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TVA sociale: Madelin en remet une couche dans le Figaro


christophe

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L'article avant qu'il ne disparaisse :

La TVA sociale est un mirage qui peine à se dissiper. Ses thuriféraires de tous bords l'ont présentée tour à tour - et même simultanément - comme le moyen de faire contribuer les importations au financement de notre protection sociale, le remède contre les délocalisations, le moyen d'améliorer la compétitivité de nos entreprises ou encore celui de renflouer notre protection sociale et même d'améliorer le pouvoir d'achat des Français. La réalité est bien moins aguichante.

Avec la TVA sociale, les produits étrangers seront mis à contribution pour financer notre protection sociale, répète-t-on à l'envi ? Rien n'est plus faux. Basculer une part de nos cotisations sociales prélevées sur le travail des Français vers une TVA additionnelle - baptisée « sociale » - ne change rien. Quoique l'on fasse, la même facture sociale sera toujours payée par le même nombre de Français. Ce ne sont pas les tee-shirts importés de Chine qui paieront la TVA sociale… mais leurs acheteurs français. J'ai d'ailleurs, sans prendre trop de risques, offert depuis longtemps un prix de 1 million d'euros à qui pourrait montrer un produit importé payant une taxe !

La TVA sociale est le moyen de lutter contre les délocalisations, ajoute-t-on encore ! Sachant qu'un point de TVA correspond à un peu plus d'un point de baisse du coût total du travail (et beaucoup moins encore du prix hors taxe d'un produit selon la part de salaire qui lui est incorporée), il faut beaucoup d'imagination pour croire que la manipulation de quelques points de cotisations sociales et de TVA pourrait freiner le mouvement d'internationalisation de l'économie qui pousse les entreprises à chercher à fabriquer tout ou partie d'un produit avec des mains-d'oeuvre cinq fois, dix fois ou quarante fois moins chères en Bulgarie, en Tunisie, en Inde ou en Chine.

À défaut de faire contribuer les produits étrangers à notre protection sociale ou d'être une arme de dissuasion massive contre les délocalisations, il est vrai que la TVA sociale procure - du moins en apparence - un gain de compétitivité aux entreprises françaises.

En transférant une part des cotisations sociales vers la TVA, on alourdit le prix des produits importés et on allège le coût hors taxes des produits fabriqués en France (si du moins les entreprises répercutent cette baisse de charges sur leurs prix). Une telle manipulation équivaut à une dévaluation compétitive. Le même effet aurait été obtenu naguère par une dévaluation du franc. Aujourd'hui, faute de pouvoir dévaluer l'euro, il est tentant d'utiliser la TVA sociale. Mais la manipulation est complexe et l'effet est des plus limités.

Ce gain de compétitivité de quelques points de TVA sociale est à mettre en regard des variations de 20 ou 30 % de l'euro par rapport au yen ou au dollar. Assurément, une baisse de l'euro de 1 % par rapport à ces monnaies a un effet supérieur à la manipulation d'un point de TVA.

Au surplus, vouloir renchérir les produits importés quand on sait qu'ils représentent 40 % des biens de consommation des Français, c'est prendre le risque de diminuer leur pouvoir d'achat par la hausse des prix des écrans plats ou des ordinateurs, des téléphones portables ou des baladeurs numériques, des jouets ou du textile, de l'essence ou du gaz, des oranges ou des médicaments.

Bien entendu, on peut chercher à sectoriser la TVA ou espérer que, compte tenu de la pression concurrentielle, les prix des produits importés resteront contenus. Les voitures japonaises ne modifieront sans doute guère leurs prix de vente TTC compte tenu de l'avantage que leur procure la faiblesse du yen. Mais dans ce cas les bienfaits de la TVA sociale sur le marché français disparaissent !

Le même risque de hausse des prix se pose pour les produits fabriqués en France. Certes, si les entreprises françaises répercutent intégralement sur leurs prix hors taxes la nouvelle baisse des charges sociales obtenues en contrepartie de la TVA sociale, les prix TTC n'augmenteront pas.

Mais rien n'est moins sûr. L'enthousiasme d'une partie du patronat repose d'ailleurs sur une idée inverse, à savoir que cette baisse des charges leur permettra d'améliorer leurs marges.

La situation se complique d'autant que la TVA sociale revient à appliquer une même mesure - à l'instar des 35 heures - à des situations extrêmement différentes.

Chaque entreprise répercutera différemment la baisse des charges dont elle aura bénéficié en fonction de sa situation, de l'importance plus ou moins grande du facteur main-d'oeuvre dans la formation de ses coûts de revient, du niveau de prix que les consommateurs sont prêts à payer et de la vigueur de concurrence dans son secteur d'activité.

Il est vraisemblable que là où la concurrence et les pressions déflationnistes importées sont fortes, les prix n'augmenteront pas ou très peu. Dans d'autres secteurs, là où la concurrence s'exerce moins, soit parce que les carnets de commandes sont bien remplis, soit parce qu'elle y est structurellement plus faible (comme dans certains services), il est vraisemblable que les prix augmenteront.

La répercussion annoncée de la baisse des charges sociales sur les prix ne peut que s'accompagner d'une forme de contrôle des prix avec, au bout du compte, une pittoresque et laborieuse panoplie de taux différenciés (dans la limite des règles de Bruxelles) au nom de la fiscalité écologique, de priorités industrielles ou de la préservation du pouvoir d'achat.

Les exemples étrangers invoqués à l'appui de la TVA sociale ne sont guère convaincants. Si la TVA française se situe dans la moyenne des TVA européennes (19 %-21 %), il est vrai que la Suède ou le Danemark ont des TVA de 25 %. Mais il est tout aussi vrai que nous ne sommes pas pour autant envahis par des produits suédois ou danois devenus moins chers. Car à une TVA plus forte correspondent des salaires directs plus élevés.

Reste l'exemple de l'Allemagne en 2007 : une hausse de trois points de TVA affectée pour deux tiers au désendettement et pour un tiers à la baisse des charges sociales. Il est facile d'observer que cette hausse s'est inscrite dans un contexte très différent du nôtre, celui d'une politique d'austérité et de réduction des salaires accompagné d'une déprime de la consommation.

Mais on doit surtout se rappeler que ce que vient de faire l'Allemagne, la France l'a déjà fait… en 1995, avec une hausse de deux points de TVA affectés dans les mêmes proportions à la réduction du déficit budgétaire et à la baisse des charges sociales.

La TVA sociale n'est qu'une illusion. C'est d'ailleurs ce qu'a toujours dit Maurice Lauré, le père de notre TVA : « Le recours à une TVA sociale destinée à gommer des coûts salariaux équivaudrait à une dévaluation, aboutirait à créer des taux diversifiés, et serait une mesure aussi dangereuse que vaine. »

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En fait, je trouve ce texte peu emballant. Presque laborieux. On va taxer un peu plus ici et un peu moins là. Il s'agit plus d'une gestion comptable du financement de la sécu qui s'appuie sur un discours protectionniste. Faut-il mieux taxer le boulot ou la consommation en France ? Faut-il se copuper la jambe droite ou la jambe gauche ?

Certes, l'aspect "dévaluation" est bien vu, sauf que peu de monde en comprend le sens. De tout manière, cet arbitrage technique reste superficiel, il ne concerne aucunement une refonte de notre modèle social. Je ne dis pas qu'il a tort, mais que le sujet ne fait vraiment pas bander. La multiplication de TVA sur mesure ouvre, en revanche, sur un vrai débat de fond. Partagez-vous ce sentiment ?

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Pour ma part, même si je trouve qu'effectivement Madelin est un peu laborieux, il dénonce bien ce qu'est cette TVA prétendument sociale : une supercherie.

Quand on sait en outre qu'ils (le gvt) espèrent l'augmenter de 5 points, argh humpf arglll, on se dit que la mesure sera pire que le mal.

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En fait, je trouve ce texte peu emballant. Presque laborieux. On va taxer un peu plus ici et un peu moins là. Il s'agit plus d'une gestion comptable du financement de la sécu qui s'appuie sur un discours protectionniste. Faut-il mieux taxer le boulot ou la consommation en France ? Faut-il se copuper la jambe droite ou la jambe gauche ?

Certes, l'aspect "dévaluation" est bien vu, sauf que peu de monde en comprend le sens. De tout manière, cet arbitrage technique reste superficiel, il ne concerne aucunement une refonte de notre modèle social. Je ne dis pas qu'il a tort, mais que le sujet ne fait vraiment pas bander. La multiplication de TVA sur mesure ouvre, en revanche, sur un vrai débat de fond. Partagez-vous ce sentiment ?

A vrai dire, Madelin ne m'a jamais vraiment fait bander.

Je trouve effectivement que sont texte est très juste, mais qu'il n'interresera que peut de monde car il est ennuyeux.

Maintenant, il y a tout de même quelques personnes qui l'ont lu ou le liront, à qui sa permettra de mettre des mots précis sur ce qu'ils penssait peut petre déjà sans savoir l'exprimer. Il me donne des arguments plus précis et mieux structurés que je ressortirait lors de mes débats avec mon père.

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A vrai dire, Madelin ne m'a jamais vraiment fait bander.

Euuhh, moi non plus. Mais ce qu'il a dit, si. Il a souvent le sens de la formule, cette ironie qui marque les esprits. Mais cette dénonciation de ce qui, en effet, est une supercherie, n'atteint pas le niveau de saveur de ses interventions habituelles.

En revanche, je suis un peu déçu qu'il ne continue pas à envoyer sa lettre hebdo.

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Euuhh, moi non plus.

c'était de l'humour, en réponse à :

le sujet ne fait vraiment pas bander

je lis rarement la presse, d'autant plus la presse française, mais s'il avait une lettre hebdo dans le figaro, c'est effectivement dommage qu'il ne l'envoie plus, plus y a de libéraux à la tribune mieux je me porte.

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En fait, je trouve ce texte peu emballant. Presque laborieux. On va taxer un peu plus ici et un peu moins là. Il s'agit plus d'une gestion comptable du financement de la sécu qui s'appuie sur un discours protectionniste. Faut-il mieux taxer le boulot ou la consommation en France ? Faut-il se copuper la jambe droite ou la jambe gauche ?

Certes, l'aspect "dévaluation" est bien vu, sauf que peu de monde en comprend le sens. De tout manière, cet arbitrage technique reste superficiel, il ne concerne aucunement une refonte de notre modèle social. Je ne dis pas qu'il a tort, mais que le sujet ne fait vraiment pas bander. La multiplication de TVA sur mesure ouvre, en revanche, sur un vrai débat de fond. Partagez-vous ce sentiment ?

Oui, son texte donne un peu mal à la tête. Ce n'est pas comme cela que l'on va convaincre…

C'est un discours de technicien qui ne prend personne aux trippes.

Je suis donc totalement d'accord avec toi.

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C'est quoi ce fil ? Alors, tout le monde est d'accord ? Bande de fiottes !

Arf, comment veux-tu qu'on ne soit pas d'accord avec toi Aurel? La critique des mesures de transfert et la défense des principes sur la technique, c'est ce qui fait l'originalité de lib.org :icon_up: Les discours politiques qu'on trouve dans les media sont souvent très techniques mais reposent sur des principes vagues voire sur rien du tout, de la technique pour de la technique ou de la mise en scène pour faire passer un truc en douce. Si on pouvait remettre un peu de moral dans le discours politique, ce serait déjà pas mal.

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Oui c'est vrai: la coutume veut qu'on ne soit pas du tout d'accord, que le ton monde et que ça finisse en engueulade générale…

Personne ne vient lancer les hostilités?

Ok.

Moi, je trouve particulièrement scandaleux que des petits jeunes, la gueule enfarinée, se permettent des réponses pareilles sans se relire et écrivent monde à la place de monte.

:icon_up:

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Il y a un point technique dans l'article de Madelin que je ne comprends pas, il me semble faux:

Bien entendu, on peut chercher à sectoriser la TVA ou espérer que, compte tenu de la pression concurrentielle, les prix des produits importés resteront contenus. Les voitures japonaises ne modifieront sans doute guère leurs prix de vente TTC compte tenu de l'avantage que leur procure la faiblesse du yen. Mais dans ce cas les bienfaits de la TVA sociale sur le marché français disparaissent !

Un rapide calcul montre que

Si la TVA augmente et si un producteur étranger ne veut pas que le prix de vente TTC de son produit augmente, il doit réduire son prix de vente HT à concurrence.

S'il le fait, la TVA récoltée est supérieure à la TVA antérieure.

Donc non seulement, l'Etat récolte sa dose de TVA sociale et d'autre part, c'est bien le producteur étranger qui paye et non le consommateur final.

A moi le million d'euro?

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Il y a un point technique dans l'article de Madelin que je ne comprends pas, il me semble faux:

Un rapide calcul montre que

Si la TVA augmente et si un producteur étranger ne veut pas que le prix de vente TTC de son produit augmente, il doit réduire son prix de vente HT à concurrence.

S'il le fait, la TVA récoltée est supérieure à la TVA antérieure.

Donc non seulement, l'Etat récolte sa dose de TVA sociale et d'autre part, c'est bien le producteur étranger qui paye et non le consommateur final.

A moi le million d'euro?

Il me semble que Madelin fait référence à autre chose, à savoir la compétitivité des entreprises françaises, qui est supposée s'améliorer grâce à la TVA sociale. Si les Japonais sont capables d'abaisser le prix de vente HT de leurs voitures, alors cela signifie que le gain de compétitivité escompté s'évanouit.

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Il me semble que Madelin fait référence à autre chose, à savoir la compétitivité des entreprises françaises, qui est supposée s'améliorer grâce à la TVA sociale. Si les Japonais sont capables d'abaisser le prix de vente HT de leurs voitures, alors cela signifie que le gain de compétitivité escompté s'évanouit.

:icon_up:

Oui, c'est ça. Merci.

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:icon_up:

Oui, c'est ça. Merci.

Pas de problème. L'article est plutôt laborieux et je n'ai compris ce passage qu'en me souvenant que Madelin est tout de même un peu libéral et réaliste et que la rentrée d'argent dans les caisses de l'état ne l'intéresse guère. :doigt:

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Pas de problème. L'article est plutôt laborieux et je n'ai compris ce passage qu'en me souvenant que Madelin est tout de même un peu libéral et réaliste et que la rentrée d'argent dans les caisses de l'état ne l'intéresse guère. :icon_up:

Madelin souffre d'un problème de communication : il est enfermé dans son intelligence. Il ne pense pas nécessaire d'avoir à détailler certains de ses raccourcis à ses interlocuteurs, les considérant comme évidents, de bonne foi et sans arrogance de sa part. Résultat, il sème une bonne partie de la foule en cours de route. Mais ce défaut fait aussi son charme : Madelin est probablement le mec le plus brillant de la vie politique française depuis des décennies, à côté d'un Barre ou d'un d'Estaing.

D'autre part, quand il se décide à tout expliquer en détail et qu'il fait un effort, il peut devenir limpide… J'espère qu'il va vite revenir au premier plan.

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