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Débat sur "l'état de droit"


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Je vois ce thème buzzer de plus en plus, et j'ai l'intuition qu'il faut distinguer État de droit et rule of law. La rule of law est une conception britannique, tandis que l'Etat de droit est une conception germanique... or, qu'est-ce que les Boches y comprennent, à la liberté ? ;)

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Il y a 3 ou 4 conf de présentation de ce bouquin dispo sur YT, j'en ai vu une autre il y a une dizaine de jours. Je n'ai pas de connaissances et d’intérêt pour le droit donc c'est tres/trop pointu mais je suis assez d'accord avec les conséquences qu'il présente. Pas forcement en ces lieux mais dans le milieu plutôt libéraux de plateau il y a clairement une totemisation de l'EdD, pris comme un allant de sois céleste mais en fait devenu un fourre tout presque aussi vicelard que l’Intérêt General™ ou les Droits de l'Homme™. Allié de la civilisation de la norme et de la normalisation top-down. Un truc d'anywhere de plus ... mais je m’égare.
Après dans la conf que j'ai vu, il opposait beaucoup l'EdD à la démocratie réelle, il a probablement raison. Cette dernière n'est, à raison, pas un totem pour les libéraux, qui ont probablement plus d’affinité avec l'EdD théorique qui semble à première vu plus compatible avec le Droit Naturel ... mais cf le fourre tout évoqué plus haut c'est de + en + discutable ...

(Je trouve ce sujet assez connexe avec la question des valeurs occidentales ™ du tweet de Ferghane et la carte des libertés humaine qu'il utilise comme support)

 

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Je demande l'opinion de @F. mas.

 

En attendant, tout ceci pue la fausse opposition entre Rechstaat formel kelsenien, et démocratie illimitée néo-schmittienne. Tout ce qui est rule of law, limitation du pouvoir de l'État face aux libertés des citoyens, tout ceci semble passer à la trappe. En tant que libéraux, il conviendrait de ne pas se tromper de combat.

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Tenez, Hayek en parlait déjà en 1953 :

 

Citation

The concept of the Rechtsstaat, which originally had implied certain requirements about the character of the laws, thus came to mean no more than that everything the government did must be authorized by a law – even if only in the sense that the law said that the government could do as it pleased.

Years before Hitler came to power German legal scholars had pointed out that this complete emptying of the concept of the Rechtsstaat had reached a point where what remained no longer formed an obstacle to the creation of a totalitarian regime.

 

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19 hours ago, Rincevent said:

Je demande l'opinion de @F. mas.

 

En attendant, tout ceci pue la fausse opposition entre Rechstaat formel kelsenien, et démocratie illimitée néo-schmittienne. Tout ce qui est rule of law, limitation du pouvoir de l'État face aux libertés des citoyens, tout ceci semble passer à la trappe. En tant que libéraux, il conviendrait de ne pas se tromper de combat.

 

J'ai regardé les dix premières minutes de la vidéo, et en effet, l'Etat de droit pour l'intervenant répond à la définition positiviste qu'en donne Kelsen (un Etat comme pyramide de normes), qu'il oppose explicitement à la rule of law anglo-britannique protectrice des libertés individuelles (habeas corpus, due process, etc). Il est évident que quand les libéraux parlent de l'état de droit, ils se reportent à la tradition portée par Locke et Montesquieu, celle qui a perlé dans le droit anglo-américain (mais aussi britannique) et qui s'est aussi étendu sur le continent relativement récemment (via le droit européen notamment). Dire que l'état de droit au sens positiviste ne dit rien sur les libertés individuelles est un truc assez banal, soutenir que la seconde définition n'a aucune portée est idiot (elle a déjà une portée politique et éthique).

 

Maintenant, pourquoi évoquer l'état de droit avec autant d'insistance ces dernières décennies ?

 

Voilà une question qu'elle est bonne, et qui renvoie au grand ennemi de Kelsen Carl Schmitt : la normalisation de la gouvernance par l'exception, qu'elle soit terroriste, climatique, sécuritaire ou covidiste se construit en opposition à l'idéal nomocratique de l'état de droit libéral. Les circonstances exceptionnelles invoquées systématiquement par les pouvoirs publiques supposent de violer ou de suspendre les règles ordinaires du droit et de consacrer l'arbitraire (le souverain au dessus du droit et légitime à le casser) comme le new normal des activités institutionnelles.

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Le 08/10/2023 à 14:21, Rincevent a dit :

Je vois ce thème buzzer de plus en plus, et j'ai l'intuition qu'il faut distinguer État de droit et rule of law. La rule of law est une conception britannique, tandis que l'Etat de droit est une conception germanique... or, qu'est-ce que les Boches y comprennent, à la liberté ? ;)

 

La distinction "rule of law" et "Etat de droit" (tant la définition française que allemande) n'a plus lieu d'être depuis les années 50-60. Ce qui séparait les deux conceptions était la distinction entre substantiel (= un Etat qui garantit des droits) et formel (= un Etat limité par le droit). La théorie allemande au XIXe, puis française, a posé l'idée de l'autolimitation de l'Etat (par des droits publics subjectifs chez Jellinek; par le "système de déclarations des droits" chez Duguit; par la "Constitution sociale" chez Hauriou etc), certes abstraites mais néanmoins imaginée. La rule of law mettait l'accent sur des droits procéduraux dotés de garanties juridictionnelles, limitant effectivement l'emprise de l'Etat. Mais, cette distinction théorique disparu après 1945 où, la conception formelle se mélangea avec la conception substantielle, notamment par la reconnaissance des droits fondamentaux dans les divers ordres juridiques. Allons même plus loin, l'Etat de droit regroupe aujourd'hui trois conceptions: formelle (un Etat limité par le droit); matérielle (un Etat qui agit par le droit) et substantielle (un Etat qui reconnaît et garantie des droits fondamentaux".

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D'après Philippe Raynaud, le débat demeure vivace jusqu'aux années 90 (la chute de l'urss!) l'Etat de droit se distinguant des constitutions autoritaires. L'expression a aussi par la suite une seconde vie en particulier en philosophie politique (par ex philosophie du droit par Sosoé et Renaut en 91). On retrouve cependant la notion dans les différents traités européens qui utilisent le terme rule of law pour opérer une sorte de synthèse entre la notion continentale et celle anglo (le sens n'est fixé qu'en cours de route mais bon).

 

Plus généralement, je suis assez d'accord sur le rapprochement entre les deux traditions (même le royaume uni, le pays de la common law, s'est doté d'une cour constitutionnelle comme un vulgaire constitutional governement), il demeure deux idées tout de même : la conception positiviste de l'Etat de droit permet d'englober un peu trop de régimes autoritaires pour avoir du sens ; la rule of law soumet l'administration au droit commun (c'est une spécificité de la common law qu'observe d'ailleurs Hayek dans la constitution de la liberté), ce que ne fait pas l'état de droit opposé à l'état de police (par ex la France et son famoso droit administratif).

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Le 08/10/2023 à 11:16, Riffraff a dit :

 

J'ai rien trouvé sur liberaux.org sur ce livre d'y il a deux ans, moi qui ne suis pas venu au libéralisme par le droit, je l'ai trouvé très intéressant.

Je note que l'auteur a été invité il y a quelques mois par la revue jeune-libérale suisse Le Regard Libre (le contenu intégral est hélas derrière un paywall).

https://leregardlibre.com/politique/etat-de-droit-ghislain-benhessa/

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