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Mégille

Tribun de la Plèbe
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Tout ce qui a été posté par Mégille

  1. Toutes ces incohérences, c'est magnifique. Par ex falso quodlibet, on pourrait vraiment faire de n'importe quoi la préférence des français.
  2. "la maladie provoquée par le virus Covid-19". Nope, ça c'est la maladie justement, le virus s'appelle sars-cov2. Ca fait un peu amateur.
  3. Mégille

    Pandememe

    Ce qui ouvre la question : dans le sud-ouest, prend-t-on sa troisième /dɔz/ ?
  4. Je me remettrai à envisager de rentrer au Canada quand les canadiens auront cessés d'être encore plus covidément que les français. Et la nature est quand même plus propice aux humains en France. Et, avouons le, les suisses ne sont pas très funs. Quant au reste du monde, je ne sais pas si me lancer en start-up offshore digital bédouin au large du Panama soit le meilleur plan d'avenir possible pour moi, prof de philo. Même en transformant mes cours en nft.
  5. Je savais que l'abandon de nouveaux nés avait au moins occasionnellement lieu en Grèce archaïque, mais TIL que c'était en fait une pratique très importante dans toute l'antiquité gréco-romaine : https://www.cairn.info/revue-enfances-et-psy-2009-3-page-19.htm D'ailleurs, je me demande si les spécificités culturelles des grecs et des romains en matière de sexe, l'institutionnalisation ou la tolérance de l'homosexualité masculine et le mariage monogame (non pas que ces deux choses là ne se trouvent pas aussi dans d'autres cultures, mais elles sont tout de même l'exception plus que la règle) ne sont pas dues à ce gros déséquilibre du sex ratio.
  6. Attention, il n'est pas libéral, hein. Il l'est tout au plus un peu plus que Hobbes, mais il y a encore du chemin avant Locke.
  7. Non, il y a aussi Frédéric Lenoir, qui est plutôt à ranger dans le rayon développement personnel !
  8. Je n'ai peut-être lu que les écrits les plus extrêmes, mais il me semble que le féminisme de deuxième vague était beaucoup plus radical et antagonisant que celui d'aujourd'hui. Ce qui distingue la troisième vague de la deuxième est essentiellement trois choses : la tendance pro-sex, le post-structuralisme et l'intersectionnalité (trois choses conceptuellement différentes bien que dans les faits défendues par les mêmes personnes). La rupture entre les vagues a eu lieu dans les années 80 lors des "feminist sex wars". Les anciennes, les orthodoxes de la deuxième vague, s'opposaient au travail du sexe, au bdsm (même entre femmes), et parfois au sexe hétérosexuel, jugeant tout ça intrinsèquement oppressif et inséparable du patriarcat. La nouvelle garde, "pro-sex", celles qui deviendront la troisième vague, étaient du coté libéral sur tous ces sujets. Le post-structuralisme de Butler, qui s'est ensuite mis à plus ou moins faire autorité même si personne ne le comprend très bien, est essentiellement une relativisation des structures de domination dont l'identification servaient justement à construire un antagonisme entre les sexes lors de la deuxième vague. Imaginer que quelqu'un débarque à gauche et se mette à raconter que la lutte des classes est une approximation, qu'il y a autant de façons d'être bourgeois ou prolétaire qu'il y a de bourgeois et de prolétaires et qu'il est tout à fait possible de n'être ni l'un ni l'autre, pour ensuite remettre en cause le concept même de "capitalisme". Et bien c'est exactement ce que fait Butler, avec homme/femme/patriarcat en lieu et place de bourgeois/prolo/capitalisme (l'analogie avec le marxisme était très populaire dans la seconde vague). Je ne sais pas si on peut qualifier ça de libéral, mais c'est clairement à notre avantage. L'intersectionnalité de Crenshaw par contre consiste bien, à première vue, en une consolidation et une complexification du modèle "structuraliste", en croisant les structures de domination sexiste et raciste. Mais ça a été fait sans grande rigueur, et pour Crenshaw, concrètement, principalement en vue de demander à ce qu'il y ait un peu plus de femmes de couleur parmi les cadres de general motors. Paie ton antagonsime.
  9. Une amie a tentée de me proposer une réfutation du libertarianisme en en tirant la conclusion qu'un nouveau née devrait être la propriété privée de sa mère. Evidemment, je lui ai sorti Rothbard, Ethics of Liberty p138 avant qu'elle n'ait le temps de finir sa phrase. La malheureuse ignorait que les libertariens ont trouvé une stratégie imparable contre les arguments par l'absurde : accepter "l'absurde" !
  10. Je ne suis pas l'actualité du parlement européen. La politique intérieure des autres membres s'y invite-t-elle aussi ?
  11. Bienvenue ! J'ai toujours été perplexe face à l'attaque du libéralisme à travers les attaques contre le libre-arbitre. Il n'y a pas vraiment de rapport. Plus surprenant encore, ceux qui avancent cet argument ne voient aucun problème à défendre par ailleurs la liberté politique (i.e. la démocratie). Je pense qu'il s'agit d'un argument fondamentalement soit malhonnête, soit stupide, soit les deux. D'ailleurs politiquement, Spinoza était lui-même n'était pas foncièrement anti-libéral (n'en déplaise à la tradition spino-marxiste française). Il est une sorte d'étape intermédiaire entre Hobbes et Locke. Et le parti dont il était proche, celui de Johann DeWitt et de Pieter de la Court, était franchement libéral.
  12. Remarquez qu'un jeu vidéo south park l'avait fait, avec la couleur de peau du personnage du joueur en guise de niveau de difficulté. Sauf qu'avec eux c'était drôle.
  13. Oui, enfin, il y a des chances que le vrai rapport de cause à effet soit moins réjouissant pour nous, et passe par la corrélation entre protestantisme et développement du capitalisme.
  14. Oh, à personne de bien précis, ou à aucune personnalité ou groupe connu en tout cas. Seulement à quelques hippies vaguement amateurs de taoïsme (enfin, qui ont entendu parlé du daodejing, qui ont un Aum tatoué sur l'avant-bras et qui te parlent d'ayahuasca lorsqu'ils te rencontrent, cette faune là quoi) qui sont par ailleurs anti-libéraux par écologisme ou par anticapitalisme maladroit. Hm... attention, possible wall of text incoming, mais c'est plus compliqué que ça. Même leur anti-autoritarisme n'est pas si évident. La plus ancienne référence au texte du Laozi/Daodejing et les premiers éléments de commentaire qu'on en a sont les livres VI et VII du Hanfeizi, qui en fait essentiellement un guide à l'égard du prince pour se maintenir au pouvoir. Il est question d'une sorte d'ascèse que doit s'imposer le prince à cette fin très pragmatique/proto-machiavélienne, consistant à être aussi neutre et "inactif" que possible, mais pas au point de rendre l'état libéral. Il s'agit pour lui plutôt de savoir déléguer les tâches à d'autres plus qualifiés que soi, tout en se montrant impartial entre eux pour éviter de se laisser entraîner par les conflits entre ses subordonnés. La plus ancienne lecture dont on ait une trace du Laozi a donc été une sorte d'éloge du modèle bureaucratique de l'état (sans jamais parler de restreindre le pouvoir de celui-ci). On repassera pour l'anarchisme ou le libéralisme. Quand à ce qu'en pensaient les auteurs du Laozi et du Zhuangzi eux-mêmes... C'est un exercice ardu, et un peu vain, puisque ces deux livres sont des ouvrages collectifs composés sur d'assez longue période et fixés définitivement des siècles plus tard. Du Zhuangzi, dont une partie est peut-être vraiment attribuable à un auteur du même nom, semble ressortir une tendance individualiste et apolitique, mais quiétiste et sans l'élément de rébellion qui pourrait nous faire parler d'anarchisme. Dans le Laozi, on a un éloge d'un pouvoir qui agit peu, mais aussi d'une société égalitaire, pauvre et peu éduquée, protégés du vice et des conflits pour ces raisons là. Le chapitre 3 va même jusqu'à vanter cette pauvreté et cette absence d'éducation du peuple comme utile au prince qui voudrait diriger sa population plus facilement, par moins d'effort. Toujours pas très libéral, ou même très anar, tout ça. (ceci dit, ce chapitre ne se trouve pas dans la plus ancienne version du texte que l'on a, celle de la tombe du Guodian, mais il en va de même pour environ les 2/3 du livre, et ça reste assez cohérent avec les chapitres plus anciens). Mais de toute façon, le caractère énigmatique de ces textes (ne pouvant pas être dissipée par les spéculations concernant l'intention d'un auteur, puisqu'il n'y a pas d'auteur unique) fait qu'on ne peut pas les comprendre indépendamment de leurs contextes et des lectures qui en ont été faites successivement. Après la lecture proto-machiavélienne du Laozi par Hanfeizi, on a eu la mise de ce texte au centre du courant de pensée éclectique du Huanglao au début de la période impériale. Vu qu'il s'agissait littéralement d'une idéologie d'état visant à justifier le pouvoir en place, on ne peut pas vraiment parler d'anarchisme... ceci dit il y avait effectivement un coté plutôt assez libéral. Mais même si la non-action de l'empereur consistait en partie en une non-intervention de l'état dans la société (surtout comparé à ce qui s'est fait à partir de Han Wudi), elle consistait aussi à laisser la bureaucratie tourner toute seule. Concrètement, ça avait aussi consister à laisser l'impératrice Lü, puis l'impératrice Dou (toutes deux grandes défenseuses du Huanglao) régner dans l'ombre. Et si Wudi, celui qui a rompu avec le Huanglao pour mettre le confucianisme à la mode, était effectivement beaucoup plus interventionniste que ces prédécesseurs, il n'est pas évident que ce soit à imputer au confucianisme (il semblerait qu'il l'ait défendu seulement pour avoir le soutient de la petite bureaucratie et se court-circuiter le sommet de la hiérarchie, taoïste, et contrôlé par sa grand-mère Dou). Les confucianistes de l'époque de Wudi reprochaient aux taoïstes (c'est à dire, aux partisans du huanglao) de donner autant de place à l'intervention et à la violence qu'à la paix en mettant yin et yang sur le même plan, alors que les confucianistes eux étaient pour mettre le yang au dessus et éviter autant que possible la coercition. Et de fait, lors de la controverse du fer et du sel, les "libéraux", malgré leur usage de la notion lao-iste de "wuwei", se revendiquaient de l'autorité de Confucius. On a un taoïsme philosophique, et qui cette fois peut sembler anarchiste par moment, qui apparaît au deuxième siècle CE avec le Xuanxue (étude du mystère) et avec les "sept sage de la bambouseraie". Et c'est du xuanxue que viennent les éditions du Laozi et du Zhuangzi d'où proviennent nos traductions occidentales, d'où peut-être la lecture qu'on tend à en avoir. Toutefois, trois petits détails ne doivent pas être ignorés à propos du Xuanxue et de la lecture du Laozi qui en a suivit : 1) son coté apolitique (qu'on peut tant bien que mal prendre comme un anti-autoritarisme) est en rupture radicale avec la façon dont on l'avait toujours lu auparavant, 2) au moins pour Wang Bi (l'éditeur et commentateur du Laozi) et les premiers philosophes du xuanxue, ce "taoïsme philosophique" était en fait seulement un approfondissement du confucianisme et une réflexion sur son fondement. Ironiquement, on peut considérer le "taoïsme philosophique" comme une branche du confucianisme. 3) Ca n'a pas eu beaucoup de postérité en Chine. C'est à partir de l'édition de Wang Bi qu'on a traduit le Laozi, mais sans doute simplement parce que c'était la seule respectable aux yeux des mandarins confucianistes. les taoïstes chinois ont toujours préférés l'édition et le commentaire de Heshangong, encore fortement influencé par le Huanglao. Ce taoisme philosophique et anti-autoritaire est un objet d'étude, assez circonscrit dans le temps (autour de l'effondrement de la dynastie Han) plus qu'un courant de pensée vif. C'est à peu près au même moment que le taoïsme "philosophique" (entendons non-politique/anti-politique) qu'apparaît le taoïsme "religieux" en Chine, avec les turbans jaunes et les maîtres célestes. Mais ce nouveau taoïsme reste initialement extrêmement politique (et étatiste). Il se distingue de l'ancien par l'ajout de nouvelles superstitions/croyances surnaturelles sur le vieux Huanglao. Mais les turbans jaunes cherchaient avant tout à prendre le pouvoir par une révolution, et les maîtres célestes étaient d'abord essentiellement une sorte d'empire dans l'empire, avec une bureaucratie, des impôts, une redistribution, des travaux publics... Encore une fois, ce n'est pas tout à fait ce que l'on pourrait qualifier de libéralisme ou d'anarchisme. Et c'est de ces mêmes maîtres célestes, après une influence du bouddhisme et l'ajout de nouvelles croyances populaires chinoises, et après avoir encore une fois été une idéologie d'état sous les Tang, qu'est issu ce qu'est aujourd'hui le taoïsme. tl;dr : non, le taoïsme n'est pas par essence anti-autoritaire.
  15. Mégille

    Actualité Covid-19

    Il y a effectivement une forte augmentation de pour ainsi dire toutes les IST (sauf le VIH pour l'instant) chez les jeunes. Au moins en parti en cause, une grosse baisse du taux de dépistage depuis 2020.
  16. Il me semble aussi que même si le concours impérial était beaucoup trop difficile (au point d'en être presque aléatoire, avec moins de un pour mille de chance de succès) pour qu'il soit probable d'avoir un mandarin fils d'un autre, si on regarde en détail, la plupart des mandarins étaient tout de même neveu ou cousin d'un autre. Il aurait donc bel et bien eu une classe sociale héréditaire au pouvoir, qui vivait des privilèges accordés aux quelques uns d'entres eux qui obtenaient des pouvoirs par le concours. (ou du moins, il me semble l'avoir entendu dans un mooc, probablement chinaX de harvardX sur edX -ils aiment beaucoup les X). D'ailleurs, si tu es sinophile et intéressé par les croisements et les parallélismes entre la pensée politique chinoise et notre libéralisme, as-tu lu les documents de la Controverse du sel et du fer ? Au IIème s bce, Han Wudi avait nationalisé le sel, le fer, et brièvement l'alcool, afin de financer ses guerres de conquête. S'en était suivi des controverses chez les mandarins au cours desquels on a vu quelques arguments libéraux être proposés. Et je trouve très drôle (et propre à bien troller quelques personnes) que la notion de "wuwei" ait littéralement pris le sens de "laissez faire, laissez passer" en économie avant d'avoir le sens un peu plus abstrait et métaphysique qu'on lui prête depuis Wang Bi. Une traduction anglaise traîne ici, si jamais : http://www2.iath.virginia.edu/saxon/servlet/SaxonServlet?source=xwomen/texts/yantie.xml&style=xwomen/xsl/dynaxml.xsl&doc.view=tocc&chunk.id=tpage&toc.depth=1&toc.id=d2.24&doc.lang=english
  17. C'est le moment de faire un crossover "les jokes de papa" X "jackass" à Pyongyang.
  18. Toujours sur le point 4, son histoire de droit de propriété sur les données me semble être une usine à gaz, en plus d'être philosophiquement douteux. Puis-je exiger réparation à ma boulangère si celle-ci me "vole" des informations à mon sujet en se souvenant de mes préférences alimentaires ? Je veux bien qu'il y ait un rapport asymétrique, et dû à des causes illégitimes, entre les individus et google, facebook, microsoft et quelques autres, mais il s'attaque aux symptômes. Bon, je me doute que proposer une abolition de la propriété intellectuelle, de la responsabilité limitée et de la monnaie fiat irait un peu loin pour un programme politique, et poserait quelques problèmes internationaux. Mais on peut aussi imaginer des choses beaucoup plus humble, par exemple, passer les ordinateurs de la fonction publique sous linux, mozilla (ou mieux) et duckduckgo, et donc y familiariser les jeunes (si on a toujours pas aboli l'ednat).
  19. A noter que dans Le Politique, Platon propose une typologie des régimes similaires à celle d'Aristote, mais après avoir remarqué qu'il manque un mot pour pouvoir distinguer le "bon" du "mauvais" régime de la majorité (respectivement, moins bon des bons régimes et moins mauvais des mauvais régimes), il fait le choix de les englober tous les deux sous le nom de "démocratie". C'est sans doute la connotation trop négative à l'époque de "démocratie" qui pousse Aristote à inventer un nom pour un régime de la majorité théoriquement bon (mais il faut remarquer qu'il utilise ailleurs "politeia" pour désigner un régime mixte, qui mélange des éléments de plusieurs autres régimes). On peut imaginer que ce qui a poussé Polybe à chercher un nouveau nom cette fois pour le mauvais régime de la majorité a été le respect pour l'Athènes classique et donc pour le terme de "démocratie". Il faudrait aussi remarquer que contrairement à ce que l'on a chez Hérodote, Aristote ou Polybe (ou chez Platon dans Le Politique), ce n'est pas tant une typologie des formes institutionnelles de gouvernement qu'une sorte de classification de l'esprit général des régimes et des personnalités individuelles qui y correspondent. On encore, du rapport de force entre les différentes parties de l'âme/les différentes parties de la cité. D'où la présence de la timocratie, et l'absence de la monarchie. Yup. Qu'il soit utopiste, communiste et féministe ne l'empêche pas d'être conservateur, à sa façon. Ce qui ressort du Timée et du Critias est bel et bien une vision décliniste du monde comparable à celle d'Hésiode. Après un premier âge, proche de la création du monde et donc assez conforme aux réalités idéales à l'image desquelles le monde venait d'être créé, s'en suit un inéluctable déclin (au début du Timée, il imagine que la très ancienne Athènes était conforme au modèle de sa République), plus (comme son Atlantide) ou moins (comme l'Egypte) rapide. Tout comme face à la foule le sophiste l'emporte toujours sur le philosophe, et tout comme ce qui est généré est promis à la vieillesse et à la mort, le monde sensible se décompose inévitablement. D'ailleurs, il a sans doute interrompu sa rédaction du Critias en s'apercevant que faire citer la seconde loi de la thermodynamique à Zeus aurait été un anachronisme. Comme je l'ai dit, on a bien un modèle cyclique de l'univers dans le mythe du Politique, mais il vient de l'extérieur du cours naturels des choses, lors que Dieu vient remonter le monde comme un ressors une fois que tout c'est cassé la gueule. (on a aussi l'évocation de cycle dans la nature/dans la course des âmes dans le Phédon et dans le Phèdre, mais il n'en tire aucune conclusion politique). On remarque aussi que le seul ouvrage dans lequel il présente un programme précis et pratique, Les Lois, il envisage de ne les faire appliquer que dans une nouvelle colonie, créée à partir de rien et avec des colons triés sur le volet. Transformer une cité déjà existante à coup de réformes ne lui passe même pas par la tête. Et sa soigneuse élaboration des institutions de la cité des Lois semble avoir eu pour principal objectif d'y freiner autant que possible toute forme de changement, c'est à dire de corruption. Alors, il a peut-être "milité" auprès des tyrans de Syracuse pour faire appliquer ses idées (si on en croit ses biographes), mais nulle part il n'a écrit qu'un tel projet avait la moindre chance d'aboutir. Sans intervention divine, il y a tout au plus la République qui permet d'imaginer que contre toute attente le démocratie puisse basculer dans une direction inattendue, mais ce n'est pas dit explicitement. Si ses missions en Sicile ont bien eu lieu, il s'y est sans doute rendu à la façon d'un héros tragique, par sens du devoir, mais en sachant que ses efforts étaient promis à l'échec. Pour moi ce passage indique que l'individu peut suivre la voie du déclin ou au contraire celle de la restauration. De plus, le point de vue constructiviste de Platon (il compare l'établissement des lois de la cité à l’œuvre d'un peintre qui trace des lignes sur le sable), s'accorde mal avec l'idée d'un déclin irréversible. Sinon d'un point de vue historique, je pense pas que Platon ignore l'existence des Tyrannoctones qui a vu par la suite la fin de la tyrannie à Athènes et l'établissement de la démocratie (certes ce n'est pas direct et il y a eu des intermédiaires entre les deux) mais je serais donc d'avis que Platon ne pense pas qu'un retour en arrière n'est pas possible. Comme je l'ai dit, c'est en contradiction non seulement avec le plus gros de la République, mais aussi avec le Politique, le Timée, le Critias et les Lois. Il y a une part d'imprévisible et de hasard en ce bas monde pour Platon (il envisage même qu'une jument puisse donner naissance à un boeuf de temps en temps, après tout pourquoi pas...). Mais les rares individus qui naissent avec une âme aristocratique dans une cité corrompue peuvent s'agiter un peu si ça les amuse, mais au final, le mieux qu'ils puissent faire est de se réunir dans un jardin loin du centre ville et se consacrer à la philosophie. Et je serais très surpris que Platon, issu d'une des plus grandes familles athéniennes, et fier de descendre de Solon, n'ait pas connu son histoire. Et puis, il a lui-même vu une oligarchie (les 30) s'établir lorsqu'il avait 25 ans, puis vu celle-ci se transformer en une tyrannie dirigée par son propre oncle, puis vu celle-ci s'effondrer et la démocratie être restaurée. Il ne pouvait donc pas ignorer les aléas de la politique réelle. Mais sa vision concernant le sens général des choses (peut-être sur le long terme) ne fait pas de doute. Alors, c'est encore un peu plus subtil que ça, puisque la cité de la République n'est elle-même idéale que *étant donné* un certain degré préalable de corruption. La première cité parfaite qu'il imagine est en fait une société ancap, où la division des tâches est permise par le commerce (dans Rep II de 369c à 372e), mais qui garde un niveau de développement assez humble. Dans celle-ci, la justice ne consisterait qu'en "quelque usage de ces biens que font les hommes dans leurs relations entre eux" (372c). Ce n'est que dans une cité "parvenue au luxe", "gonflée d'humeurs", par opposition à la précédente, seule véritablement en bonne santé (373e), que les individus risquent de devenir violents les uns envers les autres, et ce n'est qu'une fois qu'on en est là que l'autoritarisme devient nécessaire aux yeux de Platon.
  20. Ce qui me dérange moi est l'absence de mise à jour de nos connaissances sur les effets secondaires. On s'est visiblement bien trompé sur son efficacité contre la transmission... mais pour les risques, y compris après de multiples doses, on a tout juste, sans le moindre soupçon ?
  21. Chez Platon on a seulement un processus de déclin (aristocratie -> timocratie -> oligarchie -> démocratie -> tyrannie). A aucun moment il ne parle de retour à la case départ. Si on fait confiance à ses biographes (quelques siècles plus tard) il a effectivement tenté de convertir des tyrans (sans succès), mais dans le texte République, ce serait plutôt à partir de la démocratie, qui contient des germes d'à peu près tous les régimes possibles, qu'il pourrait y avoir une petite chance de suivre un autre chemin. On a quelque chose comme un cycle dans Le Politique, mais c'est de l'ordre du mythe, et ça demande une intervention divine.
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