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Un monde d'azur


Jesrad

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Je suis à peu près sûr que personne ici n'a recommandé de bouquins de Jack Vance, et c'est bien dommage.

Le Monde d'azur (The blue world) est une petite prouesse du genre: comment, en une histoire assez courte (une grosse centaine de pages) et mouvementée, proposer une allégorie de l'humanité et ses travers collectivistes comme conservateurs, dénoncer la violence de l'état comme source d'autorité en l'incarnant littéralement dans un "léviathan" monstrueux, faire l'apologie de l'individualisme et de la recherche de sa propre amélioration comme moteur d'innovation et de prospérité pour tous, ainsi que de la destruction raisonnée mais violente de la figure d'autorité absolue.

Le tout sans jamais utiliser de terme politique, sans la moindre allusion même indirecte à quelque personnage ou mouvement ayant existé, uniquement en mettant en scène des hommes loins de tout, sans le moindre lien avec notre monde, notre culture ou notre histoire, et leur façon de se confronter à un monde radicalement différent. Il a été réédité récemment dans une nouvelle traduction (que je n'ai pas encore lue).

Plutôt que d'essayer de faire lire un indigeste Ayn Rand à des proto-socialistes, proposez leur de lire un court texte dépaysant, mi-conte philosophique, mi-roman d'aventure.

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« Un monde d’azur » n’est pas le roman le plus connu de Jack Vance mais c’est sans doute un des meilleurs. Le monde décrit est d’abord un univers liquide. Il n’y a pas de terre ferme sur cette planète dont jusqu’au bout nous ignorerons le nom. Les humains vivent sur les excroissances de plantes fixées au fond de l’océan, excroissances qui flottent à la surface de l’eau et forment des sortes d’îles. Les hommes ont appris à utiliser ces plantes ainsi que les animaux ou les éponges qu’ils peuvent pêcher. Ils sont organisés en castes qui portent le nom d’une des catégories de forçats de leurs ancêtres. Les Filous sont les pécheurs, les Déprédateurs sont les teinturiers, les Contrebandiers préparent les vernis, les Voleurs construisent les tours qui servent aux communications entre les différentes îles habitées et les Bourreur de Crânes utilisent pour cela des sortes de sémaphores (1). Il y en a encore d’autres mais à l’époque où se situe l’action de ce roman, les distinctions de castes commencent à perdre de l’importance.

Chaque île a son Arbitre qui règle les conflits et son Médiateur qui intercède auprès du Roi Kragen pour le compte des habitants.

Le Roi Kragen justement. « Kraken » est un mot d’origine norvégienne qui désigne un monstre marin. Dans le roman de Jack Vance, le Roi Kragen est une sorte de mélange de gros poisson et de crustacé. Il fait preuve d’une certaine intelligence et son rôle est censément de chasser les kragens plus petits des parages des îles habitées en échange de quoi il est nourri. Cela fait cent cinquante ans que cela dure et qu’il razzie régulièrement les plantations d’éponges et il est vraiment devenu très gros. Les médiateurs tentent de développer une sorte de culte autour du Kragen car après tout grâce à lui, eux aussi sont nourris à ne rien faire. La crise éclatera quand certains habitants lassés des déprédations causées par les kragens décideront d’essayer de le tuer…

Le roman repose donc sur une double trame : les tentatives de certains hommes pour tuer le Kragen et redevenir libres d’une part, les manoeuvres des Médiateurs pour empêcher cela et pour renforcer leur pouvoir de coercition sur la population d’autre part. On les verra par exemple lancer le Kragen contre leurs ennemis ou former une milice armée pour combattre et exterminer les dissidents.

Comment ne pas voir dans ce Roi Kragen une métaphore de l’Etat (2) ? Les Médiateurs sont des « proto-hommes de l’Etat » vivant sur le dos de la population, prêts à utiliser la violence pour garder leurs privilèges et commençant à augmenter leur nombre sans contrôle en échange de « services » rendus à la population pour le moins contestables. Ils bafouent les règles traditionnelles de cette société où les décisions sont prises lors d’assemblées où tous peuvent s’exprimer et prennent le pouvoir à la faveur d’un véritable coup d’Etat.

Dans tous ses romans, Jack Vance défend la liberté et ses héros combattent bien souvent des tyrans. Si vous n’avez jamais lu un de ses textes, le roman « Un monde d’azur » est une excellente introduction à une oeuvre riche et chatoyante qui allie le meilleur de la Science Fiction et de l’Heroïc Fantasy.

Sylvain

(1) : Cette répartition des rôles serait à comparer avec ce que Philip K. Dick propose dans son roman « Les clans de la lune alphane ». Les Pares, les Manses ou les Heebs sont des clans formés par les descendants de malades mentaux. La principale différence entre les approches de Vance et de Dick est que chez ce dernier, les personnages décrits ont conservé les caractéristiques de leurs ancêtres…

(2) : Ce Roi Kragen est peut-être apparenté au "Léviathan" ?

http://urgesatsf.blogspot.com/2004/04/jack…r-editions.html

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C'est en lisant Jack Vance etant adolescent que j'ai abandonne l'heritage collectiviste/socialiste de ma famille. Beaucoup de ses livres montre un monde colore, avec beaucoup de diversite, d'opportunitees et de liberte, et ils m'ont beaucoup influence dans mes choix de vie. Mon nickname "Jubal" vient d'ailleurs d'un des roman de Vance, mais je me rappel plus du tout quel type de personnage c'etait.

A mon avis c'est pas forcement ses romans les plus connus les mieux, il a fait de nombreuses nouvelles tres bien dont par exemple "Les oeuvres de Dodkin":

Les oeuvres de Dodkin narrent quant à elles l’ascension de Luke Grogatch au sein d’une société hyper réglementée, dirigée par une administration ahurissante permettant dans le principe de faire le bonheur de tous les citoyens, en fonction de leurs mérites. Luke est un homme têtu, trop indépendant pour vraiment suivre les règles du jeu. Descendu au bas de l’échelle, il explose quand une directive quelconque lui impose de ramener sa pelle chaque soir et de la reprendre le matin dans un entrepôt sis à plus d’une heure de son lieu de travail. Cette fois, c’en est trop ! Et il commence à remonter les travées des donneurs d’ordres : il veut dire droit dans les yeux ce qu’il a sur le coeur à celui qui a réellement pris cette décision. Mais son chemin ne le conduira pas forcément là où il le pense…
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[…] Mon nickname "Jubal" vient d'ailleurs d'un des roman de Vance, mais je me rappel plus du tout quel type de personnage c'etait. […]

Ce n'était pas plutôt un roman de Robert Heinlein (En terre étrangère, ou Stranger in a Strange Land, pour ne pas le nommer ?)

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Ce n'était pas plutôt un roman de Robert Heinlein (En terre étrangère, ou Stranger in a Strange Land, pour ne pas le nommer ?)

Oui il y a un Jubal aussi dans "stanger in a strange land", mais c'est a celui de vance "Jubal Droad" que je pensais. Pas vraiment un personnage special, juste le premier nom qui m'est venu a l'esprit

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Acheté tout à l'heure au rayon librairie de mon hypermarché préféré ! :icon_up:

Oui il y a un Jubal aussi dans "stanger in a strange land", mais c'est a celui de vance "Jubal Droad" que je pensais. Pas vraiment un personnage special, juste le premier nom qui m'est venu a l'esprit

Alors toutes mes excuses, et une question : qui de Vance ou de Heinlein a plagié l'autre ? :doigt:

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