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Le libéralisme, rationalisme et le socialisme


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Sur la démocratie, les experts et le libéralisme : une jolie tribune de N. Jutzet publiée dans la newsletter du Temps (je n'ai pas vu de copyright, auquel cas je supprimerai)

Quel est le prix de vos valeurs?

Comment expliquer que la population ne suive pas toujours l’avis majoritaire parmi les experts? Plutôt que par l’ignorance, cette différence s’explique par le fait que les individus ont des valeurs morales pour lesquelles ils sont prêts à en payer le prix

 

Certains dimanches de votation, à la découverte des résultats, vous glissez sans doute dans le camp de ceux qui, comme Churchill après une rencontre désespérante sur un marché avec un badaud, pensent que «le meilleur argument contre la démocratie est un entretien de cinq minutes avec un électeur moyen». Evidemment, dans ce genre de moment de misanthropie, l’irrationnel est toujours l’autre. Celui qui n’aurait pas compris les nuances de la réalité et la pertinence des arguments que vous jugez irréfutables.

C’est à ce sentiment qu’Augustin Landier et David Thesmar, deux économistes de renommée internationale, s’intéressent dans leur ouvrage Le Prix de nos valeurs. Pour mieux comprendre pourquoi les avis majoritaires parmi les économistes ne sont pas toujours partagés par la population, ils se sont intéressés plus en détail aux mécanismes de choix dont le citoyen se sert pour trancher des questions complexes.

 

Car si les économistes sont en général favorables à l’immigration, la mondialisation ou encore la concurrence, la population est plus sceptique. Face à ce fossé, il n’est pas rare d’entendre que cette différence de jugement s’explique par le fait que le citoyen lambda ne comprend pas le problème dans sa globalité et qu’il cède à des peurs, ou qu’il s’appuie sur de fausses informations.

 

Séduisante, et sans doute véridique de façon isolée, l’explication s’avère en réalité paradoxalement réductrice. La raison avancée par Landier et Thesmar est plus intrigante: «Les gens ont des valeurs qui ne rentrent pas dans l’analyse économique standard, et pour lesquelles ils sont prêts à payer le prix.» Au moment de répondre, par exemple, à la question de savoir s’il est souhaitable d’accueillir plus de réfugiés au risque de saturer les services sociaux et l’équilibre culturel d’une société, les gens intègrent la dimension non pécuniaire de leur existence (l’identité, l’altruisme, la justice, la culture, la liberté…) à leur analyse froidement économique.

 

Ne pas se tromper de diagnostic

C’est ce qui explique que dans le cadre d’un sondage sur un thème comme l’immigration, même en expliquant en détail les enjeux aux participants et l’état des connaissances économiques, favorables à l’immigration, leur avis reste sensiblement le même, voire ne change pas du tout. Leur position sceptique ne s’explique pas par l’ignorance, mais par l’acceptation de «payer le prix» de leurs valeurs morales. Ils préfèrent sacrifier un peu d’efficacité économique pour maintenir ou atteindre une société qui satisfait mieux d’autres de leurs préférences. Toutefois, les gens ne sont pas des fondamentalistes sur le plan moral. Leur soutien à un choix guidé par la morale baisse quand il entraîne des coûts plus élevés.

 

Au vu de ces éléments, il semble que les voix critiques qui regrettent que les gens votent «faux» ou contre «leurs intérêts» par ignorance dévoilent plutôt leurs propres angles morts et le fait qu’ils peinent à comprendre les préférences de leur prochain.

 

Cette tension entre efficacité économique et valeur morale s’observe sur de nombreux autres sujets. Ainsi, je ne suis pas libéral parce qu’une organisation sociétale qui repose sur la liberté de ses membres est plus efficace que les autres, mais parce que pareille société me semble moralement plus souhaitable et juste qu’un régime qui donne le droit aux foules de maltraiter les autres en fonction de leurs humeurs. Heureux hasard, il se trouve que les sociétés qui confient davantage de responsabilité aux individus, aussi celle d’apprendre de leurs erreurs, sont également celles dans lesquelles il fait bon vivre. Ce qui prouve que la dimension non pécuniaire de notre existence et la rationalité économique peuvent aussi faire bon ménage.

 

David Thesmar et Augustin Landier, «Le prix de nos valeurs. Quand nos idéaux se heurtent à nos désirs matériels», 2022, Flammarion.

  • Yea 2
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il y a 10 minutes, poincare2 a dit :

tribune de N. Jutzet publiée dans la newsletter du Temps

D'une manière générale, l'Institut Libéral a une tribune hebdomadaire dans Le Temps, tribune toujours de très bonne facture.

 

Dans la mesure où je la reçois aussi par une newsletter gratuite, je suppose qu'elle est libre de diffusion (jusqu'à infirmation, en tous cas).

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