Johnathan R. Razorback

Comme je le disais, l'ostracisme interne des milieux gauchistes est tellement fort (et traditionnel, c'est une conséquence d'un rapport messianique et manichéen au politique, les infidèles doivent être purgés car ils brisent la communion collective) que les rares qui vont oser transgresser les tabous du groupe (comme voter FN), vont pour la plupart le faire en cachette, ou alors (et là ça devient comique) se sentir obligé de trouver des justifications acceptables pour leurs compères.

Je fais les rapprochements de mémoire mais oui, j'ai bien sûr un coin pour stocker tout ça, et une fonction recherche pour fouiller dedans: http://hydra.forumactif.org/search?mode=searchbox&search_keywords=stiegler&show_results=topics

"Lorsque une société souffre d'une façon qu'elle ne parvient ni à expliquer ni à soigner, elle se tourne vers un bouc émissaire qu'elle se met à persécuter." -Bernard Stiegler, Pharmacologie du Front national, suivi du Vocabulaire d'Ars Industrialis, de Victor Petit, Flammarion, coll. Bibliothèque des savoirs, 2013.

C'est une phrase de père prévenant inquiet pour le fils prodigue. Et faut pas passer sur les passages où sa sympathie pour Macron s'exprime clairement.

Oh. my. god.

WTF ? Tu as une source ?

Chaque fois qu'un nouveau commentateur politique, à propos des résultats d'hier, s'extasie sur "le bouleversement des clivages politiques", j'ai une pensée pour tous ceux qui l'avaient vu venir (et on aurait pu comprendre le processus depuis au moins 2005): "La création d'une monnaie commune, projet contraire aux intérêts nationaux témoigne, dans les deux pays [France & Allemagne], d'une divergence grandissante entre dirigeants et électeurs. [Elle] répond aux intérêt des premiers. [...] La difficulté en réalité consistera à abandonner un projet qui va dans le sens des idées et des intérêts de la classe politico-administrative. [...] Pourtant la solution du marasme européen existe. Elle est connue et son efficacité n'est pas douteuse. Elle est à portée de main et peut être rapidement mise en œuvre. Mais nos responsable politiques ne veulent pas en entendre parler. Prisonniers de conceptions fausses et d'objectifs chimériques, comme dans les années 30, ils ne céderont vraisemblablement qu'en dernière extrémité, devant la ruine de l'économie et la révolte démocratique de masse. [...] Renoncer à la monnaie et à l'Etat unique constituerait en somme une révolution démocratique dans notre monarchie républicaine. Il n'est que temps de s'y préparer en attendant l'échec de l'euro, qui va à coup sûr bouleverser profondément les équilibres politiques traditionnels." -Jean-Jacques Rosa, L'erreur européenne (1998). "Je pense que la carrière de Philippe Séguin (comme celle de Jean-Pierre Chevènement) a mis en évidence que le clivage "droite-gauche" est aujourd'hui bien moins signifiant en termes politiques que le clivage jacobins-girondins." -Le Bloggeur "Descartes", Les grands hommes meurent aussi: hommage à Philippe Séguin, 14/01/2010 (cf: http://descartes.over-blog.fr/article-les-grands-hommes-meurent-aussi-hommage-42861875.html ). (je fais exprès de citer un libéral et un stalinien marxiste ensemble pour qu'on comprenne bien l'obsolescence relative du clivage droite-gauche. Qu'ont déjà un peu saisis ceux qui disent, même si ça m'espère d'imprécision, que le programme du FN est largement "de gauche").

Wow, l'argumentaire de m**** du PS. Faut pas voter FN car ce parti organisera la "traque des faux français" et emprisonnera les journalistes. Ils comprennent que le coup du "le fascisme est à nos portes !" est complètement éculé et déphasé de la réalité ? Entre ça et les sympathisants d'EM incapables de nommer une seule mesure de son programme, la gorafisation du réel fait de grands bonds en avant...

De bons scores en social-démocratisant leur ligne. Au départ Macron c'était "le libéralisme est une valeur de la gauche", et Fillon, un défenseur de Maggie. Et puis finalement, non.

Gros +10. Mais j'ai comme un doute.

C'est clair que depuis le résultat, les nationalistes et les socialistes écument de rage contre Macron. Piètre consolation, qui donne plutôt une impression de montée aux extrêmes des clivages politiques. http://rebellion-sre.fr/macron-divine-surprise/

C'est un fake, n'est-ce pas ? Dites-moi que c'est un fake des soraliens.

Macron n'était pas une bulle mais ça reste de l'emballage sous vide. On peut être attiré par le vide, mais gare à la chute.

Encore de l'entrisme trotskyste qui s'est infiltré ?

Il est mauvais car encore plus hargneux et sans pensée structurée que Mélenchon (ce qui va déjà assez loin dans le nawak) ; malheureusement, c'est celui qui a le plus de chance de reprendre la main haute sur le PG quand Mélenchon se retirera (et je le vois pas faire une nouvelle présidentielle à 70 ans)...

Vieux résidu du marxisme: « [Les communistes] ont sur le reste du prolétariat l’avantage d’une intelligence nette des conditions, de la marche et des fins générales du mouvement prolétarien. » -Le Manifeste Communiste, 1848. « Ce n'est pas un des moindres paradoxes que l'ouvrier généralement hypostasié dans le discours de l'ultra-gauche est en réalité très souvent considéré comme un irresponsable, grâce à la théorie commode de l'aliénation. Curieux mélange de compassion et de condescendance : On excuse tout (pardonnez leur, ils ne savent pas ce qu'ils font, ils sont aliénés), ce qui revient à le créditer d'une totale inconscience, on lui prête aussi toutes les vertus par ailleurs, mais on ne s'abaisse pas à prendre au sérieux ses interrogations et ses préoccupations. Eventuellement, on s'emploiera à le remettre dans le droit chemin à l'aide de quelques arguments d'autorité. En fin de compte il y a chez le théoricien d'ultra-gauche une identification aux prêtres ou aux shamans, puisqu'ils sont intercesseurs avec la vérité et avec l'absolu. On a la une autre clé de la méfiance populaire vis-à-vis du révolutionnaire. » -François Lonchampt, Réponse à « La nature humaine n'est pas un obstacle au communisme : réponse à François » de Adam (2003). Castoriadis a d'ailleurs remarqué que cette prétention à l'omniscience favorisait la dérive totalitaire: « S’il y a une théorie vraie de l’histoire, s’il y a une rationalité à l’œuvre dans les choses, il est clair que la direction du développement doit être confiée aux spécialistes de cette théorie, aux techniciens de cette rationalité. Le pouvoir absolu du Parti –et, dans le Parti, des « coryphées de la science marxiste-léniniste », selon l’admirable expression forgé par Staline à son propre usage – a un statut philosophique ; il est fondé en raison dans la « conception matérialiste de l’histoire » beaucoup plus véritablement que dans les idées de Kautsky, reprises par Lénine, sur « l’introduction de la conscience socialiste dans le prolétariat par les intellectuels petit-bourgeois ». Si cette conception est vrai, ce pouvoir doit être absolu, toute démocratie n’est que concession à la faillibilité humaine ». -Cornelius Castoriadis, L’institution imaginaire de la société, 1975.

Amusant oxymore. Pour ceux qui s'intéresse au second empire, le pamphlet anti-bonapartiste de Maurice Joly est excellent, plein d'esprit: http://hydra.forumactif.org/t2815-maurice-joly-dialogue-aux-enfers-entre-machiavel-et-montesquieu?highlight=joly

Et on connaît la suite de sa carrière: un coup d'Etat et une dictature impériale de 20 ans, parsemé de petites aventures militaires pour rehausser le prestige du régime, jusqu'à la grosse branlée finale de 1870... J'espère qu'il n'y aura pas de parallèle historique avec le futur président Macron.

Un vieux sage me l'avait dit bien avant que j'aille étudier la philosophie. Je lui ai jusqu'à un certain point donné raison en passant à autre chose depuis: "La philosophie est à l'étude du monde effectif ce que l'onanisme est à l'amour sexuel." -Karl Marx, L'idéologie allemande, chapitre 3.

Tout d'abord, merci du compliment. Ensuite, comme l'a dit @FabriceM dans un autre fil, il va valoir réfléchir et analyser tout ça à tête reposé. Pour le moment je me sens assez désemparé par le résultat. Non seulement je suis surpris que Macron soit au deuxième tour (et pire, au deuxième tour en tête), mais je ne considère pas que ce soit une bonne nouvelle. Sur les questions géopolitiques et institutionnelles, je m'attends au pire (quand j'entends Bayrou dire qu'il faut changer les institutions, préparer une refondation pour plus d'Europe...). Sur le reste, il a tellement social-démocratisé son programme que le demi-libéralisme des origines risque de n'être plus qu'un lointain souvenir. Et puis c'est fondamentalement le candidat du statu quo, donc si rien ne change je prévois une poursuite du déclin du pays. Il est possible que le désenchantement que m'inspire Macron (je l'avais plutôt soutenu ici même à l'origine) ait en partie affecté mon jugement. Ce n'était pas une bulle (ceci pour @Bézoukhov, oui, il faut cesser de dire que c'était une bulle uniquement porté par les média, ça s'appelle assumer ses erreurs). Les français ont vraiment voulu ça. Bon. Pour moi ça va être un président très apolitique, incapable de faire des choix tranchés (Hollande 2.0 quoi). Ce n'est pas rassurant pour la suite. Je précise que je ne suis pas trompé sur tout. J'ai annoncé MLP au deuxième tour vers 23% (plutôt 22 au final). Je n'ai pas surestimé la défiance envers Fillon crée par les affaires, car je l'avais bien annoncé à 20%. Je ne me suis pas trop trompé sur Mélenchon (j'avais dis 16 à 18, il va faire 19%). Quand à Hamon, hé bien, personne ne pouvait prévoir qu'il tomberait aussi bas (j'avais dis entre 13 et 9% il y a une semaine). Espérons que le PS disparaisse dans la foulée, ce serait déjà une bonne chose de faite.

Du coup j'ai bien choisi le titre du fil ^^

Laurent Bergé (CFDT) et Jean-Luc Mélenchon appelle à "battre l'extrême-droite". Il est partit pour triompher le Macron.

Tout à fait. Nous allons tous, moi le premier, devoir beaucoup réfléchir à cet événement et à ses suites.

Il dit aussi mots pour mots: "Emmanuel Macron, c'est moi".