de ce genre (là-dessus faut dire que Zizek est super clair). Je pourrais continuer là-dessus, ça a une connexion intéressante avec une erreur commune faite sur la psychanalyse qui est de mettre dans la tête des gens ce qu'ils ne pensent pas (la critique de Wittgenstein) mais j'essaie de rester sur la question du langage comme structure autoritaire. Maintenant de façon plus théorique: l'ordre symbolique dans lequel est inscrit le sujet est à la fois fini (notamment limité par le Réel, ce que la symbolisation a rejeté par définition) et infini (il y a un nombre infini de combinaisons des symboles en nombre fini, càd qu'il n'y a rien qui ne puisse être dit dans un langage symbolique: on peut y voir un point wittgensteinien: il n'y a pas de point de vue à partir duquel je pourrais dire les limites du langage). Le signifiant qui tient lieu de cette tension dans le champ symbolique est le "maître signifiant". Pourquoi le maître? Parce que le maître, celui qui a l'autorité, celui dont on pense que ce qu'il dit est vrai pas parce que c'est vrai, mais parce que le maître l'a dit, l'apôtre si vous voulez, et non Socrate (j'emprunte au livre de Zizek cette distinction), se trouve dans la position dans l'ordre symbolique de ce manque dans la structure. Là aussi, se trouver dans une position dans l'ordre symbolique a l'air d'un charabia infâme, mais ça veut dire quelque chose de très concret: par exemple, dans North By Northwest de Hitchcock, Roger Thornhill (Cary Grant) est confondu, à la suite d'un geste qu'il fait à l'hôtel, avec un soi-disant espion du nom de Kaplan. Il prend, dans l'univers symbolique, la place de Kaplan. Mais Kaplan n'existe pas: c'est une invention des services secrets pour surveiller des criminels (les cinéphiles du forum me corrigeront si je dis une bêtise là-dessus; le point important est qu'il n'y a pas de "vrai" Kaplan). Donc Thornhill prend une place vide dans l'ordre symbolique: il est un imposteur sans le savoir. Le maître, lui aussi, est un imposteur, mais la place qu'il occupe, elle, est nécessaire. Il ne s'agit pas d'une imperfection contingente de la communication due à notre irrationalité ou à nos préjugés comme dans Habermas. Il y a dans la théorie de Habermas une fiction régulatrice qui est un peu l'équivalent du marché libre en économie (ou l'ERE de Mises si vous préférez ou le principe de Hardy-Weinberg en biologie; chaque théorie scientifique a sa fiction régulatrice): si nous échangeons des arguments rationnels dans un environnement sans contraintes blabla nous arriverons à un consensus éclairé. Mais il y a une autre situation de discussion "sans contraintes": c'est la séance d'analyse. Elle est "sans contraintes" au sens où l'autorité du "maître signifiant" est enfin rejetée dans l'association libre. La résistance est la marque du pouvoir du "maître signifiant": ce qui te retient, inconsciemment, d'associer, ce qui te fait parler d'autre chose. On connaît tous les anecdotes sur Lacan qui laisse la porte ouverte, qui laisse le téléphone sonner, qui interrompt la séance au bout de 5 minutes: il faisait ça pour signifier: je m'en fous de ce que vous racontez, vous ne jouez pas le jeu. On n'est pas là pour dire ce qu'on veut. Tout ça pour dire que, comme je l'écrivais à @Lancelot, Lacan permet de penser que l'intersubjectivité n'est pas l'horizon ultime des rapports humains ni le mètre-étalon de la constitution de la vérité: le psychanalyste aussi est à la recherche de la vérité quand il t'écoute déblatérer. Et la vérité, c'est le désir qui essaie difficilement de s'articuler. Il y a une dimension libératrice: il s'agit de délivrer de la puissance du symptôme, pas en disant au patient: arrêtez, je sais mieux que vous ce que vous désirez. Tout le contraire. Il s'agit de lui permettre de le formuler lui-même, pour briser l'insistance de "ce désir qui, littéralement, est en-deçà de l'existence, et pour cela insiste" (Lacan; on reconnaît son style mallarméen). (Une question qui reste ouverte pour moi est le rapport de la psychanalyse à la religion et à la notion de personne. Freud, on le sait, était profondément athée et considérait la religion comme une superstition. Lacan, pas du tout.) Donc il y a une dimension libératrice. Mais la liberté totale, c'est la psychose. Celui qui vit littéralement et expérimente dans sa vie constamment quelque chose comme l'association libre en cure, c'est le psychotique, dont l'univers symbolique recouvre tout, qui ne connaît pas d'exception. On peut prendre en exemple les grands systèmes philosophiques qui touchent à l'Absolu: Hegel, grand psychotique. C'est le prix de la délivrance du grand Autre. Pour nous autres êtres parlants, dans la mesure où précisément nous parlons, càd que nous avons été castrés par le symbolique, où il nous manque quelque chose que la parole re-présente, nous ne pouvons échapper au grand Autre (Lacan utilise, pour faire comprendre ça, la conception platonicienne de l'amour: après la castration/la division en deux des hermaphrodites, chaque "partie" cherche sa partie complémentaire et l'amour, c'est quand on la trouve; le grand Autre naît de la castration; Leo Strauss commente le mythe de l'hermaphrodite dans le Banquet de façon extrêmement lacanienne quand il écrit que la castration, c'est la civilisation. Les écrits de Lacan sur l'amour (Le Transfert) et l'éthique de la psychanalyse (L'Ethique de la psychanalyse) sont vraiment passionnants même si ce n'est pas le terme qui convient. Par ailleurs Le Transfert ça se lit relativement aisément.) En parlant de castration si vous voulez une intro simple à Lacan: (et aux relations humaines en général; il y a une variante racontée du point de vue du cercle (big O, le langage avec un trou, vous voyez maintenant?) où le cercle jette la pièce manquante parce qu'il ne peut plus chanter: "Je cherche ma pièce manquante", et qu'il avait plaisir à chanter, donc à désirer: le désir est dans le signifié, le désir est, pour le dire en bon français, dans le discours sur le désir. Les humains ne font pas l'amour en se sautant dessus: il y a la cour, le dirty talk, la discussion "après", les poèmes, et même jusqu'à la mention du nom de l'aimé; et bref à la fin le grand 8 rappelle la matrice de la pulsion, qui se perpétue elle-même.) Quand on y réfléchit, la plupart des critiques influentes de la psychanalyse en philo (j'en vois deux, Popper et Wittgenstein) se font du point de vue d'une sorte d'éthique de la discussion: Popper avec la falsifiabilité, Wittgenstein avec les causes et les raisons (la psychanalyse doit donner les raisons par exemple des rêves, et donc avoir pour standard de validité dans ses explications l'assentiment du patient; lol tu parles si on soignerait beaucoup de gens à ce rythme). Lacan aide bien à voir pourquoi elles ne sont pas fondées.
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J'ai encore lu Lacan aujourd'hui (je dis ça comme: pardonnez-moi mon père parce que j'ai péché) et quand même, il me semble que la relation psychanalytique elle-même donne un exemple du Réel qu'on atteint sans passer par l'horizon indépassable de l'intersubjectivité. On sait aujourd'hui à quel point c'est à la mode de parler du visage de l'autre Lévinas "and so on and so on" comme dirait Zizek. Mais on oublie que dans la cure, on ne regarde pas le psy: tu es allongé, le psy est derrière toi (en train de se branler ou de jouer aux cartes probablement) et tu es profondément seul, 1 + quelque chose d'autre, qui est moins que 0 et plus que 1, donc l'objet. L'analyse permet de mettre les mots sur cette chose (le Réel) sans passer par l'intersubjectivité, voilà la formulation la plus concise de ce que j'essaie de dire, et j'espère ne pas me tromper. Lacan est aussi une machine à détruire l'éthique de l'argumentation (Apel, Habermas) pour la même raison. C'est diabolique car le cours sur la philo et la psychanalyse que je voulais suivre et hésitais en même temps à suivre à Paris I est annulé (prof malade). Gott im Himmel! Sur la citation que tu donnes (et qui me donne envie de lire K Dick davantage), c'est curieux parce que ça me fait penser plutôt à la superstition. Il y a l'histoire sur le fer à cheval de Niels Bohr: https://www.laphamsquarterly.org/magic-shows/miscellany/niels-bohrs-lucky-horseshoe Mais elle peut introduire l'hypothèse du rêve, parce que c'est parce qu'on ne croit pas qu'on rêve qu'on rêve, et c'est quand on commence à croire qu'on rêve qu'on cesse de rêver, si bien qu'on ne peut jamais savoir qu'on rêve (si par connaissance on entend, comme c'est le cas généralement, justified true belief), ce qui est justement l'hypothèse sceptique du rêve. Elle a de nombreuses formulations: il y a la Méditation première de Descartes (d'abord littéralement au début, puis l'hypothèse du malin génie), reprise par Pascal. Descartes propose une seule solution: Dieu est bon, donc il ne me trompe pas. Pascal propose une autre solution: la veille est plus cohérente que le rêve. Mais j'ai jamais très bien compris à quoi ça nous avançait, puisque l'hypothèse du rêve est qu'on rêve tout le temps. Husserl a une idée proche de Pascal, à savoir qu'on a de l'intersubjectivité dans la veille et pas dans le rêve (mais même problème bordel). Ensuite la philo analytique s'est emparée du truc et en a fait des choses comme ça: https://en.wikipedia.org/wiki/Brain_in_a_vat https://plato.stanford.edu/entries/skepticism-content-externalism/ La solution de Putnam (sémantique, I know what a surprise) est d'une élégance inégalée mais elle présuppose aussi une intersubjectivité et je ne vois pas pourquoi on pourrait pas rêver ça ni en quoi ça empêche que je sois en fait en train de rêver depuis 2020 seulement (ça expliquerait bien des choses). Contre l'argument de Wright enfin j'ai envie d'objecter qu'une dichotomie entre mon langage et le BIVese (langage des Brains In a Vat, BIVs) présuppose elle aussi qu'il soit possible de distinguer la veille du sommeil, donc ce qu'on est censé trouver. De même pour les raisonnements cartésiens a priori au parfum de preuve ontologique à partir du fait que nous avons le concept de BIV. Le raisonnement que je préfère et qui n'est pas mentionné dans l'article linké de la SEP, c'est celui de mon cher Nozick dans cette mine bordélique que sont ses Philosophical Explanations (j'ai relu le début en novembre et pouf j'y ai trouvé la source d'un mini-mémoire! littéralement une mine). Il explique que to know is to have a belief that tracks the truth, et que la "connaissance" que je suis un CDUC, dans la mesure où elle est causée par la simulation, n'est pas truth-tracking: par exactement le même mécanisme, moyennant les contrefactuels appropriés, je pourrais être mené à croire que je suis Elton John. Donc même si je ne peux pas savoir si je suis ou non un CDUC, ça n'empêche pas d'autres connaissances dans le monde d'être truth-tracking et donc d'être possibles (par exemple que j'ai des cheveux bruns ou que j'ai deux mains, pour prendre l'exemple célèbre de Moore de "preuve du monde extérieur"; par contre je précise que je n'ai pas lu Moore, seulement ce qu'en dit Wittgenstein dans On Certainty, mais je vais réparer cette lacune bien vite; et si ça t'intéresse, il y a un énorme article de Kripke sur la conception truth-tracking de la connaissance dans Philosophical Troubles (aussi à lire en ce qui me concerne, je reviendrai peut-être poster quand je l'aurai fait)). Mais ça ne nous donne pas de critère pour savoir si, là maintenant, je rêve ou pas. Je trouve que ce site donne un résumé à la fois exact et concis de l'argument: https://iep.utm.edu/nozick/#H3 La conclusion, à savoir que knowledge is not closed under logical implication, est vraiment importante, mais bref on voit bien que ça ne nous protège pas entièrement contre le sceptique. C'est d'ailleurs ici que je voudrais ajouter un point intéressant à quoi je réfléchis depuis quelques jours (et qui ne vient pas d'une lecture en particulier): quand je vois quelque chose de fake, est-ce que je vois quelque chose d'autre qui me fait déduire que c'est fake (par exemple une image de synthèse que je devine parce que, disons, les personnages n'ont pas d'ombre: donc c'est en voyant une absence d'ombre que je vois pour ainsi dire "transitivement" le fake) ou est-ce que je vois quelque chose comme une intrinsic fakeness comparable à une couleur ou autre propriété observable de l'objet? De même avec la réalité: avant de chercher une solution de type mooréenne (proof of the external world putain j'adore ce titre), il faudrait s'accorder sur ce qu'on cherche: est-ce qu'on cherche à se mettre dans les circonstances d'une sorte d'expérience cruciale qui va nous permettre, en faisant varier un paramètre, à l'exemple des ombres dans les images de synthèse (j'ai dit ça au pif mais la toupie de Inception est un autre exemple de ça), de décider par déduction de la réalité ou de la fakeness de ce qu'on vit, donc de l'expérience (une expérience dans l'expérience qui qualifie la big expérience: ça commence à ressembler à Hegel et Lacan sur l'émergence de la conscience), ou est-ce qu'on cherche plutôt une caractéristique de la big expérience directement. Ça ressemble un peu à un autre vieux problème de métaphysique qui est: est-ce que je vois des particuliers ou est-ce que je vois des universaux, au sens où si je vois des universaux, alors l'expérience du rêve est indissociable de la réalité, parce qu'autant on peut me dire: mais tu ne peux pas voir ta vraie mère dans ton rêve, autant je peux voir la forme de ma mère (sa definite description dirait Russell) dans ce qu'elle a d'universel (qui pourrait être, si on était dans la réalité, une femme indiscernable d'elle, si on veut bien m'accorder que l'indiscernabilité n'est pas l'identité (ce qui est bien le cas, puisque l'indiscernabilité n'est pas transitive alors que l'identité, si)). Et en même temps ça se renverse, càd: quand quelque chose est réel, à quoi est-ce que ça se voit? Peut-être une façon de rendre la dichotomie que je propose plus compréhensible est la suivante: donc on va partir du principe que certains effets spéciaux mal faits se voient parce que les acteurs n'ont pas d'ombre. So what? On n'a qu'à ajouter de fausses ombres. Est-ce que par ce genre de processus (en ajoutant des faux trucs là où manquent certaines features de la réalité) on va pouvoir créer une illusion de réalité, ou est-ce que les faux trucs ont une intrinsic fakeness qu'ils portent sur leur tête? Et maintenant une question de psychologie empirique: est-ce que c'est la même perception ou le même état neurologique d'être choqué par l'absence de quelque chose qui devrait être là (j'ai envie de parler de la peur de la castration mais tenons-nous en aux ombres des effets spéciaux tels que je les imagine ou l'absence de reflet des vampires) et d'être choqué par quelque chose d'intrinsèquement surnaturellement flippant, sans déduction? Voilà ce que je voulais dire par 'hypothèse du rêve'
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Sérieusement Sa tête devrait faire la couverture de la prochaine réédition de poche de Houellebecq. Quand je la vois mon cerveau me murmure: "Les doutes qui avaient pu occasionnellement, au cours de ma vie abstraite et solitaire, m'assaillir avaient à présent disparu: je savais que j'avais affaire à des êtres néfastes, malheureux et cruels; ce n'est pas au milieu d'eux que je trouverais l'amour, ou sa possibilité, ni aucun des idéaux qui avaient pu alimenter les rêveries de nos prédécesseurs humains; ils n'étaient que le résidu caricatural des pires tendances de l'humanité ordinaire, celle que connaissait déjà Daniel1, celle dont il avait souhaité, planifié et dans une large mesure accompli la perte."
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Guerre civile culture, IDW, SJW & co
Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
En vrai je vis de l'autre côté (côté Mouffetard) donc je vais assez rarement côté Luxembourg (Saint Jacques, Soufflot etc). Sauf quand je prends mon petit dej au Comptoir du Panthéon. -
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Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Ah mais rue saint Jacques c’est chez moi. J’avais pas percuté. Merci du coup -
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Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Oui j’aurais du trouver un meilleur exemple de truc dont le fait que je ne l’ai jamais fait ne prouve pas mon mépris ou mon manque d’envie de le faire Je n’ai jamais couché avec Scarlett Johansson -
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Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Well je ne vais pas répondre à cela, je pense que tu vas te faire fusiller sur place Mais je n'ai jamais lu d'autres romans graphiques (Frank Miller, Alan Moore). Pas par mépris. Juste comme j'ai jamais été en Russie, n'ai jamais lu Trollope ou mangé du requin. -
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Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Oui dans ce cas parce que c'est plus proche d'un roman graphique. Sinon je lisais déjà Tintin, Astérix et Obélix, Achille Talon, Spirou et Fantasio et mon cher Alix. -
Je lis trop de marxistes en ce moment ça doit être ça mais j'ai quand même envie de dire que dans la catégorie des combats politiques, ce genre de découverte de la Lune est bien un truc de bourges. Ensuite son argumentaire est digne d'un ado: elle croit qu'on ne fait jamais de choix sans avoir toute l'information, alors qu'on fait exactement ça tout le temps. Et j'ajouterais qu'on ne peut pas avoir toute l'information, et que c'est pour ça qu'on fait des choix. Mais maintenant je pense à Bergson, qui écrit qu'on ne choisit jamais deux options qu'un moi unique va ou non embrasser: on choisit la personne qu'on va être, et qu'on peut pas être avant d'avoir fait ces choix. Bergson va même plus loin dans son analyse de la délibération: pendant que je pondère entre deux options, je passe par une série d'états qui me rapprochent tantôt de l'une, tantôt de l'autre option, jusqu'à ce que ces hésitations m'aient suffisamment transformé pour que je sois déjà devenu la personne qui va faire X ou Y ("jusqu'à ce que l'action libre s'en détache à la manière d'un fruit trop mûr"). Mais elle est trop fan de sa petite personne pour faire un tel choix apparemment, càd pour changer. 150 ans d'existentialisme pour en arriver à ça. Ce n'est pas le moindre des paradoxes qu'on vive dans une société aussi obsédée par la question du consentement quand il s'agit des femmes et du sexe, pour ensuite piétiner cette notion fourre-tout quand il s'agit des vaccins. D'un côté, dans une soirée, on vous explique que "peut-être", un silence, etc. ça veut dire "non", on monte des séries sur Netflix où les personnages se demandent toutes les deux secondes "is that ok with you if I...", et de l'autre, on explique que si vous avez voté pour un mec un jour il y a cinq ans, vous avez consenti à tout ce qu'il va faire pendant les 1825 jours suivants. Je n'avais pas encore vraiment réfléchi au rapport entre les deux, pourtant à mon avis très révélateur, mais madame me le donne sur un plateau: dans les deux cas, il repose sur l'illusion qu'on peut avoir toute l'information pour faire un choix et qu'on doit l'avoir avant. Un gauchiste intelligent dirait que c'est le modèle de l'homo economicus étendu à la vie entière, mais les lecteurs de Hayek, Coase et Schumpeter sur l'art de l'entrepreneur savent que c'est le contraire. L'idéal serait qu'on naisse avec un fichier contenant toute notre vie à l'avance (l'haecceité de Leibniz), qu'on puisse savoir quels choix faire, mais comme ça n'a aucun sens, qu'on puisse en fait se libérer de la "charge mentale" de faire des choix. Il y a de l'"information" out there, mais jamais elle ne s'imagine que la seule manière (parfois) d'acquérir de "l'information", c'est de faire une expérience. Le résultat est toujours difficile à prédire, mais même s'il est prédictible (you are not a beautiful and unique snowflake), est-ce que ça veut dire que nous sommes moins libres pour autant? Je ne pense pas.
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Vilfredo a répondu à un sujet de 0100011 dans Politique, droit et questions de société
Sinon Maus c'est incroyable. Je crois que c'est mon premier vrai souvenir de lecture marquant. -
Bound to suffer, But she let them take their time to choose: she let Rose, particularly, take up this and then that, and hold her jewels against the black dress, for this little ceremony of choosing jewels, which was gone through every night, was what Rose liked best, she knew. She had some hidden reason of her own for attaching great importance to this choosing what her mother was to wear. What was the reason, Mrs. Ramsay wondered, standing still to let her clasp the necklace she had chosen, divining, through her own past, some deep, some buried, some quite speechless feeling that one had for one's mother at Rose's age. Like all feelings felt for oneself, Mrs. Ramsay thought, it made one sad. It was so inadequate, what one could give in return; and what Rose felt was quite out of proportion to anything she actually was. And Rose would grow up; and Rose would suffer, she supposed, with these deep feelings, and she said she was ready now, and they would go down, and Jasper, because he was the gentleman, should give her his arm, and Rose, as she was the lady, should carry her handkerchief (she gave her the handkerchief), and what else? oh, yes, it might be cold: a shawl. Choose me a shawl, she said, for that would please Rose, who was bound to suffer so. "There," she said, stopping by the window on the landing, "there they are again." Joseph had settled on another tree- top. "Don't you think they mind," she said to Jasper, "having their wings broken?" Why did he want to shoot poor old Joseph and Mary? He shuffled a little on the stairs, and felt rebuked, but not seriously, for she did not understand the fun of shooting birds; and they did not feel; and being his mother she lived away in another division of the world, but he rather liked her stories about Mary and Joseph. She made him laugh. But how did she know that those were Mary and Joseph? Did she think the same birds came to the same trees every night? he asked. But here, suddenly, like all grown-up people, she ceased to pay him the least attention. She was listening to a clatter in the hall. (To the Lighthouse)
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La ferme des animaux : l’Âne pour 2022 (Hidalgo)
Vilfredo a répondu à un sujet de Tramp dans Politique, droit et questions de société
Les études de philo sont remplies de gens qui ont bizarrement honte d'en faire. Donc ça m'étonne pas son idée. -
Mais d’ailleurs j’ai même pas parlé de morale. J’ai dit que la tradition du scepticisme libéral (en gros Hayek Jasay les lecteurs de Wittgenstein comme Gray, Oakeshott, sa source Hume) inversait les valeurs (éviter le malheur plutôt que garantir le bonheur, et encore éviter seulement un certain type de malheur) et tu me réponds: ah on peut pas parler de malheur et de bonheur sans poser de morale. Mais quel rapport. D’où le scepticisme dont je parle, une approche qui rejette les définitions les essences et les critères c’est à dire une certaine méthode philosophique serait incompatible avec un discours moral. Parce que Hume n’est pas un penseur moral peut-être? J’ai vraiment l’impression de discuter avec une machine programmée pour sortir certains mots quand on lui en envoie d’autres.
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Mais laissons tomber Lacan et tout, j'ai une question qui va nous ramener sur le terrain sérieux de l'épistémologie: comment par exemple ta conception de l'intersubjectivité (pragmatique) vainc-t-elle l'hypothèse sceptique du rêve?
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Dans la phrase citée ("le réel c'est quand on se cogne"), ce n'est pas de la réalité externe qu'il s'agit mais du Réel, càd ce qui n'est pas inclus dans l'univers symbolique. L'analysant vit dans l'univers symbolique (dans le langage). Je ne vois simplement pas à quel moment "la réalité" (externe) intervient in the picture. Il y a le langage (symbolique), il y a l'imaginaire, il y a le réel, mais il n'y a pas la réalité externe. La psychanalyse n'a pas vraiment de théorie de la perception mais l'idée que ce que je vois est avant tout un arrangement symbolique peut rendre compte de certaines erreurs de perception (comme certaines perceptions peuvent provoquer des lapsus). Pour prendre un exemple qui n'est pas tiré de la psychanalyse, je n'évolue pas dans un monde d'objets mais dans des relations entre ces objets qui, à un certain niveau, me sont propres (même si elles répondent à des structures intemporelles de la psyché). Par exemple, quand j'entre dans une salle de classe, je ne perçois pas la même chose, je ne positionne pas mon corps de la même manière, je n'ai pas la même attitude que quand un prof entre dans la salle de classe: il ne regarde pas au même endroit, il n'a pas en tête les mêmes relations entre objets que moi. On peut considérer que nous sommes dans deux "mondes". Il en serait de même si j'allais chasser avec un chasseur expérimenté ou même si j'allais à l'opéra avec un spécialiste. Oui bien sûr mais je parlais de la conception freudienne de la pulsion de mort comme une tension vers le Nirvana. Ça, ça ressemble à la négation du vouloir-vivre.
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Mon argument n'est pas exactement que la réalité externe n'existe pas (ce serait un peu ridicule), mais plutôt que ce n'est pas contre elle qu'on se "cogne" et qu'il est peut-être possible de défendre une conception de l'intersubjectivité qui en fasse l'économie. En outre, la raison pour laquelle je citais ce texte est la fin, lorsqu'il fait un rapprochement avec l'idéalisme allemand: "what we call external reality constitutes itself by means of an act of rejection". Bien loin d'être une motivation à explorer ce qui est rejeté, si on s'accorde que ce qui "motive" est le principe de plaisir, il y a là une forte motivation à construire l'univers symbolique autour du Réel ou malgré lui. Si on me permet une analogie avec la physique, l'idée que la matière courbe l'espace et même que la matière n'est que la courbure de l'espace, et qu'on fait une analogie (freudienne) entre matière et désir, on peut voir le désir comme ce qui "courbe" la perception, notamment de l'être aimé, et cette inflexion de la perception, dans laquelle je vois dans l'autre "plus que ce qu'il est", c'est l'objet petit a. Mais on voit bien ici que la courbure, càd l'objet, n'est pas un élément de la réalité externe. En effet, l'objet petit a n'est pas une propriété de l'être aimé, elle n'est pas "cachée" en lui (Lacan illustre ça en se référant au Banquet, quand Alcibiade compare Socrate à un silène, ces sculptures grecques laides de l'extérieur mais belles à l'intérieur). Ce qui n'est qu'un objet ordinaire pour toi devient pour moi le focus de mon investissement libidinal causé par un objet qui est moins une propriété objective qu'une feature de ma perception. On pourra me dire que c'est du romantisme (pourtant il y a pas moins romantique que Lacan) et que c'est simplement une perception bien particulière mais dans cette perception je pense qu'on se rend compte que nous vivons et voyons avant tout un univers symbolique d'où le Réel (au sens lacanien) est forclos (rejeté). Ce sont deux intuitions majeures de la psychanalyse (freudienne): 1) qu'il n'y a rien de naturel dans la sexualité humaine: elle est artificielle, médiée par des symboles: on doit apprendre à désirer (Lacan radicalise ce point, énoncé dès le début des Trois essais sur la théorie sexuelle, en disant qu'il n'y a de jouissance que dans le signifiant! mais après tout, on voit bien ce que ça veut dire) 2) qu'on a besoin de fictions ou de symboles pour survivre à la réalité (d'où les rêves). Si les rêves sont pour ceux qui n'arrivent pas à survivre à la réalité, la réalité est peut-être aussi la drogue de ceux qui ont peur de leurs rêves. Ces fictions n'existent pas matériellement mais on ne peut décrire le comportement humain sans y faire référence, même si on n'en perçoit que les effets. Sur la pulsion de mort, parce que tu ne sembles pas ravi de l'approche de Zizek: j'ai l'impression qu'elle est souvent présentée comme une tension vers l'immobilité, le repos total, comme une ascèse (c'est comme ça que la présente Freud dans Au-delà du principe de plaisir (toi qui parles de Nietzsche, voilà un titre bien nietzschéen: Jenseits!)), mais dans l'interprétation lacanienne, c'est le contraire: la pulsion de mort c'est plutôt ce qui ne meurt jamais, c'est plutôt le Terminator à la fin du premier film ou Don Juan: cette machine qui continue à avancer/baiser. Ça ressemble aussi un peu à ce que Kierkegaard entend par désespoir (le désir de se consumer entièrement qui se heurte à l'impossibilité de venir à bout du moi). Pour toutes les accusations qu'on a balancées à la tête de Freud de ne pas réviser ses théories devant de nouveaux faits, il suffit de voir comment la première topique est bouleversée quand il reçoit des vétérans de la WWI: avec la pulsion de mort, Freud établit que le principe de plaisir n'est pas le maître de l'inconscient à peu près autant que le moi n'était pas le maître de la conscience (il fallait ajouter le ça et le surmoi). Quand il entend des témoignages de patients qui revivent en rêve les tranchées, il est obligé de réviser la théorie que les rêves sont la réalisation de désirs inavoués ou inassouvis. La pulsion est immortelle, mais la "mort" veut dire, ici, le langage (ou l'ordre symbolique): les mots traitent les choses comme mortes, le langage découpe le monde, je peux re-présenter ce qui est absent etc. En un sens, c'est très curieux. Je pourrais ressortir la citation de Huxley sur l'art comme quelque chose d'inhumain (on pourrait dire moins emphatiquement comme quelque chose de mort) ou un passage de Barthes dans les Fragments d'un discours amoureux (ce grand livre névrotique), où il écrit que la focalisation sur les points de détail du corps de son amant quand il le regarde (les ongles, les dents... oui Barthes a des drôles de kinks) lui donnent l'impression de scruter un cadavre, précisément parce que cette attention poétique (on pense, connaissant Barthes, aux blasons de la poésie baroque) "abstrait" du corps certaines parties pour les hypostasier: la jouissance est bien dans le signifiant. Donc si la mort est ici à comprendre dans le sens de l'ordre symbolique (ou l'effet de l'ordre symbolique: on peut considérer ici ce que Lacan entend par "acte": ce qui change mon identité dans l'univers symbolique; je pourrais donner un exemple si ça aide), la pulsion de mort est ce qui figure ce déchirement entre, d'une part, l'univers symbolique "mort" et fixe, et la portion forclose de la vie, la vie qui subsiste hors de l'univers symbolique, dans le Réel, et qui fait irruption de façon traumatique: cette portion qui n'a pas été réduite en mots, ce sur quoi l'analyse va tenter de mettre des mots (justement) sans annihiler la capacité du sujet à fantasmer. Rien de tel, pour faire ça, que d'actualiser de force les fantasmes de quelqu'un. C'est une sorte de viol symbolique. Je pense aussi que ce qui est traumatique est, pour le sujet, de se rendre compte que son inconscient le fait souffrir à ce point, alors qu'il s'attendrait à "s'y sentir chez lui". Et on aura compris qu'il ne s'agit pas du simple désagrément des cauchemars, aussi pénibles soient-ils, car les cauchemars, eux, ne sont pas réels: autrement dit, on a la réalité (le réveil) pour nous rassurer. Rien de tel avec la pulsion de mort: Jonathan Lear parle de ce patient vétéran du Vietnam qui grimpait aux arbres en pleine journée dans des crises de folie où il se croyait à nouveau au Vietnam. C'est en lisant des cas de ce genre que je me suis dit qu'il y avait un problème avec la conception "schopenhauerienne" de la pulsion de mort (comme négation du vouloir-vivre). Le point important, c'est que la pulsion de mort soit tout sauf une incitation à explorer le Réel. La pulsion de mort est bien plutôt, en tant que, pour Lacan, elle ressort du Symbolique, la tendance du symbolique à se répéter. La répétition, pour Lacan, est toujours la répétition de certain signifiants, et en cela, elle peut permettre le transfert (l'analysé reproduit/répète avec l'analyste certains patterns, si on veut, qu'il a vécu typiquement avec son père, pour prendre un exemple caricatural). Cela mène Lacan à ne pas isoler la pulsion de mort (et à l'opposer au principe de plaisir, comme Freud) mais à en faire une caractéristique de toutes les pulsions, ne serait-ce que parce que toute pulsion a ce caractère "immortel" et tend vers la "jouissance", qui est un plaisir infini, et donc impossible. Ce que Zizek appelle "the pleasure in pain". Je crois que c'est ça, fondamentalement, la pulsion de mort. Lacan n'a fait que voir là-dedans ce que cette pulsion avait de représentatif de toutes les pulsions. On s'y habitue Moi j'aime bien!
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Autre chose: c'est inhérent à une certaine pratique idéologique du libéralisme de chercher des principes, des critères et des règles explicites. C'est le propre du libéralisme jusnaturaliste lockéen et de ses avatars libertariens, qui est une sorte de libéralisme de combat. Ce n'est pas tout le libéralisme. Il y a aussi une tradition libérale sceptique (que tu ne lis pas, je sais) qui refuse cette approche par concepts, définitions, critères et démonstrations, bref, l'approche dogmatique, car elle assigne à la raison un autre usage dans la société politique. Je suis tenté de voir dans cette conception de l'Etat une figure du katechon de la théologie paulinienne, la figure rétentrice de la fin du monde, celle qui empêche l'immanentisation de l'eschaton, mais vous en faites ce que vous voulez. En tout cas, avec ou sans référence théologique, on évite aux hommes le malheur, mais on ne fait pas leur bonheur. On notera que c'est pas non plus comme si c'était ce que Locke prétendait proposer. Strauss, puisque tu le cites, est assez clair sur ce point.
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Oui c'est plutôt juste. On est aussi l'esclave de la loi. So? C'est très simple. On sait ce qu'est une menace de mort. Interdire les menaces de mort, c'est possible. Avant, ça se réglait sur le terrain, maintenant ça peut se régler devant les tribunaux. On considère que c'est une fonction de l'Etat de préserver la sûreté des biens et des personnes parce qu'il est le seul à pouvoir (et à devoir, en raison de son impartialité) le faire. C'est la position libérale classique, critiquée par les libertariens. Au demeurant, on "rend" illégale en droit une pratique qui est socialement toujours sanctionnée en fait. Je ne connais pas de coin sur la Terre où tu peux menacer de mort qui tu veux sans prendre de risque. L'Etat prend un rôle de médiateur dans l'affaire, par le recours aux tribunaux, pour éviter la violence interindividuelle. On peut penser au schéma hégélien droit --> morale --> Etat qui fait de l'Etat la rationalité advenue et l'achèvement de la morale. Par contre, on ne sait pas ce que c'est, "redistribuer" les richesses. Il n'y a jamais eu de distribution des richesses, il ne saurait donc y avoir de redistribution. On ne le fait pas parce que c'est pas possible, pas plus qu'un monde sans pauvres n'est possible. Et par pitié pour les insensibles, évitons le sentimentalisme obscène sur les vendeurs d'organes et la prostitution des enfants.
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Présidentielles 2022
Vilfredo a répondu à un sujet de RaHaN dans Politique, droit et questions de société
Ah ça c'est une bonne idée de prénom qu'elle est bonne! https://fr.wikipedia.org/wiki/Commode_(empereur) -
Présidentielles 2022
Vilfredo a répondu à un sujet de RaHaN dans Politique, droit et questions de société
En termes de moeurs sévères, on a fait mieux que Hadrien.