Un auteur que Astynoos doit connaître disait que la monarchie, c'est l'anarchie +1.
Hoppe estime que parmi les régimes politiques, la monarchie est le moins attentatoire à la propriété, car il rend le pouvoir indisponible. Puisque celui-ci est monopolisé par une dynastie, la tentation du marchandage démocratique (et du nivellement par la redistribution qui en découle) est absente. De plus, contrairement au personnel démocratique, l'intérêt du monarque est d'accroitre la richesse de ses sujets plutôt que de les faire raquer le plus rapidement possible parce qu'ils sont la source de ses revenus mais aussi ceux de ses enfants (et petits enfants, etc.). En contraste, la perspective du politicien démocrate s'arrête là où s'éteint son mandat. Lui à tout intérêt à promettre de transférer aux riches vers les pauvres pour se faire élire, d'endetter à mort le pays et à refiler le bébé à ses successeurs, etc.
De Jasay remarque aussi que l'expression même du consentement en monarchie est plus propice à ce que la société prenne conscience de ses intérêts comme opposés à ceux de l'État : en se désignant comme instrument de la société légitimé par le suffrage universel, l'État démocratique a réussi à étendre son pouvoir avec l'aval de ses citoyens, là où toute extension du pouvoir monarchique -parce que reposant plus explicitement sur la coercition- se fait en confrontation avec ses sujets (qu'on se souvienne des révoltes antifiscalistes déclenchées dans le sillage de la rationalisation de l'imposition en France et en Europe !).
Sur un plan historique plus propre à la France, la question du rôle centralisateur de la Monarchie moderne (et de sa continuité dans l'esprit post 1789) demeure assez ouverte. La thèse de Tocqueville qu'évoque Apollon se fait la continuatrice d'une tradition aristocratique anti-absolutiste (dans laquelle on trouve Montesquieu, Voyer d'Argenson, François Hotman ou plus récemment Bertrand de Jouvenel) qui a ouvert la voie à la frange du libéralisme qui m'est le plus sympathique.
Toutefois, si l'idée que la monarchie en jouant la bourgeoisie contre l'aristocratie a préparé le jacobinisme est séduisante de loin, elle ne résiste pas trop longtemps à l'épreuve des faits. Même avec la meilleure volonté du monde, avec sa cohorte de juristes, de percepteurs, de fermiers généraux et de dragons, l'ancien régime (même sous Colbert) est structurellement incapable de faire du pays ce corps "un et indivisible" que les révolutionnaires ont cherché à établir (et qu'ils n'ont qu'en partie établi : le gros du travail s'est fait, si on en croit Braudel et Weber, avec la révolution industrielle). Il suffit pour ça de lire ce qu'en dit Bainville dans son "Histoire de France"
Il me semble que le problème actuel de la monarchie (pas celle constit et démocratique, la vraie), c'est que ses outils de légitimation passés (hérédité, dynastie, etc) sont devenus totalement étrangers à nos contemporains : le triomphe dans les esprits de l'égalité a fait rendre gorge aux représentations d'Ancien régime.