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Liechtenstein, une monarchie libertarienne ?


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Tiré d'un article de Mediapart :

 

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Là où la plupart des familles régnantes d’Europe se réfugiaient dans un rôle de symbole passif de l’État, celle du Liechtenstein, elle, est parvenue à affirmer son contrôle sur les terres au terme de plusieurs crises politiques qui ont secoué ce petit pays dans les années 1990 et 2000.

En 2003, le prince régnant Hans-Adam II décide de proposer une réforme de la Constitution de 1921 dans laquelle son propre pouvoir est renforcé, notamment par un droit de veto sur les lois du pays. 

 

En 2003, Hans-Adam II a mené la campagne avec un seul argument sous forme de chantage : si le peuple rejette sa réforme, sa famille « retournera à Vienne ». La panique s’empare d’une partie de la population. Car ce prince est un homme riche et une puissance économique à lui tout seul à l’échelle du pays.

 

En mai 2025, ce chef d’État, qui a fêté en début d’année ses 80 ans, dispose d’une fortune personnelle, selon l’indice Bloomberg des milliardaires, de 10,6 milliards de dollars (9,4 milliards d’euros environ), soit un quart de plus que le PIB annuel de « son » pays.

Cela en fait le 294e homme le plus riche du monde, et le souverain le plus riche d’Europe. Il est aussi bien entendu l’homme le plus riche du Liechtenstein et un de ses premiers employeurs.

 

Il est, en tant que chef de la famille princière, propriétaire de la première banque du pays, LGT, et de divers actifs, terrains, tableaux, demeures, dans la principauté et à l’étranger.
 

Ces nouveaux pouvoirs deviennent une réalité en 2011. Un référendum est alors organisé sur l’introduction de l’avortement dans le pays. Le prince héritier Alois, auquel le prince régnant a confié la régence en 2004, prévient qu’il mettra son veto en cas d’adoption de l’IVG dans le pays. « À ce moment, le vote a perdu tout son sens, ce n’était plus, au mieux, qu’un sondage », résume Sandra Fausch, l’autre députée FL. Le « non » l’emporte avec 54 % des voix.


[...]

À ce moment, un groupe décide de relancer le débat sur les pouvoirs du prince et propose à nouveau leur abrogation dans un référendum qui se tient en 2012. Alois recourt au même chantage que son père et la population rejette l’initiative par 76 % des voix.

Pour les Liechtenstein, grands propriétaires terriens en Autriche et en Bohème, ces deux comtés n’ont qu’un seul intérêt : ils ne sont pas sous la vassalité directe des Habsbourg et peuvent donc être considérés comme des territoires souverains, à l’époque au sein du Saint-Empire romain germanique. En 1719, l’empereur Charles VI élève alors les deux comtés au rang de principauté souveraine pour récompenser cette famille fidèle et en faire l’égale des plus grands princes d’Allemagne. Le territoire prend alors le nom de son propriétaire, et après la fin du Saint-Empire en 1806, il devient de facto indépendant.

 

C’est pour cette raison que la famille est appelée officiellement en allemand « von und zu Liechtenstein » : la famille vient du Liechtenstein autrichien (« von », de) et est prince du Liechtenstein des bords du Rhin (« zu », à). Cette histoire n’est pas anodine. Elle montre le lien très particulier et encore solide qui lie la famille princière à ce pays. Pour celle-ci, la principauté est un achat venu s’ajouter à ses multiples possessions.

[...]

Au moment des débats constitutionnels, Hans-Adam II a publié L’État au troisième millénaire (Apopsix). C’est un pamphlet libertarien mâtiné de fascination pour la mondialisation. Le prince y définit sa relation avec le peuple du Liechtenstein comme un « partenariat » qui « s’inscrit dans la tradition » et doit être « bénéfique aux deux parties ». Une sorte de contrat de gestion qui serait la clé, selon lui, de la richesse unique du petit pays.

 

Le prince développe alors, à partir de son expérience, une théorie selon laquelle le niveau idéal de gouvernance est le plus petit possible (la Constitution du Liechtenstein permet aux communes de faire sécession) et où la forme de l’État devient celle d’une « entreprise de service » qui n’aurait plus de monopole sur son territoire. Le monarque agit alors comme une sorte d’actionnaire de cette « entreprise », à égalité avec le « peuple ». Logiquement, il n’est pas actif dans la gestion quotidienne des affaires, qui est laissée au gouvernement, mais il peut, si besoin, faire valoir sa voix majoritaire, son « droit de veto ». En retour, le peuple peut abolir la monarchie et dissoudre cette entreprise de services. En en payant le prix, bien sûr.

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A priori, la Constitution du Liechtenstein a des aspects beaucoup plus démocratiques que celles de bien d’autres États européens. Les citoyens disposent de la possibilité de demander des référendums d’abrogation de lois déjà votées ou de modifications de la Constitution, sur le modèle fédéral suisse.

Mais, en retour, la Constitution du Liechtenstein établit le principe d’une égalité de souveraineté entre le prince et le peuple qui « exercent ensemble la puissance publique » (article 2). L’article 9 indique qu’une loi n’est valide que si elle a la sanction du prince. Cette sanction est également nécessaire pour les référendums constitutionnels (article 111).

Le prince, qui est juridiquement irresponsable, peut, par ailleurs, selon l’article 80, décider qu’un des membres du gouvernement a « perdu sa confiance », ce qui, de facto, entraîne son départ de l’exécutif. Enfin, selon l’article 96, les juges sont nommés par le prince et le Landtag, mais le souverain a « voix prépondérante ». Pour contourner le choix du prince, il faut un référendum.

Enfin, le peuple a la possibilité de proposer l’abolition de la monarchie par référendum selon l’article 113. C’est le seul cas où le prince ne dispose pas de veto, même s’il peut proposer un contreprojet constitutionnel. Cet article permet d’établir, que sur le papier du moins, le peuple peut toujours avoir le dernier mot en cas de désaccord avec le prince.

 

Citation

En 2024, le parti populiste Démocrates pour le Lienchtenstein (Demokraten Pro Liechtenstein, DpL), qui a réussi une percée remarquée lors du scrutin de juin avec six sièges obtenus, provoque un référendum sur la privatisation de cette radio publique. La campagne a porté non seulement sur la proximité de la radio vis-à-vis de l’État et du gouvernement, mais aussi sur son coût jugé trop élevé. Ce dernier élément a été, pour Thomas Milić, déterminant : « Les gens se sont dit : cela coûte trop cher et ne nous sert à rien. »

 

Résultat : la privatisation a été adoptée par 55 % des votants, avec l’appui de la VU. En début d’année, le gouvernement, incapable de trouver un repreneur privé, a pris la décision de débrancher la radio qui a cessé d’émettre le 8 mars.

 

Situation économique et financière du Liechtenstein

 

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Selon l’office statistique du Liechtenstein, en 2023, avec un PIB nominal de 7,4 Mds CHF pour une population de 40 000 personnes, le Liechtenstein (6ème plus petit pays au monde par sa superficie), génère un PIB/habitant de 185 000 CHF, soit le 2ème plus élevé au monde après Monaco et le double de celui de la Suisse. Si le secteur tertiaire est le 1er contributeur au PIB (55 %), l’industrie y occupe aussi une place très importante en comparaison internationale (40 % - soit la plus grande part parmi l’ensemble des pays européens), tandis que le secteur primaire reste (assez logiquement) marginal (<1 %). Le tissu productif du Liechtenstein est constitué d’un grand nombre de très petites entreprises : 88 % des 5 500 entreprises qui y sont établies comptent moins de 10 salariés. Ses entreprises bénéficient d’un libre accès à la fois au marché européen (en tant que membre de l’EEE) et au marché helvétique (union douanière et monétaire avec la Suisse – le franc suisse étant la monnaie nationale du Liechtenstein, pour qui la BNS joue le rôle de Banque centrale).

L’économie liechtensteinoise se distingue par un très haut niveau d’industrialisation. L’industrie manufacturière est essentiellement tournée vers l’export (Suisse, Allemagne, États-Unis) et spécialisée dans la production de biens à forte valeur ajoutée sur des segments de niches, comme les machines-outils, les instruments de précision et d’optique, l’électronique, les produits pharmaceutiques ou encore les produits dentaires.

En 2023, le taux de chômage a atteint seulement 1,4 %. Autre particularité liechtensteinoise, le nombre d’offres de postes y est égal à plus du triple du nombre de personnes sans emploi enregistrées auprès des autorités. Le salaire mensuel médian brut se monte à 7 042 CHF en 2022 selon l’office statistique du pays. Les travailleurs étrangers, qui représentent (logiquement) plus de 70 % de la main-d’œuvre du pays, sont principalement originaires de Suisse (60 % d’entre eux) et d’Autriche (36 %), et sont en majorité frontaliers (24 600 travailleurs frontaliers).

Les finances publiques du Liechtenstein sont particulièrement solides : le pays affiche une dette nette négative (i.e., ses actifs sont supérieurs à ses passifs), enregistre régulièrement un excédent budgétaire et a ainsi pu accumuler une « réserve » budgétaire. Sa solvabilité est notée AAA par Standard’s & Poor depuis 1996, classant désormais la Principauté parmi les 11 derniers pays au monde à disposer de la notation souveraine maximale. Le ratio des dépenses publiques atteint seulement 22,6 % du PIB. En 2022, les dépenses des administrations publiques étaient principalement affectées à la Sécurité sociale (22 %) et à l’éducation (20 %).

 

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C’est d’ailleurs à mon avis ce qui manque aux monarchies restantes : un vrai rôle pour le monarque / l’aristocratie pour tempérer la démocratie. 

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56 minutes ago, Tramp said:

C’est d’ailleurs à mon avis ce qui manque aux monarchies restantes : un vrai rôle pour le monarque / l’aristocratie pour tempérer la démocratie. 

Je pense qu'il manque le mot européenne dans ta phrase.

Car si tu regardes du côté des pétromonarchies, par exemple, ils tempèrent plutôt bien ;)

 

 

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Libéral != Démocratie.

Je préfère un pays libéral et non démocratique que l'inverse.

Même si dans les faits, rares sont les pays non démocratiques et libéraux.

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10 minutes ago, GilliB said:

Libéral != Démocratie.

Je préfère un pays libéral et non démocratique que l'inverse.

Même si dans les faits, rares sont les pays non démocratiques et libéraux.

 

Dubaï et Singapour sont deux exemples modernes.

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C’est aussi parce qu’on a une définition assez flexible de la démocratie qu’on trouve des pays démocrates et libéraux dans l’histoire. 
On appelle à la fois démocratie les pays qui fonctionnent au suffrage universel, ceux qui excluaient la moitié des adultes et ceux qui excluaient 95% du corps électoral. 
 

Il y a plus de gens qui participent aux élections à Singapour que sous la 3e république. 

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George Washigton a eu 100% du vote populaire avec 28 009 voix très exactement. Personne ne remet en cause que les US étaient une démocratie. 
 

Et 11  176 voix pour son deuxième mandat (100% encore) !

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Il me semble que les libéraux ont souvent défendu des régimes qui incorporent différents éléments de différents régimes dans le but de contraindre l’Etat quand il le faut sans qu’il soit impotent lorsqu’il le faut. 

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il y a 30 minutes, Tramp a dit :

Il me semble que les libéraux ont souvent défendu des régimes qui incorporent différents éléments de différents régimes dans le but de contraindre l’Etat quand il le faut sans qu’il soit impotent lorsqu’il le faut. 

C'est surtout très aristotélicien.

Posté

Tout dépend ce que tu cherches dans le libéralisme.

Si c'est peu d'impôts, Dubaï, c'est très bien.

Si c'est la liberté d'expression, j'éviterais d'y faire un tour.

 

 

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Il y a 9 heures, Tramp a dit :

George Washigton a eu 100% du vote populaire avec 28 009 voix très exactement. Personne ne remet en cause que les US étaient une démocratie. 
 

Et 11  176 voix pour son deuxième mandat (100% encore) !

 

Je ne sais pas ce que racontent les manuels d'histoire, mais à l'époque, le titre de "démocratie" n'était pas revendiqué. C'était un sobriquet péjoratif appliqué au parti qui préférait se faire appeler "républicain", par le parti voulant se faire appeler "fédéraliste", qui se faisait lui-même appeler "monarchiste" ou "aristocratique" en retour. 

C'est au début du XIXème que la majorité des hommes blancs se mettent à voter, et que le titre de "démocrate" devient revendiqué, autour du phénomène Jackson. 

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Il y a 4 heures, Jean_Karim a dit :

Et qui font rêver.


Apparemment, vu les flux migratoires.

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