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Mégille

Tribun de la Plèbe
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Tout ce qui a été posté par Mégille

  1. Lien ? Comment peut-on rater du punk ? L'an dernier (je crois) je ne sais plus quel pays avait présenté un groupe de trisomique punk à l'eurovision !
  2. Il ne s'agit pas tant de s'opposer au féminisme et à ses revendications fondamentales en elles-mêmes qu'au féminisme actuel. Dans une société où l'égalité de droit est déjà atteinte (voir légèrement dépassée), revendiquer plus revient nécessairement à revendiquer autre chose, ce avec quoi il est difficile d'être d'accord en tant que libéraux. En ce qui me concerne, je ne suis pas contre un féminisme privé, associatif, qui fait et dit ce qu'il veut, tant que c'est dans le respect des droits des autres. Je pense même que ça n'est pas sans avoir quelques vertus. Mais ce n'est pas ce que font les féministes, qui font du lobbying pour réduire la liberté d'expression, pour redistribuer la richesse des autres, etc. Par exemple, si des écrivaines se mettent à écrire des romans et des poèmes en écriture inclusive pour faire évoluer la langue, quelques soient leurs raisons, je n'y vois pas d'inconvénient, et si les usages finissent effectivement par changer, je les suivrais probablement. Par contre, que l'on cherche à légiférer sur les règles grammaticales que je dois respecter... Une subtilité que tout le monde ne saisi pas, est qu'alors que le bon sens comprends la discrimination comme un tort individuel, susceptible d'être commis envers n'importe qui (en admettant donc la possibilité de la mysandrie, même si c'est -peut-être- moins fréquent), le féminisme contemporain en a une compréhension tout à fait différente. Le sexisme devient une grille de lecture de la société et de l'Histoire tout entière, faisant de chaque chose, chaque mot, chaque règle grammaticale, chaque façon de s’asseoir, etc, un symptôme d'un sexisme structurel, dont tous les hommes sont coupables, et toutes les femmes victimes. Ce qui n'est pas sans similitude avec d'autres visions du monde, à base de juifs ou de koulaks... d'où une saine méfiance de la part des gens ici. Bien sûr, il y a des conditionnements sociaux, contingent culturellement, qui vont, par exemple, m'inciter à moins porter de rose que si j'étais une femme. Mais obéir à un stéréotype de genre n'implique pas nécessairement de persécuter qui que ce soit (tant que l'on a le droit de ne pas le faire, et que l'on accorde aussi ce droit aux autres). Et être libre, c'est en grande partie avoir le droit de chercher à coller aux stéréotypes que l'on veut.
  3. Au fait, ils n'ont pas des lois similaires, contre le harcèlement de rue, à Singapour ? J'ai cru comprendre que c'était assez "efficace", quelqu'un à un avis éclairé sur la situation de la cité au Merlion à ce sujet ?
  4. Il faut aussi rappeler qu'il ne défend la liberté d'expression que pour des raisons utilitaristes. C'est mieux que rien, mais...
  5. A chaque fois qu je date une gothique (nsfw) https://oglaf.lapin.org/index.php?number=458
  6. Sérieux ? Plus le droit d'être royaliste ? (il faudra que je prévienne le doyen de ma fac, qui est à l'AF et qui nous fait régulièrement l'éloge de Maurras dans le cadre de ses cours !) Je ne pense pas que les blancs aient grand chose à craindre, effectivement... A propos de la croyance commune selon laquelle la distinction entre l'homme et la femme est toute acquise : c'est une vue tout à fait vraisemblablement lorsque l'on est pas au fait de la recherche, et qui n'a qu'en parti tort (selon des proportions difficilement déterminable). Et je préfère que les gens croient ça plutôt qu'ils fassent le raccourci inverse : toutes les femmes sont ainsi, contrairement aux hommes, donc il faut faire ainsi etc. (il faut garder en tête que l'innéité de la chose admet toujours des exceptions, et qu'elle n'a pas de caractère normatif). Par contre, il y a une très grande différence entre ça, l'hypothèse que les comportements sexuels soient construits, le "fémitchourinisme", et là où veulent en venir les féministes : que cette construction soit mauvaise (bien que le mal soit sans doute une notion patriarcale) et qu'il faut tenter de l'abolir par des moyens étatiques (même si l'Etat est lui même patriarcal, "sexisme d'Etat", tout ça..).
  7. J'ai parfois essayé d'en discuter un peu au Québec, pour voir ce qu'on en disait, je n'ai pas eu droit à beaucoup plus que des "on ne peut pas se fier à un type qui porte un aussi gros turban". Donc je ne sais pas si c'est pour la bonne raison, mais dans ce coin là, ils ont l'air d'y être assez imperméable ! C'est plutôt un parti de l'ouest, non ? Par contre, au niveau provincial du Québec, je ne sais vraiment pas quoi penser du CAQ, qui a l'air d'être bien parti pour gagner. Les gens le voit comme centriste et pragmatique, mais m'a donné l'impression d'être un parti qu'on aurait peut-être qualifié d'extrême-droite ici (qui se dit "nationaliste" et qui met la priorité sur le voile et l'immigration), et qui m'a l'air assez dirigiste... Mais je ne suis pas assez renseigner pour savoir s'il y a de quoi s'inquiéter.
  8. Bon, du coup, que ce soit la faute à l'Etat ou non, création (massive ?) de déchets nucléaires, qui seront encore dangereux dans des millénaires, en sachant qu'il est très improbable que l'humanité puisse les surveiller sans interruption d'ici là, problème ou pas problème ? Un crime dont la victime n'existe pas encore compte-t-il comme un "crime sans victime" ? Ou alors je surestime le danger des déchets ?
  9. Pour ce qu'on en sait, il y en a eu un il y a deux milliards d'années, à une époque où il n'y avait pas encore de vie pluricellulaire (peut-être même pas encore d'eucaryotes), donc nos réacteurs ne sont pas non plus un événement si anodin que ça pour l'histoire de la vie... J'avoue faire parti des inquiets concernant les déchets nucléaires, même si j'ai confiance en la sécurité des centrales, et que je me rend bien compte de la nécessité de cette énergie pour satisfaire nos besoins actuels. Le problème est intéressant d'un point de vue éthique, car je trouve assez suspect de supposer une responsabilité morale envers les "générations futures", tout particulièrement celles des prochains millénaires, puisque l'on parle de gens qui n'existent pas encore, et qui n'existeront peut-être pas. Mais je suis tout de même bien content que nos ancêtres ne nous aient pas léguer d'aussi grosses merdes à surveiller. Je veux bien croire que l'Etat est responsable, mais j'aimerais un peu mieux en comprendre le mécanisme, pour le coup. Les alternatives, aux déchets plus acceptables, sont-elles vraiment viables ? N'ont-elles été refusées que par court-termisme de la part des décideurs ? (coût de recherche trop élevé, coût d'opportunité à ne pas stocker de trucs pendants des millénaires ignoré par le politique ?) En libéralie, les choses se seraient-elles vraiment mieux passés ? Et comment ? Le producteur de déchets qui s'engagent à les surveiller lui-même ? (en répercutant le coût sur ses consommateurs, le rendant moins compétitif ?) Il faut vraiment que les autres aient des moyens de pressions suffisamment fort pour l’empêcher de balancer ça à la mer, sans plus de précaution (ce qui pourrait vite devenir préoccupant).
  10. Et merde, je suis tombé amoureux de la doctorante de Peterson. C'est fou comme l'intelligence rend plus sexy que les cheveux bleus et les piercings. Sinon, je suis surpris de voir Peterson sauter aussi facilement des sciences de l'esprit "dures" et de la méthodologie qui va avec, à de l'herméneutique issue de Freud et de Jung. Est-ce qu'il s'est déjà prononcé sur la question du statut épistémologique de la psychanalyse ?
  11. Je ne sais pas si ce n'est vraiment qu'une question de care. On parle là de femmes économistes, elles devraient être capable de comprendre que l'anti-libéralisme est quelque chose d'oppressif et d'autoritaire... est-ce que ça s'accorde avec le care ? Est-ce que les femmes sont naturellement plus autoritaires que les hommes ? Si c'est le cas, ce serait une découverte intéressante. "Contrairement aux stéréotypes, les femmes sont plus paternalistes que les hommes !". Hop, un préjugé à la poubelle, je suis sûr que ça plaira aux féministes.
  12. A moins que la peine ne soit qu'un moyen pour quelque chose d'autre ? Réparer les torts commis, et protéger les potentielles futures victimes, notamment en dissuadant les potentiels futurs coupables, me semblent être plus légitimes. Le mal fait au coupable, proportionnel au crime, n'est guère plus que le maximum d'entrave à la liberté individuelle acceptable pour cela (parce qu'évidemment, on ne va pas prendre l'argent de quelqu'un qui n'a rien demandé pour rembourser une victime de vol, et on ne va pas non plus sévir sur des innocents pour protéger qui que ce soit, même à des fins préventives). Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de prendre en compte la soif de vengeance (et dans la mesure du possible, mieux vaut sans doute s'en abstenir).
  13. Je ne prétends pas que la prison soit une situation agréable, cependant, faire mal au coupable me semble encore moins prioritaire que de le rentabiliser (surtout si on cherche à désétatiser la justice au possible). Surtout si le coût de la peine est payé indirectement par la victime à travers les impôts. Et, à propos des coûts de mise au travail -c'est le moment où je passe pour un vrai monstre- je suis sûr qu'avec un tout petit peu d'imagination, et avec les technologies ou le "managment" approprié, on peut faire de bonnes affaires (collier électrique/abaissement provisoire de la qualité de vie -sans nuire à la santé- etc). Bien sûr, pour ça, restera à déterminer où s'arrête l'usus du maître, et où commence la nue-propriété du serviteur. Ce qui peut être modulé en fonction de la gravité du crime, évidemment.
  14. Disons, l'étape intermédiaire entre ça et l'esclavage. Et pas forcément d'intérêt "général" plutôt que particulier, je ne vois pas pourquoi l'usufruit sur le pénitent ne pourrait pas être vendu. Ah je ne sais pas, je vais me renseigner un peu. 1) C'est vrai, pourquoi pas. Après, est-ce que ce serait vraiment réalisable ? Je veux dire, si le pays d'expulsion est voisin, le criminel peut facilement revenir, et ça demande d'augmenter pas mal les coûts de surveillance et d'en ré-expulser en permanence. Et si c'est un pays plus éloigné, ça implique plus ou moins de leur payer le voyage... et de les priver du choix de où ils veulent aller. Ce que j'aime bien dans l'exil, c'est que le principe c'est "tu ne respectes pas les règles d'ici, alors, tu te barres, va faire ce que tu veux ailleurs". Mais j'ai l'impression que c'est plus approprié à un monde avec quelques cités-états dispersées qu'au monde actuel. 2) Évidemment, si on refuse la peine de mort, on refuse aussi le plein esclavage. C'est pourquoi j'imagine non pas une perte de la propriété de lui-même pour le criminel, mais seulement d'un usufruit. Il garde la nue-propriété de lui-même, et son usufruitier n'a pas le droit de le détruire ou de l’abîmer. Et puis, la durée de la servitude sera décidée en fonction du crime. 3) Je soupçonne l'esclavage d'avoir été plus productif qu'on ne le dit, mais dans tous les cas, ça reste plus rentable que de garder le type dans sa chambre.
  15. Ces temps ci, je me demande si la peine idéale ne serait pas une forme de servitude, à durée déterminée ou non. La prison est assez absurde, et je ne vois pas qui d'autres que l'Etat pourrait commettre un tel gaspillage. L'amande pose problème pour les insolvables. Les coups de cannes de Tramp favorisent les plus costaux. La peine de mort... j'ai du mal à me fixer les idées là dessus, mais même si on l'accepte, ça ne peut être qu'une peine exceptionnelle. L'exil est pas mal, mais il lèse ceux vers qui les criminels iront vivre. Par élimination, j'en vient à songer à l'esclavage. Ce n'est pas forcément disproportionné, dans la mesure ou un criminel est quelqu'un qui se rend coupable d'entraver la liberté d'autrui. Et de plus, toutes les peines sont, par définition, des restrictions de la liberté (et donc, d'une certaine façon, de la propriété d'eux même) des pénitents. Pourquoi, au sein de toutes les restrictions de libertés possibles, se limiter aux moins rentables ? Faire de quelqu'un le propriétaire d'un autre est peut être un peu extrême, mais lui en donner un usufruit, pour un certain temps, pourquoi pas ?
  16. Je me demande la même chose ! En tout cas, ce dernier extrait m'a bien fait sourire ! Il gagne quelques points dans mon estime. Dommage qu'il reste un protectionniste anti-arabe de base.
  17. HS total : ce qui serait intéressant aussi avec une justice-machine (ou, disons, avec une justice très fortement assistée par l'outil informatique), c'est que ça permet d'imaginer des blockchains d'ordinateurs-tribunaux, et avec eux, une justice autonome, complètement décentralisée, tout en étant la même pour tous.
  18. Schopenhauer laisse une jolie place aux idées platoniciennes dans son système !
  19. Bon, il me reste le dualisme et la question de la science (je suis en train de me trouver des prétextes pour ne pas bosser sur mon mémoire, tout ceci est le fruit de la procrastination) a propos du dualisme chez Descartes : c'est un vrai problème. Je crois qu'il s'en doutait lui même un peu. Mais c'est une aporie qu'il ne pouvait pas un seul instant envisager de résoudre en supprimant l'âme, comme son disciple Regius tentait de le faire (ce qui ne plût pas au maître...). Effectivement, la connaissance de l'âme comme chose venant avant la connaissance de tout le reste, et même de Dieu, dans l'ordre logique de la science, supprimer l'âme sans supprimer toute la science n'était pas possible dans son système. On peut au moins féliciter Descartes pour avoir éclairer ce problème, puisqu'effectivement, le problème corps-esprit est très loin d'être tranché aujourd'hui. C'est lui qui le premier nous a vraiment mis le nez face au mystère et aux problèmes multiples qui en découlent. Signalons que plusieurs solutions ont été proposés par les post-cartésiens : occasionnalisme des premiers d'entre eux (Malebranche notamment), mais aussi les systèmes remarquable de Spinoza et Leibniz. Contre eux tous, et contre les philosophes de l'esprit anglo-saxon contemporain, il me semble que la solution réside plutôt dans l'importance de distinguer la conscience comme présence des choses, plutôt que d'essayer de la comprendre comme si elle était une chose présente. Qu'aucun scientifique digne de ce nom n'ai suivit la méthode de Descartes, par contre, est une erreur. Il y en a au moins un qui l'a fait : Descartes lui-même ! Même si ce n'est pas la part la plus importante de son oeuvre, sa contribution scientifique n'est pas à négliger. Il est le père de la géométrie analytique, pour commencer (ce n'est pas pour rien qu'on parle de "coordonné cartésienne"), il est pour ainsi dire le premier à chercher à réduire la physique à quelques lois, formulées en langage mathématique (Galilée en avait le projet, mais c'est Descartes qui s'y colle), et il a aussi beaucoup participé à la recherche sur l'optique, sur l'astronomie, sur la médecine, etc... Je trouve assez injuste de rejeter la valeur d'un travail scientifique sous prétexte que la science a continuer son chemin depuis. Et pour finir, la science ne progresse certaine pas comme le proclame les empiristes, et comme Newton a prétendu le faire. Relisez la seconde préface de la critique de la raison pure, ou songer à la fable de Bacon : l'empiriste travail comme une fourmis, qui accumule mais ne créé pas, le rationaliste dogmatique, comme une araignée, qui tisse des théories uniquement à partir de lui même, mais qui sont stériles, le vrai chercheur travaille plutôt comme l'abeille, dont l'oeuvre est un mélange de ce qui vient d'elle même et de ce qui vient de l'extérieur. Bien souvent l'hypothèse et le raisonnement formel précèdent l'observation. Ils sont même la condition pour qu'une observation puisse avoir le moindre sens. Le cas de Einstein est particulièrement représentatif : si on regarde un peu le reste des recherches qui ont permis la découverte de la relativité, presque tout vient des maths pures. Il y a d'abord la découverte des géométries non-euclidiennes, chez Gauss entre autre, qui ne viennent sûrement pas d'une observation du monde, et que personnes ne s'attendait à pouvoir appliquer à la réalité, puis il y a les travaux, pures, toujours, de Poincaré, Lorentz, Hilbert... Einstein, le seul physicien de la bande (et sûrement pas le plus intelligent) n'a pour ainsi dire fait qu'appliquer tout ça à la nature, et ce n'est qu'ensuite, bien plus tard, qu'on a eu des confirmations empiriques de ses théories. Descartes a peut-être commis l'erreur d'être un peu trop "araignée", mais il en faut bien, pour rétablir l'équilibre, vu toutes ces fourmis qui pullulent. #sauvonslesabeilles Bon, voilà, fini pour aujourd'hui...
  20. A propos de Dieu : Descartes est très loin d'être mystique. Il est tout à fait possible d'être théiste et rationaliste ! D'ailleurs, alors que le rationalisme est la norme, l'athéisme est assez rares chez les philosophes, et les plus athées sont rarement les plus rationnels (qu'on songe à Nietzsche, Heidegger ou Sartre). La preuve ontologique est d'ailleurs un argument ultra-rationaliste, et très souvent (pour ne pas dire presque tout le temps) rejeté par les religieux pour cette raison. Difficile de trouver moins porté vers le mysticisme que Saint Anselme... Je rajoute aussi que cet argument est loin d'être aussi facilement réfutable que les débutants semblent le croire. Les objections du moine Gaunilo et de saint Thomas d'Aquin à Anselme étaient très faibles, il faut attendre la dialectique de la raison pure de Kant pour avoir une contre-argumentation digne de ce nom. Cependant, il faut signaler qu'il y a eu récemment plusieurs reformulations de l'argument qui semblent résister à Kant, par exemple, celle du grand mathématicien et logicien Kurt Gödel, et toute la famille des "arguments ontologiques modaux" issu de Hartshorne. Bref, le débat est très loin d'être clos. Mais le gros problème de ces arguments -pour les croyants- , outre le fait qu'il rende la révélation superflue, est que le Dieu dont l'existence est ainsi prouvée est n'est pas, comme le dit Pascal, "le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob", mais un simple principe premier, abstrait. Mais effectivement, chez Descartes, l'argument ontologique ne sert en quelque sorte que de confirmation de l'existence de Dieu, qui nous est d'abord donnée intuitivement. Je comprends que ça ait l'air un peu spécieux, mais ce n'est pas naïf : l'idée est que, en me découvrant moi même et ma propre existence comme première connaissance indubitable, ce qu je découvre est un être fini, à la puissance et à l'entendement limité. Étant moi même fini, je ne peux pas être la cause des choses infinis qui s'imposent à moi, contre ma volonté en plus. D'où la nécessité, lors de l'entreprise du doute, de supposer un "malin génie". En fait, Descartes est très classique ici (ce qui n'est pas une mauvaise chose) : une plus grande perfection ne peut pas venir d'une plus petite, l'être ne peut pas venir du manque. De la même façon que l'existence des qualités est subordonnés à celle des choses auxquelles elles sont attachés, ma propre existence, imparfaite, incapable d'être ultimement sa propre cause, implique l'existence préalable d'une autre substance parfaite. Je comprends que vous ne soyez pas d'accord avec ça, je ne vais pas chercher à vous le faire avaler, mais on ne peut pas rejeter ça comme irrationnel. Que la vérité en soit discutable, pourquoi pas, mais de là à dire que c'est évidemment faux... A propos du concept d'infini, en acte et en puissance, ne vous inquiété pas, Descartes avait sans doute lu Aristote beaucoup plus attentivement que nous ! Je ne serais même pas surpris qu'il l'ait connu pour ainsi dire par coeur. Est-ce utile de rappeler qu'il était le meilleurs étudiants du meilleurs collège de l'époque, alors que virtuellement rien d'autre que Aristote n'était enseigné ? Bref, c'est en toute connaissance de cause qu'il s'oppose à Aristote sur ce point. Je ne pourrais pas beaucoup en parler, malheureusement, ça m'échappe un peu, mais j'ai souvenir d'une prof, spécialiste de Descartes, qui m'expliquait que chez lui, ce n'était pas l'infini qui était une négation du fini, mais le fini qui était une négation de l'infini (qu'un mot soit négatif n'implique pas qu'il en aille de même pour le concept). Qu'il ne soit pas possible de se représenter mentalement l'infini n'est pas un argument contre ceci, Descartes, faisant clairement la distinction entre l'imagination et l'entendement. Songer à l'exemple du chiliogone, qu'il donne : je suis parfaitement incapable de me représenter mentalement une figure à mille angles, mais je n'ai aucune difficulté à la concevoir, et je pourrais sans trop de mal énoncer avec beaucoup de certitude des propositions la concernant. A propos des idées innées : ça part contre, c'est difficile à nier. La théorie selon laquelle toutes les idées viennent des sens est fausse, à la fois logiquement et empiriquement. Quelques petits rappels, pour commencer. Dédé est le premier à donner à "idée" son sens moderne, c'est à dire, d'une certaine façon, quelque chose "dans notre tête". Plus précisément, chez lui, une idée est un mode de la pensée, de la même façon que la figure est une mode de l'étendu. Les idées, toujours chez dédé, sont de trois sortes : il y a les "idées adventices", qui viennent des sens, les idées factices, que je fabrique par mon imagination, en assemblant, par exemple, un buste d'homme et un corps de cheval, et enfin, les idées innées, qui ne viennent pas des sens. Il ne donne pas de liste de celles-ci, mais nous dit qu'elles sont en petits nombres... j'imagine qu'on peut y compter les qualités sensibles premières, la pensée, l'étendu, la perfection... peut-être quelques autres, je ne sais pas. Il y a un argument classique de Locke contre les idées innées, mais il est inepte. Une idée innée, selon lui, devrait être explicitement connu dès la naissance, hors, même les principes logiques premiers sont appris à un moment ou un autre. Vous remarquerez qu'avec cette logique là, non seulement on tombe dans les gender studies, mais on peut même en venir à dire que les seins des femmes ne sont pas innées mais acquis puisqu'elles n'en avaient pas dans leur enfance. Leibniz expliquera, dans ses nouveaux essaies, que les sensations ne sont que les occasions de la perception des idées innées, mais en aucun cas leurs causes. Cependant, Descartes a manqué de précision à ce sujet. A propos des idées innées, il faudrait distinguer ce que l'on peut appeler les dispositions innées de la pensées, de ce que l'on doit plutôt appeler les principes premiers de la connaissances. Les premiers sont simplement des faits cérébraux et cognitifs, aujourd'hui assez bien documentés, par exemple, que nous avons une disposition innée à reconnaître les visages (et ce avant même la naissance). Les seconds sont les conditions transcendantal de tout le reste. Se passer d'eux mènent à vouloir faire une théorie de la connaissance uniquement descriptive (que ce soit une description du cerveau, de fait psychique, d'histoire, de culture, ou autre), ce qui est auto-contradictoire, puisqu'une telle théorie serait incapable de distinguer entre un raisonnement valide d'un raisonnement invalide, qui sont l'un autant que l'autre des "faits" dignes d'être décrit. Une telle gnoséologie se retrouverait donc à ne plus avoir le moindre moyen de justifier sa propre validité ou sa supériorité par rapport à n'importe quelle autre théorie. Les "vraies" idées innées, transcendantales, sont donc non pas des faits naturels, mais plutôt des normes éternelles de la pensées. Une faiblesse de Descartes est de ne pas avoir distinguer l'innéité naturelle de la connaissance a priori, mais il a tout de même eu le mérite de donner à sa théorie un fondement ailleurs que dans le divers sensible, ce qui est une impasse. Par contre, reste un problème avec le Dieu le Descartes : c'est qu'effectivement, ni son existence, ni sa supposée bonté ne prouvent vraiment l'existence d'un monde extérieur, comme Leibniz le remarquera. On peut, par charité, essayer de rapprocher l'argument cartésien selon lequel le principe de ma connaissance des choses, qui est aussi le principe de leur existence (Dieu), ne peut pas être entièrement trompeur, de l'argument selon lequel il est vain de douter de tout, et qu'il faut considérer que tout est au moins à peu près réel. Mais c'est très faible, dans tous les cas.
  21. Je rajoute, à propos de ce que j'ai dit précédemment, que tout ceci est aussi en accord avec la position de l'auteur sur à qui doit revenir la charge de la preuve. C'est à celui qui pose l'existence de Dieu d'apporter des preuves, soit. Dans ce cas, c'est à la position de l'existence du monde d'en apporter. Sous ce rapport, celui qui envisage que le monde n'existe pas est dans la même position que celui qui affirme l'inexistence de Dieu. Tout le problème est, lorsque quelqu'un doute du monde, où peut-on trouver le moindre argument susceptible de le convaincre ? Chercher à convaincre un solipsiste de l'existence du monde en lui montrant des choses mondaines est exactement équivalent à chercher à convaincre un athée en se référent à l'autorité de la Bible, c'est tout à fait circulaire. Descartes pense justement trouver un tel fondement (lui même n'est pas solipsiste, loin de là, au contraire, il n'envisage cette position que pour trouver des manières de la réfuter). Qu'il y ait justement un fondement coupe court à l'argument selon lequel son doute n'est pas possible car absolu, car portant sur chaque chose : il y a bien une chose qui résiste au doute chez lui, c'est le fameux cogito. Cette certitude de ma propre existence n'est pas une certitude logique, déduite, comme le laisse sous entendre l'auteur de l'article lorsqu'il affirme que l'hypothèse du malin génie devrait me faire douter de ma propre existence. C'est Mersenne, je crois, qui reprochait déjà au "je pense donc je suis" de ne pas valoir plus que "je me promène, donc je suis". C'est en fait quelque chose de tout à fait différent, le "je" n'étant pas une simple fonction grammaticale ici. Le "je" de "je pense" est une évidence première apodictique, qui est supposée même par l'activité de douter. On voit que l'argument du doute devant reposer sur une certitude est encore une fois très cartésien : Descartes montre qu'on peut étendre ce doute très loin, même à la nature toute entière (il est effectivement possible que je sois dans la matrice comme Néo, aussi improbable que cela soit), mais qu'il y a toujours une certitude qui reste, et que celle-ci est justement la certitude de moi -même, doutant. Il faut aussi distinguer l'ego cartésien de la "conscience". On a trop souvent tendance, quand on parle du "sujet" philosophique, à superposer la substance pensante cartésienne, la conscience des empiristes, et le sujet transcendantal de Kant et des idéalistes. Il s'agit de concepts tout à fait différents. La "substance pensante", chez Descartes, est justement une substance, c'est à dire une chose, qui existe par elle même (par opposition à un attribut ou un mode). La notion de "conscience" est introduite par Locke, justement pour désubstantialiser la subjectivité, pour ne pas faire (sans justification) de ma perception des choses une chose elle-même. Mais cette conscience uniquement empirique, comme l’apercevra Hume, mène à un scepticisme et à un héraclitéisme radical, pour lequel "je" n'existe même plus, chaque nouvelle perception étant déliée des précédentes. Il la compare à un théâtre, sur lequel les comédiens vont et viennent. C'est Kant qui ensuite va mettre en lumière que même sans substantialiser le sujet (ce contre quoi il met bien en garde dans les paralogismes de la raison pure), il y a d'une certaine façon une permanence, pour ne pas aller plus loin que la métaphore : même si au théâtre, les comédiens vont et viennent, ils vont et viennent bien sur la même scène. C'est le sujet transcendantal, qui n'est pas "quelque chose", (sûrement pas une âme éternelle, "transcendantal" ne signifiant pas "transcendant"), mais qui est la présence même des choses à soi. On peut reprocher à Descartes d'avoir trop vite considéré comme une "chose" son évidence première, mais contre ses premiers adversaires, les empiristes, il faut lui accorder d'avoir mieux qu'eux su préserver l'unité et la singularité du sujet. Autre chose très importante : la substance pensante n'est pas chez Descartes la cause de l'existence du monde. Il faut distinguer causa essendi de causa cognoscendi. La connaissance du monde est subordonnée à ma connaissance de moi même, mais c'est une antériorité seulement épistémologique, pas ontologique. La cause de l'existence du monde, chez Dédé, c'est Dieu. (chez Descartes)
  22. Oulà, mais quelle méchanceté là dedans ! Descartes pas rationnel ?! J'ai mal à ma France ! Bon, je ne suis pas cartésien. Je suis pire encore, sur le plan spéculatif, je suis platonicien. Même si j'ai une interprétation un peu personnelle de Platon (comme tous les platoniciens, en fait), influencé par Kant et Husserl dans mon cas. Mais bon, le devoir m'appelle, et je vais donc voler au secours de Dédé. Alors, pour commencer, le plus important est de bien comprendre le caractère volontairement artificiel et exagéré du doute cartésien. Descartes n'est pas un sceptique, et il n'est pas à l'origine du scepticisme moderne (pour ça, il faudrait plutôt chercher chez Montaigne, chez La Mothe le Vayer, etc), au contraire, il s'oppose à eux, et leur reproche justement le caractère superficiel et infondé de leur doute. Le doute méthodique s'en distingue en tant qu'il n'est qu'un instrument, et surtout, un instrument provisoire, jetable. Il dit bien que le philosophe doit douter "une fois dans sa vie etc" une fois, et une seule ! Le constat de départ de Descartes, avec lequel il est difficile d'être en désaccord, est que nos soit-disant "connaissances" actuelles, mais plus encore celles de son époque, sont obscures et confuses. C'est à dire que l'on ne comprend pas très bien ce que sont par elles-mêmes les choses que l'on prétend connaître (c'est l'obscurité, par opposition à la clarté), et que l'on est pas toujours tout à fait capable de bien voir la différence entre les unes et les autres (c'est la confusion, par opposition à la distinction). Le but de Descartes, qui est sans doute un idéal nécessaire à la science, est de faire en sorte que toutes nos connaissances soient claires et distinctes. Bon, en tant que type du XXIs, et surtout en tant que platonicien, je suis bien forcé de reconnaître qu'en ce qui concerne les choses de la nature, ce ne sera sans doute jamais le cas (pour les maths et les sciences pures, c'est plus compliqué). Mais il me semble que ça doit toujours tout de même servir de but à la recherche, même si c'est asymptotique. Je ferme cette parenthèse. Descartes pensait lui que la clarté et la distinction était tout à fait atteignable, et était à portées de main si on avait une méthode suffisamment rigoureuse. Cette méthode consiste à descendre jusqu'aux fondements, jusqu'aux éléments les plus simples et les plus indubitables, pour ensuite remonter jusqu'aux plus complexes. L'idée étant qu'une prétendue connaissance des choses complexes sans connaissance des composées plus simples ne peut être qu'une supercherie, ou une approximation. Remarquez que c'est la position que beaucoup d'entre vous avez sur beaucoup de sujets : à propos de la macro-économie, par exemple. Prétendre connaître des relations entre des agrégats sans s'appuyer sur des principes micro-économiques claires vous fait grincer des dents, et vous avez bien raison. Ou encore, à propos des modèles climatologiques, même chose, on prétend avec eux connaître des choses très complexes, mais est-ce que ça a vraiment la moindre valeur vu notre état d'ignorance de tout ce qui compose le très complexe phénomène du climat ? Descartes ne fait que généraliser ce principe à la science toute entière. Il faut des fondements simples et bien connus, autrement, tout est spécieux. C'est à ceci que sert le doute hyperbolique. Descartes est bien conscient qu'il révoque en doute des choses extrêmement probables, et il n'espère pas convaincre qui que ce soit qu'il est en train de dormir. Ce n'est pas son but. Il s'agit de se faire violence à soi même, c'est, d'une certaine façon, non pas l'entendement, mais la volonté qui doute. Petit rappel conceptuel : chez Dédé, l'âme a deux facultés, la volonté et l'entendement. L'entendement est fini et limité, mais la volonté est infini. Le doute total ne peut donc être que le fait de la volonté, et il me semble qu'il emploie souvent le mot "résolument", ou des mots similaires, pour décrire l'entreprise du doute. Il est effectivement extrêmement improbable que rien n'existe, qu'un démon se joue de moi, etc, tout ceci n'est pas nié. Cependant, si j'ai la moindre possibilité d'avoir un doute au sujet de quelque chose, alors ma connaissance de ce quelque chose n'est pas aussi claire et distincte qu'elle le pourrait. D'où ce doute sur-joué, qui est nécessaire pour trouver un fondement à une science qui en sera vraiment une, du début à la fin. Bien sûr, on peut douter de la possibilité d'un tel état d'achèvement de la recherche scientifique, mais on ne peut pas vraiment reprocher à Descartes de le vérifier. C'est un effort assez héroïque de sa part, en fait, même si ça se termine de la même façon que les efforts héroïques des tragédies grecques. Descartes n'auraient sans doute pas été en désaccord avec cette idée selon laquelle le doute n'est possible que par rapport à une certitude. C'est justement la clef de ses reproches aux sceptiques. Et c'est aussi ce qui lui sert, tacitement, de garantie que son doute méthodique le mènera quelque part, puisqu'en doutant de tout ce qu'il est possible de douter, il sera nécessairement reconduit à l'indubitable. Indubitable qu'il connaissait déjà, bien entendu, mais de façon implicite, et sans avoir fondé sur lui le reste de sa science, comme il le faudrait. Je reviens à la charge avec d'autres posts pour les chapitres suivants (désolé d'avance pour les posts multiples)
  23. En tout cas, contrairement à d'autres, il aura intérêt à dire pourquoi il est emprisonné s'il veut ramasser la savonnette en toute sécurité.
  24. A oui ? J'y vois surtout une expérimentation de la monnaie fiat et d'un inflationnisme sauvage pour liquider les dettes d'Etat. Donc une pratique qui ressemblent à celles prônées par les keynésiens (pour ce que j'en comprends), même si effectivement, sans la théorie qui va derrière, parler de keynésianisme est inapproprié.
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