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TIL - today I learnt...


Hayek's plosive

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KGB, la suite.

 

Moins de trucs croustillants pour le début de la période stalinienne. Dzerjinsky meurt quelques heures après un auto-panégyrique dément devant le Comité Central, moment qui deviendra (objet de) culte pour les futures recrues du KGB. Il est remplacé par Mejinsky, un type complètement falot, faible et cacochyme (quoique fin lettré et polyglotte), ce qui permet à Staline de supprimer l'autonomie relative de ce qui était encore le GPU et deviendra le NKVD, les opérations concrètes étant gérées par le bras droit de Mejinsky, un certain Iagoda, qui finira par remplacer son patron (et restera sous contrôle de Staline, puisqu'il lui doit tout).

 

Dans la mesure où le socialisme, ça ne marche pas, jamais, nulle part, même par hasard, le Comité Central continue à attribuer les échecs économiques du régime au sabotage des ennemis extérieurs et de leurs relais intérieurs, et ainsi à s'enfoncer dans la paranoïa (on a des marques de paranoïa dans tous les gouvernements européens durant la Première Guerre mondiale, qui ont sensiblement disparu après 1918 ; chez les Bolcheviks, ça n'a jamais pris fin, et ça n'a fait que se renforcer les années passant et les échecs s'accumulant). La personnalité de Staline joue aussi : ses sbires comprennent vite que plus les complots qu'on lui présente sont vastes, voire à la limite de la démence, plus il est susceptible d'y croire.

 

Du coup, Staline redirige les efforts du GPU vers l'ennemi intérieur, qu'il s'agisse de l'Opposition de Gauche, l'Opposition de Droite, ou des koulaks (i.e. de tout paysan opposé à la collectivisation). Au fur et à mesure, certains ex-Tchékistes et autres vieux Bolcheviks ont fini par se dire que ce n'était pas ce pour quoi ils s'étaient engagés, notamment lors de la déportation des koulaks en camps de travail (toute proportions gardées, c'est un sentiment de lassitude et de dégoût qu'on retrouve dans certains témoignages d'Einsatzgruppen). Aucune mutinerie toutefois, dans la mesure où c'est "l'armée des 25 000" qui fit le gros du sale boulot de répression et d'encadrement politique, composée d'un peu plus de 25 000 jeunes ouvriers volontaires dont l'enthousiasme anticipe clairement celui des futurs Gardes Rouges de Mao lors de la Révolution Culturelle. 

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il y a 36 minutes, Rincevent a dit :

toute proportions gardées, c'est un sentiment de lassitude et de dégoût qu'on retrouve dans certains témoignages d'Einsatzgruppen

Il me semblait que ce sentiment de dégoût (+ moral général assez bas chez les Einsatzgruppen + certains de ces soldats qui pètent des câbles en permission, massacrant leur famille) était assez marqué quand même. Disons, suffisamment pour abandonner la Shoah par balles et favoriser le développement des camps de la mort.

  • Yea 2
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il y a une heure, Ultimex a dit :

Il me semblait que ce sentiment de dégoût (+ moral général assez bas chez les Einsatzgruppen + certains de ces soldats qui pètent des câbles en permission, massacrant leur famille) était assez marqué quand même. Disons, suffisamment pour abandonner la Shoah par balles et favoriser le développement des camps de la mort.

Oui, je voulais dire qu'il était plus intense et plus répandu au sein des Einsatzgruppen qu'au sein des Guépéistes de la dékoulakisation.

  • Yea 1
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Au fond, le Guépéou (enfin l'OGPU, bref) a été une importante cheville ouvrière de l'Holodomor. Sa tâche implicite a été de persécuter la paysannerie ukrainienne en inventant toujours plus de complots et de saboteurs, mais son rôle explicite aura été d'empêcher tout Ukrainien de sortir d'Ukraine (à moins d'avoir un passe spécial), tout grain de rentrer en Ukraine, et toute nouvelle d'atteindre des oreilles non-autorisées : en cela, sa mission fut un des plus grands succès soviétiques des années 30 (c'est la période des voyages en URSS de Herriot, Shaw, Duranty et autres Webb).

 

Ah, et le cannibalisme n'était pas réprimé par le code pénal soviétique. Quelle chance. <_<

  • Post de référence 1
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Citation

l'assainissement des finances publiques avec un horizon à 2027 pour le retour du déficit sous la barre des 3 % du PIB 

ambition-i8021.jpg

Posté
Il y a 5 heures, Rincevent a dit :

Au fond, le Guépéou (enfin l'OGPU, bref) a été une importante cheville ouvrière de l'Holodomor. Sa tâche implicite a été de persécuter la paysannerie ukrainienne en inventant toujours plus de complots et de saboteurs, mais son rôle explicite aura été d'empêcher tout Ukrainien de sortir d'Ukraine (à moins d'avoir un passe spécial), tout grain de rentrer en Ukraine, et toute nouvelle d'atteindre des oreilles non-autorisées : en cela, sa mission fut un des plus grands succès soviétiques des années 30 (c'est la période des voyages en URSS de Henriot, Shaw, Duranty et autres Webb).

 

Ah, et le cannibalisme n'était pas réprimé par le code pénal soviétique. Quelle chance. <_<

 

Dans l'histoire complete du communisme de Wolton, Henriot est qualifié d'idiot utile par Staline. D'où l'expression.

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il y a 5 minutes, Marlenus a dit :

Vous confondez Henriot et Herriot.

 

Même période, pas du tout les mêmes personnes.

Bien vu, je ne me suis pas aperçu de ma faute de frappe. Du coup je corrige.

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KGB, la suite. La paranoïa stalinienne et son fruit, la grande terreur des années 30, était au minimum un jeu à deux entre Staline et le NKVD, qui affirmait son pouvoir sur la population, agrégeait toujours plus de ressources et assurait sa propre protection en inventant sans cesse de nouveaux complots (nourrir le crocodile pour qu'il vous mange en dernier, ça peut aboutir à des millions d'arrestations quand même). La Gestapo a eu beau forger des documents pour que Staline élimine le maréchal Toukhatchevski, Tonton Jojo avait de toute façon déjà prévu de s'en débarrasser. Et apparemment lesdits documents sont passés par l'intermédiaire d'Edvard Benes : plus je lis sur ce gars, plus je le méprise (un peu comme Lloyd George en fait).

 

La répression ne toucha pas que les Russes. Une bonne partie des cadres du Komintern ainsi que des partis communistes étrangers clandestins réfugiés en Russie y passèrent, et spécialement pour ce qui concerne le PC polonais, dont les leaders étaient juifs, "donc" suspects de trotskysme.

 

L'accusation de trotskysme était bien pratique pour éliminer des communistes sans plus de justification, et le NKVD en usa très largement. En fait, le mouvement trotskyste (concrètement réduit à quelques milliers de types autour du globe) ne semblait puissant qu'à Staline, qui en voyait partout... et à Trotsky, en plein wishful thinking face à la propagande stalinienne.

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1 hour ago, Rincevent said:

L'accusation de trotskysme était bien pratique pour éliminer des communistes sans plus de justification, et le NKVD en usa très largement. En fait, le mouvement trotskyste (concrètement réduit à quelques milliers de types autour du globe)

 

Une enquête dans les facs françaises aurait permis d'en trouver bien plus.

  • Haha 1
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il y a 42 minutes, Lameador a dit :

Une enquête dans les facs françaises aurait permis d'en trouver bien plus.

On parle des années 30, là. Un moment où Trotsky ne représente à peu près plus que lui-même. 

 

Au fond, plutôt que de buter des millions de gens pour le fun, Staline aurait juste dû buter Trotsky à son expulsion du Comité Central plutôt que de l'assigner en résidence surveillée à Alma-Ata puis à Constantinople. Mais bon, je suppose que les vrais paranoïaques ne tiennent pas à ce que la source de leur paranoïa s'éteigne.

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il y a 10 minutes, Rincevent a dit :

Au fond, plutôt que de buter des millions de gens pour le fun, Staline aurait juste dû buter Trotsky à son expulsion du Comité Central plutôt que de l'assigner en résidence surveillée à Alma-Ata puis à Constantinople. Mais bon, je suppose que les vrais paranoïaques ne tiennent pas à ce que la source de leur paranoïa s'éteigne.

Ou il (Staline) aurait trouvé quelqu'un d'autre.

Posté
Il y a 2 heures, Rincevent a dit :

KGB, la suite...

 

D'après ton bouquin, on sait si c'est bien l' OGPU/NKVD qui a assassiné Kirov? 

Posté
1 hour ago, Rincevent said:

On parle des années 30, là. Un moment où Trotsky ne représente à peu près plus que lui-même. 

 

Au fond, plutôt que de buter des millions de gens pour le fun, Staline aurait juste dû buter Trotsky à son expulsion du Comité Central plutôt que de l'assigner en résidence surveillée à Alma-Ata puis à Constantinople. Mais bon, je suppose que les vrais paranoïaques ne tiennent pas à ce que la source de leur paranoïa s'éteigne.

Il l'a fait au final et cela ne l'a pas empêcher de continuer à buter sous d'autres prétextes.

  • Yea 1
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Il y a 2 heures, Marlenus a dit :

Il l'a fait au final et cela ne l'a pas empêcher de continuer à buter sous d'autres prétextes.

Vrai, après certes une douzaine d'années d'approfondissement de sa paranoïa. Et aussi, après que Trotsky ait fondé une Internationale, écrit une quinzaine de bouquins, et eu une influence culturelle importante.

 

Comme quoi, cest typiquement bolcho de tabasser des millions d'innocents tout en laissant passer les quelques uns qu'il fallait arrêter. 

Posté
Il y a 23 heures, Marlenus a dit :

Vous confondez Henriot et Herriot.

 

Même période, pas du tout les mêmes personnes.

 

 

 

Bien vu bis. Et je pensais pas du tout a Henriot mais bien a Herriot :blink:

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TIL que l'on devrait a Rocard les traductions francaises de Hayek

 

E. Jalley, La réforme du collège, p. 17, L'Harmattan, 2015 : « J’ai expliqué ailleurs, à l’occasion d’un propos intéressant de Jean-Pierre Chevènement que les principes de l’économie néo-libérale avaient été importés en France à partir des années 1980, notamment sous l’impulsion des traductions françaises des ouvrages de Friedrich Hayek, par les socialistes droitisants Delors et Rocard

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Il y a 2 heures, Johnnieboy a dit :

TIL que l'on devrait a Rocard les traductions francaises de Hayek

 

E. Jalley, La réforme du collège, p. 17, L'Harmattan, 2015 : « J’ai expliqué ailleurs, à l’occasion d’un propos intéressant de Jean-Pierre Chevènement que les principes de l’économie néo-libérale avaient été importés en France à partir des années 1980, notamment sous l’impulsion des traductions françaises des ouvrages de Friedrich Hayek, par les socialistes droitisants Delors et Rocard

Il me semble que c'est Raymond Barre, le premier à avoir traduit Hayek en Français, et dès 1953 (mais c'était de l'épistémologie, pas de l'économie à proprement parler).

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KGB, la suite.

 

Trotsky n'est devenu la hantise de Staline qu'au fur et à mesure des années 30, le Trotsky imaginaire ayant vite pris le pas dans l'imaginaire stalinien sur le Trotsky réel. Son entourage a été très facilement infiltré, au point où c'est un agent du NKVD (l'anthropologue Mark Zborovski, qui devint bien plus tard professeur à Harvard) qui avait la clé de la boîte aux lettres de Trotsky, et ce n'est pas une métaphore (c'était aussi son homme de confiance, son confident et son aide pour la publication de son petit bulletin périodique confidentiel).

 

Tant que le Guépéou et le NKVD étaient sous la direction de Menjinsky et de Yagoda, l'organisation s'est contenté d'infiltrer les milieux trotskystes. Mais une fois Yejov à sa tête, le but a changé et les éliminations ont commencé... d'anord en Espagne, aboutissant à une véritable guerre civile au sein de la Guerre Civile (et en cela, Franco peut remercier Staline de lui avoir facilité la tâche).

 

Ce qui est intéressant, c'est de voir à quel point toute la gauche européenne et les Brigades Internationales considéraient Franco comme la pure marionnette de Mussolini et d'Hitler (si ils lui apportaient bel et bien du soutien, le Caudillo était tout sauf à leur créature), cependant que Staline croyait dur comme fer que les trotskystes et le POUM étaient des agents hitléro-franquistes dédiés à affaiblir l'influence de Moscou. Complotistes contre complotistes, donc.

 

Dans tous les cas, un des staliniens les plus enthousiastes pour casser du trotskard était André Marty, député PCF, enthousiaste donc au point où il a fini par être sommé de rentrer à Paris s'expliquer (il a d'ailleurs reçu le sobriquet de "boucher d'Albacete"). Parmi ses bras droits, on comptait Walter Ulbricht, qui serait promis à un beau destin en RDA. Cependant que le premier ministre républicain, Juan Negrin, a refusé pendant des années de croire que le NKVD ait pu construire ses propres prisons en Espagne, parce que c'était évidemment "de la propagande fasciste". Vous le sentez, l'argument qui sert tellement à tout qu'il va revenir encore et encore ? ;)

  • Yea 1
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Il y a 7 heures, Rincevent a dit :

véritable guerre civile au sein de la Guerre Civile

 

On peut lire (ou relire) Hommage à la Catalogne d'Orwell sur le sujet, qui a vécu tout ça en direct (Et qui inclut ses remarques sur les articles diffamatoires de la presse communiste aux ordres de Staline).

Posté
il y a 34 minutes, Ultimex a dit :

la presse communiste aux ordres de Staline

C'est redondant. ;)

Posté
il y a 2 minutes, Rincevent a dit :

C'est redondant. ;)

Ah, je ne vais pas t'apprendre que tous les cocos de l'époque ne sont pas nécessairement stals (ou trotskistes d'ailleurs), d'où la précision.

  • Yea 1

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