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Bouddhisme


Messages recommandés

J'entends bien votre volonté de syncrétisme Drake, mais non, décidément ça ne marche pas, même au forceps.

L'époche, si mes souvenirs sont bons n'existe pas dans le stoïcisme, c'est un concept sceptique et pis, il ne signifie pas concentration, mais mise entre parenthèse, suspension du jugement, là où le stoïcien met en relation le jugement avec les causes naturelles.

Et pareil pour la phantasia kataleptike, qui n'est pas du tout une forme de contemplatio, mais une saisie compréhensive, c'est-à-dire une connaissance en action, qui repose sur l'adéquation évidente entre une représentation et un phénomène: c'est l'équivalent empirique de l'idée claire et distincte de Descartes.

Je sais que c'est à la mode de vouloir faire de grandes synthèses universelles, mais quant à moi je préfère les philosophies de la distinction.

Souligner des similitudes ne signifie pas volonté syncrétique. Je ne suis pas en train de fonder une nouvelle secte (enfin, bon s'il y a du pognon à la clef, vaut voir…)

EDIT : le fait central est ici que les stoïciens usaient d'exercices mentaux spécifiques pour atteindre l'ataraxie, comme les bouddhistes le font pour atteindre la nirvana. En quoi l'exercice des premiers seraient-ils louable et celui des seconds condamnable. : tu n'as pas prouvé qu'ils étaient moins dépourvus de raison.

Je parle de ce que je vois, de ce qui est manifeste et massif. J'ai cité par exemple le cycle des réincarnations, encore une belle négation du libre arbitre, au passage.

La croyance dans le cycle des réincarnations (au sens de métempsycose) ne fait pas partie du bouddhisme.

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En même temps, c’est un peu la définition opérationnelle du vieux japonais bouddhiste non ? Tu lui pose une question, et il te rit au nez…

:icon_up: Uhuh, non, je parlais des vieux japonais normaux, pas des moines.

Une vieille dame m'avait sorti après une méditation "c'est bon pour le corps et pour la tête". Bon d'un côté elle a peut être voulu faire spécialement simple voyant mon niveau en japonais, mais bon, voilà une manière saine d'aborder la méditation.

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Si tu trouves que ma critique manquait d'applications concrètes, prenons des exemples dans l'actualité récente.

Tu vois bien que les bouddhistes ne sont pas tous des vegetariens aseptises soumis ! Je pense que tu commence a revenir sur l'image que tu avais initialement.

J'ai meme entendu parler de moines bouddhistes qui partent le matin a la quete avec un flingue dans leur baluchon :icon_up:

Ils ont raison vu le contexte, mais ca casse un peu l'image de non violence.

Autre exemple: je connais un moine, ancien colonel de l'armee, riche, dont la femme gere les nombreux business. Il voyage beaucoup, toujours en business class, et je t'assure qu'on ne peut pas dire qu'il n'a aucune personnalite. Bon je t'accorde qu'il n'est pas forcement representatif, mais c'est pas non plus un cas isole, et plus important: ca ne choque personne, c'est un moine tres respecte.

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Tu vois bien que les bouddhistes ne sont pas tous des vegetariens aseptises soumis ! Je pense que tu commence a revenir sur l'image que tu avais initialement.

J'ai meme entendu parler de moines bouddhistes qui partent le matin a la quete avec un flingue dans leur baluchon :icon_up:

Ils ont raison vu le contexte, mais ca casse un peu l'image de non violence.

Il suffit de lire un peu de littérature chinoise classique pour se rendre compte que l'ascétisme et l'abstinence des moines est vraiment à nuancer :doigt:

Le roman Jin Ping Mei est très instructif sur les moeurs sexuelles des moines bouddhistes !

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C'est le grand leg de RH finalement.

Le retour du gnosticisme et de l'occultisme dans le monde postmoderne n'est pas une idée de RH, même s'il en fut un excellent vulgarisateur et décocha de belles flèches à ce sujet, dont quelques unes firent mouche sur certains rêves de grand soir libéral.

Prosternez vous devant ma puissance de prédiction !

Tu devrais plutôt me remercier cher neuneu, je voulais te faire plaisir, nous faire plaisir, car vois-tu, c'est un effet de ma bonté et de mon sens de la convivialité dans le débat. Bien entendu, toute ressemblance avec la réalité ne serait clairement pas le fruit d'une coïncidence. Il y a en effet un point commun entre les gnostiques, les socialoccultistes et les néo-bouddhistes, c'est la croyance que l'homme peut être guéri du mal, ou des injustices, ou de la souffrance, par une thérapie de groupe, par quelque manipulation en vue d'apporter le bonheur à l'humanité.

Pas de réincarnations, là tu confonds ouvertement avec l'hindouisme.

Certes, renaissances… :icon_up:

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Tu devrais plutôt me remercier cher neuneu, je voulais te faire plaisir, nous faire plaisir, car vois-tu, c'est un effet de ma bonté et de mon sens de la convivialité dans le débat. Bien entendu, toute ressemblance avec la réalité ne serait clairement pas le fruit d'une coïncidence. Il y a en effet un point commun entre les gnostiques, les socialoccultistes et les néo-bouddhistes, c'est la croyance que l'homme peut être guéri du mal, ou des injustices, ou de la souffrance, par une thérapie de groupe, par quelque manipulation en vue d'apporter le bonheur à l'humanité.

Et des exemples le confirment et des exemples l'infirment. Tu es très loin de l'exhaustivité et très loin d'une analyse de cas.

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Le retour du gnosticisme et de l'occultisme dans le monde postmoderne n'est pas une idée de RH, même s'il en fut un excellent vulgarisateur et décocha de belles flèches à ce sujet, dont quelques unes firent mouche sur certains rêves de grand soir libéral.

Tu devrais plutôt me remercier cher neuneu, je voulais te faire plaisir, nous faire plaisir, car vois-tu, c'est un effet de ma bonté et de mon sens de la convivialité dans le débat. Bien entendu, toute ressemblance avec la réalité ne serait clairement pas le fruit d'une coïncidence. Il y a en effet un point commun entre les gnostiques, les socialoccultistes et les néo-bouddhistes, c'est la croyance que l'homme peut être guéri du mal, ou des injustices, ou de la souffrance, par une thérapie de groupe, par quelque manipulation en vue d'apporter le bonheur à l'humanité.

Au risque de la répétition : il n'est pas question de thérapie de groupe dans le bouddhisme (pas plus que dans le stoïcisme ou la pratique du ski de fond). Et la guérison de l'humanité ou sa conduite vers le bonheur lui sont tout à fait étrangères.

Certes, renaissances… :icon_up:

Le concept de renaissance est purement métaphorique et désigne le succession des pensées et des états mentaux dans le temps. Succession qui peut-être contrôlée par la pratique. Mais bon faut pas le dire.

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http://www.metta-kh.com/bouddhistes/Verite-ultime.htm

Pour Free Jazz

Ca peut être bien pour commencer.

Distinguer les deux vérités.

Tiens je te cite ce passage du livre ""L' enseignement de Bouddha"" de Rahula Walpola:

"Un homme nommé x, rendi un jour visite au B et lui dit:"Seigneur, nous sommes des laics ordinaires menant la vie de famillle avec femme et enfants. Le Bienheureux pourrait il nous donner quelque enseignement qui nous conduise vers le bonheur dans ce monde et au-delà ?

Le B lui répondt qu' il y avait quatre choses qui conduisent l' homme au bonheur dans ce monde:

Premièrement: il doit être efficace et habile, conscienscieux et énergique dans sa profession quelle qu' elle soit, en avoir une connaissance complète.

Deuxièmement: il doit garder son gain ainsi obtenu à la sueur de son front (commentaire: tiens voilà ton droit de propriété)

Troisièmement: avoir de bons amis qui l' aident et le soutiennent, fidèles et vertueux

Quatrièmement: il doit dépenser raisonnablement, selon son revenu, ni trop ni trop peu, pas accumuler avec avarice, ni se livrer à des extravagances, il doit vivre selon ses moyens.

Ensuite les quatres vertus qui conduisent un laic au bonheur dans l' au dela:

-foi et confiance dans les valeurs morales, spirituelles et intellectuelles

-s' abstenir de detruire la vie, vol, tromperie adultère, mensonge, boisson enivrantes

-pratiquer la charité, la générosité sans attachement

-developper la sagesse qui conduit à la destruction complète de la souffrance, à l' atteinte du nirvana.

Je crois qu' on est bien loin de la vision que tu as du bouddhisme.

Je pourrais également te citer les dix devoirs d' un bon Roi ( aujourd'hui gouvernement) envers son peuple. Mais c' est long et j'ai pas toute la nuit, promis je le ferai demain. Bonne soirée

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Alors la franchement je n'ai toujours pas compris ce que le gnosticisme venait faire ici. Je suppose qu'il s'agit d'un mot comme fascisme, que l'on peut charger de sens à sa convenance.

Je rejoint d'ailleurs Drake dans la demande d'une définition du gnosticisme (en dehors de la signature de RH). Je suppose que quand Free Jazz l'utilise, ce n'est pas un synonyme de mysticisme.

En clair, il faut lire quoi ?

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Je rejoint d'ailleurs Drake dans la demande d'une définition du gnosticisme (en dehors de la signature de RH). Je suppose que quand Free Jazz l'utilise, ce n'est pas un synonyme de mysticisme.

En clair, il faut lire quoi ?

Tu peux commencer par l'article de wp, qui n'est pas mal tourné dans l'ensemble. Sur le sujet qui nous occupe:

Selon la définition du néoplatonicien Plotin, adversaire des gnostiques, ceux-ci sont:

« Ceux qui disent que le Démiurge de ce monde est mauvais et que le Cosmos est mauvais. »

Ainsi, à leurs yeux, l'homme est prisonnier du temps, de son corps, de son âme inférieure et du monde.

Les gnostiques en concluent : « Je suis au monde, mais je ne suis pas de ce monde», et de ce point de vue, le monde et l'existence dans le monde apparaîtront mauvais parce qu'ils sont mélange de deux natures et de deux mondes d'êtres contraires et inconciliables. Le gnostique sera celui qui retrouvera son moi véritable et qui prendra conscience de la condition glorieuse, divine qui était la sienne dans un passé immémorial.

(…)

Elles sembleraient procéder, comme le dit Joseph Campbell, d'une même "anatomie", c'est-à-dire de quelque chose d'inhérent à la nature humaine. Campbell croyait que toutes les religions du monde, tous les rituels et les déités n'étaient que les “masques” d'une seule et même vérité transcendante, laquelle serait “insaisissable" (inconnaissable). Il décrivait le christianisme et le bouddhisme, que l’objet en fût “la conscience de Buddha” ou “la conscience du Christ”, comme un niveau de perception au-dessus des “oppositions binaires” telles que le bien et le mal. De telles conceptions unificatrices sont parfois mal reçues…

L'idée gnostique est présente au sein du bouddhisme (…) Cf. paroles du Bouddha - "tout est souffrance, tout est non-vérité", semble-t-il plus spécialement au sein du Hinayana qui oppose "Samsara" et Nirvana.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Gnosticisme

Un classique :

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Concernant RH, je préférerais éviter d'interpréter sa pensée. Toutefois il nous a souvent conseillé la lecture d'Eric Voegelin, auteur d'une réflexion antitotalitaire pénétrante qui a renouvelé les études théologico-politiques comme grille de lecture de la modernité, notamment les rapports entre les constructions eschatologiques et certaines idéologies révolutionnaires ou progressistes.

Une introduction à cette analyse : "Théorie politique et représentation. Une autre histoire du progrès"

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Ah au fait la transe de Bali est plutôt intéressante. Mais j'ai un peu de mal à l'aborder.

J'y ai été "initié" lors d'une représentation à Paris à la Maison des cultures du monde, c'est évidemment la meilleure façon de passer la barrière culturelle, dans une certaine mesure. On retrouve la conception musicale modale des ragâs indiens, mais avec un caractère cyclique plus marqué, du aux polyrythmies en changement perpétuel tout en dégageant une forme de fixité. Cela offre une expérience proche de la méditation telle que tu me l'as décrite, puisqu'on ressent dans cette musique une correspondance avec des cycles naturels. En outre ces microvariations ont considérablement influencé certains compositeurs contemporains comme Steve Reich, John Cage ou Terry Riley, qui ont crée le courant dit minimaliste.

Pour revenir à ta demande de précision quant au rapprochement fait plus haut, l'énorme succès du "film" Matrix offre une application éclairante sur la convergence entre le néo-bouddhisme et le renouveau de la gnose.

Sur le site Zen Occidental, un article analyse précisément ce rapport :

(badurl) http://www.zen-occidental.net/articles1/matrix.html (badurl)

Réveille-toi ! Le gnosticisme et le bouddhisme dans Matrix

- par Frances Flannery-Dailey et Rachel Wagner

Dans Matrix, un film des frères Wachowski sorti en 1999, un pirate informatique vêtu de noir, du nom de Neo, s’endort devant son ordinateur. Un mystérieux message s’affiche sur l’écran : "Réveille-toi, Neo" [1]. Le thème général du film est contenu dans cette courte phrase. Neo s'y débat en effet avec la question de son emprisonnement dans un monde "matériel", en réalité un programme de simulation par ordinateur créé dans un futur lointain par l'Intelligence Artificielle pour rendre esclave l’humanité. Celle-ci entretient l’ignorance sous la forme d’une perception illusoire connue sous le nom de "la Matrice". Le film forge sa conception ultime du réel notamment par des allusions aux nombreuses traditions religieuses qui avancent l’idée que l'ignorance est le problème fondamental rencontré par l’humanité et que la connaissance ou l’éveil en sont la résolution. Le film emprunte largement au gnosticisme chrétien et au bouddhisme [2]. Bien que ces deux traditions diffèrent considérablement, elles s’accordent à dire que l’ignorance peut-être résolue par un changement de perspective personnelle sur le monde matériel [3]. Le gnosticisme chrétien et le bouddhisme se représentent également une sorte de guide qui vient au secours de ceux qui sont encore prisonniers du monde limité de l'illusion, un rédempteur gnostique ou un bodhisattva, qui s'engage volontairement en ce monde pour partager un savoir libérateur, afin de faciliter la délivrance de tous ceux qui sont à même d'entendre. Dans le film, cette figure est représentée par Neo, dont le nom est aussi l’anagramme de "the One" ("L'Elu").

Bien que, comme "mythe moderne" [4], le film s’appuie résolument sur de nombreuses traditions [5], nous soutenons qu'un examen du gnosticisme chrétien et du bouddhisme est à même d'éclairer la perspective générale de Matrix, à savoir que le problème d'être endormi ignorant dans un monde illusoire est résolu par un réveil à la connaissance ou à l’éveil. En puisant d'une façon syncrétique dans ces deux anciennes traditions et en les fondant dans une vision technologique du futur, le film construit un nouvel enseignement qui interpelle son public à questionner le "Réel".

(…)

Neo ne se contente pas d’apprendre et de transmettre le savoir secret qui sauve, dans la pure tradition gnostique, mais son apprentissage évoque également quelques éléments du gnosticisme. Imprégné d'images orientalisantes, le programme d’entraînement enseigne à Neo la notion de "tranquillité", comment libérer l’esprit et surmonter la peur, rendu cinématographiquement par le "bullet time" (un effet visuel qui permet de voir le mouvement des balles et qui est obtenu par des montages numériques de plans fixes et de plans au ralenti tournés avec plusieurs caméras) [22]. De manière assez intéressante, cette notion de "tranquillité" est également présente dans le gnosticisme : les éons les plus élevés sont assimilés à la "tranquillité" et au "repos". Elle ne peut être appréhendée que d'une manière méditative et centrée, comme on peut le constater dans ces instructions à un certain Allogène :

Et bien qu’il soit impossible pour toi d'être là, ne crains rien ; mais si tu souhaites être là, rappelle l’Existence et tu la trouveras là au repos à l'image de l’Un qui est véritablement au repos. Et quand tu seras parfait à cette place, reste dans la tranquillité. (Révélations reçues par l'Allogène).

Puis le gnostique révèle : "J’avais en moi la tranquillité du silence, et j’entendis la bénédiction par laquelle je connus mon propre moi." (Révélations reçues par l'Allogène) [23]. Quand Neo réalise toute l'étendue de sa "gnose salvatrice", que la Matrice est seulement un monde illusoire, un Keanu Reeves méditatif contemple silencieusement et calmement les balles qu’il a arrêtées en pleine course, filmées au "bullet time".

Un autre parallèle avec le gnosticisme apparaît dans la description des agents tels que l’Agent Smith, et leur confrontation avec les équivalents des gnostiques – à savoir Neo et tous ceux qui essayent de quitter la Matrice. L’Intelligence Artificielle a créé ces programmes artificiels pour qu’ils soient des "gardiens – ils gardent toutes les portes, ils détiennent toutes les clés". Ces agents sont comme les archontes jaloux créés par Yaldabaôth. Ils empêchent l’ascension du gnostique alors que celui-ci essaye de quitter la réalité matérielle et qu'ils gardent les portes des échelons successifs des cieux (voir l'Apocalypse de Paul) [24].

Toutefois, comme le prédit Morpheus, Neo est finalement capable de vaincre les agents car, tandis que ceux-ci doivent suivre strictement les règles de la Matrice, son esprit humain lui permet de faire plier ou de briser ces règles [25]. Dans le film, cependant, l’esprit ne se confond pas simplement avec l’intelligence rationnelle, sinon l’Intelligence Artificielle gagnerait à coup sûr. La notion d'"esprit" dans le film fait plutôt référence à une capacité strictement humaine d’imagination, d’intuition ou, comme on dit d'avoir l'esprit créatif (to think outside the box). Le film comme les gnostiques affirment que "l’étincelle divine" en l'homme permet une perception de la gnose plus profonde que ne peut le réaliser le premier archonte / l’agent de Yaldabaôth (…)

Il est frappant que Neo triomphe de l’Agent Smith dans la scène finale du film, en réalisant précisément et complètement l’illusion de la Matrice, ce que l’agent ne pouvait apparemment pas faire, parce que l'un est capable de briser les règles et non l’autre. La défaite finale de Smith nécessite que Neo pénètre le corps de Smith et qu'il le mette en pièces par une pure luminosité, ce qui est rendu par des effets spéciaux de lumière faisant voler en éclats Smith de l’intérieur.

Le système développé dans Matrix établit donc un parallèle avec le gnosticisme chrétien sous de nombreux aspects, particulièrement dans la description du problème fondamental de l’humanité, vivre dans un monde illusoire à l'apparence réelle, et de sa résolution par le réveil de l'illusion. Les figures mythiques centrales de Sophia, de Yaldabaôth, des archontes et du Christ gnostique rédempteur trouvent également leur parallèle dans les principales représentations du film et opèrent de manière similaire. Les langages du gnosticisme et du film sont également identiques : le rêve à l'encontre de l’éveil, l’aveuglement à l'encontre de la vue [26], la lumière à l'encontre des ténèbres [27].

(…)

Le bouddhisme dans Matrix

Lorsqu'un fan demanda aux frères Wachowski si des concepts bouddhistes avaient influencé la réalisation du film, ils répondirent par un "oui" franc et massif [32]. Des concepts bouddhistes imprègnent en effet le film qui paraissent bien proches de puissantes images chrétiennes équivalentes. Presque immédiatement après que Neo fut identifié comme "mon Jésus-Christ à moi", cette désignation prend une tournure nettement bouddhique. Le même pirate informatique dit : "Cela ne s'est jamais passé. Tu n'existes pas". Depuis les coques en forme de stûpa [33] où sont enfermés les êtres humains dans de sinistres champs mécaniques jusqu'au désir égoïste de Cypher d'éprouver les sensations et les plaisirs de la Matrice, les enseignements bouddhistes alimentent aussi bien l'intrigue que le langage du film [34].

La question du samsâra. Le titre même du film évoque la conception bouddhiste du monde. Morpheus décrit la Matrice comme une "prison pour ton esprit". Il s'agit d'une "construction" dépendante faite de l'interconnexion des projections numériques de milliards d'êtres humains inconscients de la nature illusoire de la réalité dans laquelle ils vivent et qui sont, en outre, complètement dépendants du matériel informatique rivé à leur corps et des programmes perfectionnés conçus par l'Intelligence Artificielle. Cette "construction" rappelle le concept bouddhiste de samsâra selon lequel le monde où nous vivons notre vie ordinaire est seulement construit par nos projections sensorielles comme expression de nos propres désirs. Lorsque Morpheus emmène Neo dans la "construction" pour lui expliquer la Matrice, Neo apprend que la manière dont il se perçoit lui-même au sein de la "Matrice" n'est rien d'autre "que la projection mentale de ton identité numérique". Le monde "réel", que nous associons à ce que nous ressentons, sentons, goûtons, et voyons "[n']est simplement [que] des signaux électriques interprétés par ton cerveau". Le monde, explique Morpheus, existe : "Seulement actuellement en tant qu'aspect d'une simulation neuronale interactive que nous appelons la Matrice". En termes bouddhistes, on pourrait dire que "c'est parce qu'il est vide d'un moi ou d'un mien qu'il est dit "le monde est vide". Et qu'est ce qui est vide d'un moi ou d'un mien ? L'oeil, les formes matérielles, la conscience visuelle, la perception oculaire, tout cela est vide d'un moi ou d'un mien." [35]. Le bouddhisme et Matrix partagent la conviction que la réalité fondée sur l'expérience sensible, l'ignorance, et les désirs enferment les êtres humains dans l'illusion jusqu'à ce qu'ils soient capables de reconnaître la nature trompeuse de la réalité et d'abandonner leur sens erroné de l'identité.

S'inspirant de la doctrine de la coproduction conditionnée, le film présente la réalité de la Matrice comme une agrégation des illusions de tous les hommes pris dans ses rets. De la même manière, le bouddhisme enseigne que la souffrance des êtres humains dépend d'un enchaînement d'ignorance et de désir qui enferme les humains dans le cercle ininterrompu de la naissance, de la mort et de la renaissance. Cet enseignement est formulé de façon lapidaire dans le Samyyutta-nikaya :

Quand ceci est, cela est ;

Ceci apparaissant, cela apparaît.

Quand ceci n'est pas, cela n'est pas ;

Ceci cessant, cela cesse. [36]

Le principe de coproduction conditionnée est illustré dans le contexte du film par l'illusion de la Matrice. La persistance de l'illusion repose sur la croyance de ceux qui, pris dans la Matrice, la prennent pour la réalité. Le programme informatique de l'Intelligence Artificielle n'est pas, en lui-même et de lui-même, une illusion. Ce n'est que lorsque les humains interagissent avec ses programmes qu'ils sont pris dans une illusion collective, la Matrice, le samsâra, qui se renforce elle-même grâce aux interactions des êtres humains qui y sont impliqués. Ainsi la réalité de la Matrice n'existe que lorsque les véritables esprits humains expérimentent subjectivement ses programmes [37].

Le problème peut être posé en termes bouddhistes. Les hommes sont pris au piège dans le cycle des illusions, et l'ignorance de ce cycle les y maintient enfermés, totalement dépendants de leurs propres interactions avec le programme, des illusions que les expériences sensorielles fournissent et des projections sensorielles des autres. Ces projections sont renforcées par le formidable désir des hommes de croire que ce qu'ils perçoivent comme réel est bien réel. Ce désir est si fort que Cypher y succombe. Ne pouvant plus supporter le "désert du réel", il demande à réintégrer la Matrice. Assis en compagnie de l'Agent Smith dans un restaurant haut de gamme, fumant un cigare accompagné d'un grand verre de whisky, Cypher explique ses raisons :

Bien sûr, je sais que ce steak n'existe pas. Je sais que lorsque je le porte à ma bouche, la Matrice dit à mon cerveau qu'il est juteux et délicieux. Mais au terme de neuf années, savez-vous ce que j'ai compris ? L'ignorance est le bonheur.

Cypher sait que la Matrice n'est pas réelle et que tous les plaisirs qu'il éprouve ne sont que des illusions. Pourtant, "l'ignorance" du samsâra lui paraît préférable à l'éveil. Niant la réalité qu'il sait en dehors de la Matrice, il utilise une formule à la négation redoublée : " Je ne veux pas me souvenir de rien. De rien. Je veux être riche. Quelqu'un d'important. Comme un acteur." Non seulement Cypher ne veut pas oublier le "rien" de la véritable réalité, mais il souhaite être aussi un "acteur" afin d'ajouter un autre niveau d'illusion à l'illusion de la Matrice dans laquelle il choisit de retourner [39]. L'attraction du samsâra est si puissante que ce n'est pas seulement Cypher qui cède à ses désirs mais également Mouse dont on peut dire qu'il a été terrassé par les appâts du samsâra. Sa mort est en effet en partie due à ses fantasmes sexuels sur la Dame en rouge qui le faisait rêver alors qu'il était censé rester en alerte.

Tandis que Cypher et Mouse représentent ceux qui s'abandonnent au samsâra, le reste de l'équipage incarne la modération et le calme prêchés par le Bouddha. La scène passe soudain du restaurant à la table du Nabuchodonosor où, au lieu de se voir offrir un whisky, un cigare et un steak, Neo reçoit un "bol de morve" qui sera son repas habituel à partir de là. Par opposition avec les plaisirs qui, pour Cypher, ne peuvent être réalisés que dans la Matrice, Neo et l'équipage doivent se contenter de "protéines unicellulaires associées à des acides aminés de synthèse, des vitamines et des minéraux" qui, selon Dozen, est "tout ce que le corps a besoin". Habillés de vêtements usagés, ne prenant qu'un gruau, dormant dans de simples cellules, l'équipage représente l'exercice de la Voie du Milieu enseignée par le Bouddha, ne versant ni dans l'ascétisme absolu ni dans la complaisance susceptible de les détourner de leur tâche [40].

La solution de la connaissance-éveil. Cette dualité entre la Matrice et, au-delà d'elle, la réalité institue l'objectif fondamental des rebelles : libérer tous les esprits de la Matrice et permettre aux êtres humains de vivre, au-delà, dans le monde réel. Sur ce point, les réalisateurs s'inspirent des concepts bouddhistes Theravâda et Mahâyâna [41]. S'inspirant de l'idéal theravâda de l'arhat, le film laisse entendre que l'éveil est réalisé par un effort personnel [42]. Morpheus, le principal mentor de Neo, lui affirme clairement qu'il ne peut en rien l'éveiller. Comme il l'explique : "Nul ne peut entendre de quelqu'un ce qu'est la Matrice. Tu dois la voir par toi-même." Morpheus explique à Neo que seul lui peut réaliser l'ultime bouleversement perceptif. Il lui dit : "J'essaie de libérer ton esprit, Neo. Mais je peux seulement te montrer la porte. Tu es le seul qui puisse la franchir." Pour le bouddhisme Theravâda "l'émancipation de l'homme dépend de sa propre compréhension de la Vérité et non pas de la grâce bénévolement accordée par un dieu ou une quelconque puissance extérieure en récompense d'une conduite vertueuse et obéissante." [43]. Le Dhammapada presse celui qui recherche l'éveil de "se libérer du passé, de se libérer du futur, de se libérer du présent. Traversant jusqu'à l'autre rive de l'existence, l'esprit totalement libéré, il ne connaîtra plus la naissance et la disparition." [44]. Comme le dit Morpheus à Neo "Il existe une différence entre connaître le chemin et marcher dessus." Et comme le Bouddha l'enseignait à ses disciples : "Vous seuls devez-vous efforcer. Les Eveillés ne peuvent qu'enseigner." [45]. Déjà sur le chemin de l'éveil, Morpheus n'est qu'un guide. Finalement, Neo doit découvrir la vérité par lui-même.

Mais Matrix contient également des notions que l'on trouve dans le bouddhisme Mahâyâna, notamment son attention particulière à la libération de tous les êtres sous la direction de ceux qui demeurent dans le samsâra et qui diffèrent leur propre éveil afin de secourir autrui sous la forme de bodhisattvas [46]. Les membres de l'équipage du Nabuchodonosor incarnent cette compassion. Plutôt que de rester à l'extérieur de la Matrice où ils sont en sécurité, ils choisissent d'y retourner de façon répétée comme les ambassadeurs de la connaissance dans le but de libérer les esprits et éventuellement également les corps de ceux qui sont piégés dans la toile numérique de la Matrice. Le film est une tentative de synthèse de l'idéal theravâda de l'arhat et celui mahayaniste du bodhisattva, puisqu'il présente l'équipage comme préoccupé par tous ceux qui sont encore englués dans la Matrice avec la volonté d'y retourner pour les secourir. En même temps, il affirme que la réalisation dernière est le fruit d'un cheminement personnel.

Neo en tant que Bouddha. Bien que l'équipage en son entier incarne l'idéal du bodhisattva, les réalisateurs font de Neo un personnage unique, laissant entendre que si l'équipage peut être considéré comme des arhats ou des bodhisattvas, Neo serait alors un Bouddha. L'identification de Neo au Bouddha est corroborée non seulement par l'anagramme de son nom mais aussi par le mythe qui l'enveloppe. L'Oracle a prédit le retour de celui qui aura la capacité d'opérer sur la Matrice. Comme l'explique Morpheus, le retour de cet homme "annoncera la destruction de la Matrice, la fin de la guerre, la liberté pour notre peuple. Voilà pourquoi certains d'entre nous ont passé leur vie entière à parcourir la Matrice à sa recherche". Morpheus croit que Neo est la réincarnation de cet homme qui, comme le Bouddha, sera doté de pouvoirs extraordinaires à même d'aider l'humanité à s'éveiller.

L'hypothèse d'un Neo réincarnation du Bouddha est corroborée, dans le film, par la prédominance des images de naissance qui lui sont associées. Au moins quatre réincarnations sont visibles. La première naissance a lieu dans l'avant-histoire du film, dans la vie et la mort du premier Eveillé qui pouvait contrôler la Matrice de l'intérieur. La seconde est celle de la vie de Neo lorsqu'il est Thomas Anderson. La troisième renaissance débute lorsque Neo émerge, hoquetant, de la gelée d'une étrange coque en forme de stûpa dans laquelle il avait été enfermé, qu'il est débranché et qu'il tombe d'un énorme conduit noir qui peut facilement être comparé à un vagin [47]. Il en sort chauve, nu et perdu avec des yeux dont Morpheus lui dit qu'ils "n'ont jamais été utilisés" auparavant. "Mort" au monde de la Matrice, Neo est "re-né" dans le monde qui se trouve au-delà de celle-ci. La quatrième vie de Neo débute après sa mort et sa nouvelle renaissance dans les dernières scènes du film lorsque Trinity le ressuscite d'un baiser [48]. A ce moment-là, Neo perçoit non seulement les limites de la Matrice mais aussi celles du monde du Nabuchodonosor, en ayant surmonté la mort dans ces deux domaines. Comme le Bouddha, son éveil lui confère l'omniscience. Il échappe au pouvoir de la Matrice et n'est plus assujetti à la naissance, à la mort et la renaissance dans la construction mécanique de l'Intelligence Artificielle [49].

Neo, comme le Bouddha, cherche à se libérer de la Matrice et à enseigner aux autres comment s'en libérer eux-mêmes, et n'importe quel pouvoir surhumain peut être utilisé à cet effet. Comme il est le seul être humain depuis le premier éveillé, capable de manoeuvrer à sa guise le programme informatique de l'intérieur et jusqu'à ses limites, Neo représente la réalisation de la bouddhéité, celui qui peut non seulement reconnaître "l'origine de la souffrance dans le monde des êtres vivants" mais celui qui peut également imaginer "la fin de la souffrance" en instituant "le chemin qui mène à sa fin" [51]. Sous cet angle, Neo dépasse ses compagnons bodhisattvas, il apporte l'espoir de l'éveil et de la liberté à tous les êtres humains pris dans les filets de l'ignorance.

Le problème du nirvâna. Mais que se passe-t-il lorsque la version matricielle de la réalité disparaît ? Le bouddhisme enseigne que le nirvâna est réalisé une fois le samsâra transcendé. La notion d'un soi est complètement abandonnée, de sorte que la réalité conditionnée s'évanouit, et ce qui subsiste, s'il reste quelque chose, défit les capacités du langage à le décrire. Pourtant, lors de son retour dans la Matrice, Neo conserve "l'image d'un soi résiduel" et la "projection mentale d'un soi numérique". Lors de son "éveil", il ne se retrouve pas dans un nirvâna, ou dans un non-lieu, mais dans une situation nouvelle avec un sens du soi intact, même s'il est un peu confus, qui ressemble fortement à son moi dans la Matrice. Trinity pourrait avoir raison lorsqu'elle dit que la Matrice "ne peut te dire qui tu es", mais ce que nous sommes ressemble, au moins d'une certaine façon, à ce que nous pensons être dans la Matrice. En d'autres termes, il y a suffisamment de continuité dans le sentiment d'identité dans le monde de la Matrice et dans "le désert du réel" pour supposer que les auteurs donnent à entendre que "l'éveil" complet n'a pas été encore réalisé et qu'il se trouve par-delà la réalité du Nabuchodonosor et du monde qu'il habite. Si le paradigme bouddhiste est suivi jusqu'à ses conclusions logiques, on peut s'attendre à ce qu'il y ait au moins un autre niveau de "réalité" au-delà du monde de l'équipage, car même ceux qui se sont libérés de la Matrice sont toujours sujets à la souffrance et à la mort et continuent de manifester des egos personnels.

Une telle réflexion est corroborée par ce qui semble être la transformation la plus problématique des enseignements traditionnels du bouddhisme dans Matrix. La doctrine bouddhiste de l'ahimsa, la non-violence à l'égard de tous les êtres vivants, est ouvertement démentie par le film [52]. Tout se passe comme si les réalisateurs avaient délibérément choisi de lier la violence à la connaissance salvatrice. Il semble en effet qu'il n'y ait pas d'autres moyens pour l'équipage que de prendre les armes. Lorsque Tank demande à Neo et à Trinity ce qu'ils ont besoin pour sauver Morpheus "en dehors d'un miracle", leur réponse fuse, "des fusils, beaucoup de fusils". Les scénaristes auraient pu facilement présenter "la mort" des agents comme l'effacement d'une portion particulière du programme informatique. Au lieu de cela, les frères Wachowski ont intentionnellement choisi de décrire les êtres humains comme des victimes innocentes de la mort des agents [53]. Cette nette violation de l'ahimsa paraît quelque peu singulière au regard de l'idéal bouddhique de la compassion. (…)

Remarques finales

Que nous regardions le film dans une perspective gnostique chrétienne ou bouddhiste, le message dominant du film semble être " réveille-toi! " Ce qui est rendu explicitement par la chanson finale du film "Réveille-toi!" du justement nommé Rage Against the Machine (La rage contre la machine). Le gnosticisme, le bouddhisme et le film conviennent que l'ignorance nous enchaîne dans un monde matériel illusoire et que la libération vient d'un éveil qui nécessite l'aide d'un enseignant ou d'un guide. Cependant, lorsqu'on pose la question "à quoi s'éveille-t-on ?", le film paraît nettement diverger du gnosticisme et du bouddhisme. Ces deux traditions affirment que lorsque les êtres humains sont éveillés, ils vivent en-dehors du monde matériel. Le gnostique monte après sa mort au plérome, le plan divin de l'existence spirituelle et immatérielle, tandis que l'éveillé dans le bouddhisme atteint le nirvâna, un état qui ne peut être décrit par le langage, mais qui est complètement immatériel. En revanche, "le désert du réel" est un monde pleinement matériel, technologique dans lequel des robots élèvent des humains pour l'énergie, un monde où Neo peut apprendre les arts martiaux en quelques secondes par une carte-mère implantée à l'arrière de son cerveau, où la technologie combat la technologie (le Nabuchodonosor contre l'Intelligence Artificielle, les impulsions électromagnétiques contre les sentinels). Qui plus est, la bataille contre la Matrice n'est possible que par l'usage de la technologie - les téléphones portables, les ordinateurs, les programmes informatiques d'apprentissage. Le "réveille-toi!" du film emmène au-delà de la Matrice à s'éveiller dans un triste cybermonde qui est le véritable monde matériel.

Ou peut-être pas. Il y a plusieurs indices cinématographiques dans la scène du chargement du programme de construction (représenté par un espace blanc) qui suggèrent que le "désert du réel" que Morpheus montre à Neo n'est peut-être pas la réalité ultime. Après tout, Morpheus, dont le nom est repris de celui du dieu des rêves, montre à Neo le monde "réel", mais il ne le voit jamais directement lui-même. Il le visionne plutôt par une télévision qui porte le logo "Image en profondeur". Tout au long du film, les reflets dans les miroirs et dans les lunettes de Morpheus, tout comme les images sur les écrans de télévision incitent le spectateur à prendre en compte de multiple niveaux d'illusion [56]. Lorsque la caméra zoome sur l'écran de cette télévision singulière et que le spectateur "entre" dans l'image, elle "morphe" comme le font plus tôt dans le film les écrans de surveillance, montrant de cette façon son irréalité. De plus, la séquence entière a lieu lorsqu'ils se trouvent dans le programme de chargement de la construction où Neo est mis en garde contre le piège des apparences. Bien que la perception sensorielle ne soit clairement pas une source fiable pour fonder la réalité, Morpheus lui-même admet que : "Pendant longtemps je n'ai pas pu le croire, jusqu'à ce que je vis les champs [où l'on élève les humains pour l'énergie] de mes propres yeux… Et là, j'en vins à réaliser l'évidence de la vérité." Nous n'avons pas besoin d'attendre Matrix 2 pour découvrir que "le désert du réel" est lui-même réel [57].

Même si la série ne conduit pas finalement à un rejet total du monde matériel, Matrix tel qu'il se donne à voir affirme néanmoins la supériorité de la capacité humaine à imaginer et à se réaliser sur l'intelligence "limitée" de la technologie. Qu'il soit exprimé en termes de matérialité/spiritualité, corps/esprit, matériel/programme informatique ou illusion/vérité, le message ultime de Matrix semble être qu'il pourrait y avoir plusieurs niveaux de réalité métaphysique au-delà de ce que nous percevons ordinairement, et que le film nous presse de nous ouvrir à la possibilité de s'y éveiller.

nb : les notes de l'article sont très intéressantes

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Tout cela est fort intéressant, en effet, mais je n'y vois pas la négation du libre-arbitre.

Par ailleurs, ce film n'a nullement la prétention de représenter le bouddhisme. Il représente peut être une vision moderne d'une spiritualité syncrétique, mais je n'y vois pas non plus d'opposition au libéralisme.

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Tout cela est fort intéressant, en effet, mais je n'y vois pas la négation du libre-arbitre… mais je n'y vois pas non plus d'opposition au libéralisme.

C'est bon signe ça, vu ta faible aptitude habituelle à comprendre des thèses philosophiques, ton avis offre un bon détecteur d'erreur, indiquant ici que mes propositions sont justes.

La philosophie libérale commence par affirmer l'existence séparée des choses, l'identité d'individus qui sont dotés de leur propre moteur (libre arbitre), capables d'accumuler richesse et propriété aux prix du fruit de leurs efforts ici-bas. Le libéralisme affirme l'autonomie de la personne, des droits attachés à la personnalité et des buts propres à chacun, il découvre que l'action humaine a ses propres règles sui generis.

Le bouddhisme, en niant l'existence de ces séparations (la cuillère n'existe pas, elle est une projection de l'esprit qui reflette sa vanité et sa vacuité), en supposant que le sujet est une illusion, est donc l'exacte négation du libéralisme.

Le libéralisme naît de l'empirisme (Hume, Locke, Mises) qui affirme que nos connaissances découlent de l'expérience et des informations qui nous sont livrées par les sens, que les sens ont raison et sont dignes de confiance. Cette connaissance sensible implique l'unité profonde des représentations, des objets perçus, liés à l'identité du sujet et à sa faculté de maîtriser son environnement. Le libéralisme se contruit donc en opposition à l'idéalisme postulant que les sens nous trompent, que le monde sensible est une illusion, et qu'il faut se détourner de la réalité sensible pour accéder au prétendu monde vrai.

Le libéralisme est fondamentalement optimiste et offre à chacun l'opportunité de remplir son existence de valeurs en suivant une éthique propre; le bouddhisme est fondamentalement pessimiste quant aux espérances légitimes de chacun et détruit toute hiérarchie des valeurs.

Le droit naturel classique découle du caractère intangible de la vie humaine, alors que le bouddhiste croit que la vie humaine n'a aucune valeur en soi, puisqu'elle n'est qu'illusion, vide et souffrance.

etc

CQFD

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Le droit naturel classique découle du caractère intangible de la vie humaine, alors que le bouddhiste croit que la vie humaine n'a aucune valeur en soi, puisqu'elle n'est qu'illusion, vide et souffrance.

Un petit peu incohérent avec le reste du fil, n'est-il pas ?

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Le libéralisme naît de l'empirisme (Hume, Locke, Mises)

Mises était-il empiriste ? Il me semblait qu'il était kantien.

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Mises était-il empiriste ? Il me semblait qu'il était kantien.

Tu as raison puisqu'il est aprioriste au sens de la praxélologie. Mais n'oublie pas que les règles de la praxéologie se découvrent par l'expérience de l'action humaine. Mises est pragmatique. Pour Kant c'est pareil du point de vue de la connaissance: les règles de la raison pure se déduisent, mais toute connaissance universalisable par la raison vient de l'expérience. C'est pourquoi sa philosophie est une critique, critique qui détruit la théologie et la métaphysique, puis barre la route à une science purement spéculative (dogmatisme). Même si c'est un empirisme d'un type un peu particulier, puisqu'il se fonde sur la découverte de la raison pure et de ses catégories. Ce qui compte par rapport à ma description, c'est que ce soit le sujet autonome qui organise (et universalise) la connaissance par l'unité de ses perceptions, sans laquelle le réel serait anarchique.

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Je ne vois pas de réelle contradiction. Selon le libéralisme, l'homme est libre de poursuivre les fins qu'il souhaite tant qu'il n'enfreint pas le droit d'un autre individu. Selon le bouddhisme et les autres religions, l'homme est libre de poursuivre les fins qu'il souhaite, mais certaines fins sont meilleures que d'autres.

C'est évidemment caricatural et simplifié, mais cela illustre simplement qu'il n'existe pas de contradiction fondamentale entre libéralisme et religion.

Religion et libéralisme n'ont pas le même projet. Le libéralisme ne propose pas le salut de l'âme, mais il ne l'empêche pas.

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C'est évidemment caricatural et simplifié, mais cela illustre simplement qu'il n'existe pas de contradiction fondamentale entre libéralisme et religion.

Religion et libéralisme n'ont pas le même projet. Le libéralisme ne propose pas le salut de l'âme, mais il ne l'empêche pas.

Comme d'habitude complètement à côté POE, je parle ci du bouddhisme en tant que philosophie, ce n'est pas la peine de venir caricaturer avec tes gros sabots.

Evidemment que des bouddhistes ont leur place dans une communauté libérale ; enfin du moment qu'ils ne sont pas trop nombreux, ne font pas de prosélytisme ni de politique, et restent pacifiques. Mais l'inverse n'est pas vrai, une communauté qui opterait pour les principes bouddhistes comme règles rendrait impossible le libéralisme, comme cela se vérifie partout où la mentalité bouddhique domine les esprits.

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Mais l'inverse n'est pas vrai, une communauté qui opterait pour les principes bouddhistes comme règles rendrait impossible le libéralisme, comme cela se vérifie partout où la mentalité bouddhique domine les esprits.

Je ne sais vraiment pas pourquoi tu as cette idee fixe, ca ne correspond pas a la realite.

Pour rappel, le parti politique de la soka gakkai, secte bouddhiste, c'est ca:

Domestically, the party proposals include reduction of the central government and bureaucracy, increased transparency in public affairs, and increased local (prefectural) autonomy with the private sector playing an increased role.

Tu connais beaucoup de grand partis politique aussi liberal que ca en europe ?

"Reduction du gouvernement et de la bureaucratie", "transparence dans les affaire publique", "plus d'autonomie locale" et "secteur prive qui joue un role plus important". Pas mal pour des bouddhistes fondamentalement anti-liberaux.

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J' en profite pour te citer comme promis les dix devoirs bouddhiste d' un Roi (chef etat, gouvernement, ministre, et tutu quanti):

-dânâ: libéralité, générosité, charité ( pas d' attachement pour la richesse et la propriété, en disposer pour le bien du peuple)

-sîla: caractère moral élevé: jamais détruire la vie, tromper, voler, exploiter les autres, commettre l' adultère, dire des choses fausses.

-parriccâga: sacrifer tout au bien du peuple: sacrifier son confort, son nom, sa renommée dans l' intérêt du peuple.

-ajjava: hônneteté et intégrité: sincère dans ses intentions , ne doit pas tromper le public

-(aucun intérêt)

-tapa: austérité dans ses habitudes: mener une vie simple, ne doit pas se laisser aller au luxe, en possession de lui même

-absence de haine, mauvais vouloir

-avihimsa: non-violence

-khanti: patience, pardon tolérance, compréhension: supporter les épreuves, les difficultés.

-avirodha: non opposition, obstruction: ne pas s' opposer à la volonté populaire, ne contrecarrer aucune mesure favorable au bien être du peuple: se tenir en harmonie avec lui.

Je te vois déjà parcourir chaque mot pour leur faire dire ce que tu veux. Il faut interprêter avec l' oeil d' aujourd'hui :icon_up: Mais si tu remarques bien , un tel gouvernement serait idéalement libéral et efficace.

Pour précision : les Rois injustes qui levaient des impôts excessifs existaient du temps de Bouddha.

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1) Le bouddhisme ne se donne aucunement pour but d'établir la paix dans le monde ni de transformer l'Homme (tout au plus chaque homme est libre d'évoluer, de se transformer lui même, vision commune au bouddhisme et aux philosophies antiques occidentales).

Texte zen :

Malgré tout, il [Honen] s'interrogeait sur la voie qui conduit à l'Eveil et ne comprenait pas le véritable sens du nirvana. C'est pourquoi il lut et examina autant de textes que possible, médita profondément et considéra toutes les hypothèses pour finalement rejeter tous les sutras et établir la pratique exclusive du Nembutsu. De plus, renforcé dans sa décision par une apparition miraculeuse de Shandao en rêves, il propagea sa doctrine aux quatre coins du pays parmi ses amis et parmi des inconnus. Pour cela, il fut considéré comme une réincarnation du bodhisattva Seishi, ou fut révéré comme une réincarnation de Shandao.

[…] A l'heure actuelle, si nous voulons avant tout apporter la sécurité au pays et prier pour notre bonheur, en cette vie et dans nos vies futures, nous devons sans attendre réfléchir à la situation et prendre immédiatement des mesures pour y remédier. […] Attaquons-nous vite à ces oppositions au Dharma et apportons sans retard la paix au monde, nous assurant ainsi conditions paisibles en cette vie-ci et bonne fortune dans la vie future.

Rissho Ankoku ron (Kamakura, juillet 1260)

La croyance dans le cycle des réincarnations (au sens de métempsycose) ne fait pas partie du bouddhisme. (…)

Le concept de renaissance est purement métaphorique et désigne le succession des pensées et des états mentaux dans le temps. Succession qui peut-être contrôlée par la pratique. Mais bon faut pas le dire.

Le bouddhisme tantrique (tibétain) croit fermement à un cycle déterminé de réincarnations sur le quel l'homme n'a aucune prise, puisque le non-soi est enchaîné aux états successifs et transitoires d'ignorance et de souffrance, qu'il ne maîtrise pas. Par exemple le Dalaï Lama lui-même est considéré par ses adeptes comme une réincarnation du Bouddha.

Pour le reste ton interprétation est loin d'être claire. Par exemple dans l'école nichiren, le cycle des vies est posé comme effectif et non pas symbolique :

Ceci étant dit, il n’y a pas de doute que dans mes vies futures, je risque d'être déchu de cette rare opportunité d’être né en tant qu’être humain au Japon, pour renaître dans les trois mauvaises voies.

Shugo Kokka-ron (1259)

[…] nous sommes aussi ignorants que si nous avions des yeux de loup. Nous ne connaissons pas la relation passée que nous avons eue avec la mère qui nous a donné naissance, et nous ignorons à quel moment nous succomberons nous-mêmes à la mort.

Conversation entre un sage et un ignorant (1265)

Et dans le Ninno kyo: "Ceux qui détruisent le bouddhisme (…) tomberont après leur mort en enfer, le monde-état des preta, et dans celui des bêtes et des oiseaux." Ce sont des exemples de junji shogo, c’est à dire le fait de recevoir dans l’existence suivante la rétribution pour des actions commises dans cette vie. Les exemples de jun gogo, le fait de recevoir une punition dans une existence suivant la prochaine, pour des actions commises dans cette vie, sont absents.

Sainan Koki Yurai - La cause des désastres (Kamakura, février 1260)

Même si une personne a commis les dix mauvaises actions ou les cinq forfaits, aussi longtemps qu'elle ne s'écarte pas du Sutra du Lotus, il est certain qu'elle renaîtra sur la Terre pure et atteindra la boddhéité dans sa prochaine vie.

Sur la récitation des chapitres Hoben et Juryo (Kamakura - 1264, à la femme de Hiki Daigaku Saburo Yoshimoto)

Les renaissances dans le bouddhisme, passé - futur.

La renaissance (Samsara, cycle des renaissances) est étroitement liée à l’existence précédente, elle en est même la résultante directe et d’une certaine façon la continuation dans le sens ou la condition du nouvel être est déterminée par les états antérieurs, dont il subit les conséquences.

Selon Siddhârta Gautama, il existerait un lien qui attache les uns aux autres les composés successifs provenant de chaque renaissance. Une sorte de monade vitale qui traverse les degrés de la transmigration sans perdre son identité. La monade survit à toutes les transformations en parcourant toutes les phases évolutives dans le cours de son développement, passant de corps en corps.

A chaque nouvelle naissance, la personnalité diffère de celle qui la précède ou qui lui suivra.

Le Bouddha nous enseigne que la renaissance, le bien et le mal de la vie, la vie elle-même proviennent invariablement du Karma. Ce n’est qu’a la suite d’un très grand nombre de renaissances, après des siècles et des siècles que le sage bouddhiste parviendra au degré suprême de bodhi (sage). Devenu parfait Bouddha, il est élevé pour toujours au dessus des misères et des imperfections de la vie, au dessus des conditions de l’existence, à l’abri des renaissances ultérieures et des transmigrations, le sage est entré dans le Nirvana.

http://www.bouddhiste.org/les_renaissances.htm

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Le bouddhisme tantrique (tibétain) croit fermement à un cycle déterminé de réincarnations sur le quel l'homme n'a aucune prise, puisque le non-soi est enchaîné aux états successifs et transitoires d'ignorance et de souffrance, qu'il ne maîtrise pas. Par exemple le Dalaï Lama lui-même est considéré par ses adeptes comme une réincarnation du Bouddha.

Ce n'est pas exactement ainsi. Si le Dalaï Lama est considéré comme une réincarnation du Bouddha, il faut aussi admettre que sa réincarnation relève d'un choix délibéré : au dessus du cycle des réincarnations, il décide de revenir pour aider les autres.

Par ailleurs, le concept de la réincarnation et de karma (si on peut parler de concept) n'est pas une négation du libre-arbitre mais plutôt l'affirmation d'une liberté supérieure. Chaque individu est effectivement déterminé par les actes qu'il a déjà effectué, précisément parce qu'il a effectué ces actes en usant de son libre arbitre. De la même façon, on considère que le libre arbitre doit lui permettre de faire d'autres choix et d'autres actes de manière à se libérer de ce cycle de souffrance.

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  • 1 month later...
Pour abonder dans le sens de Free Jazz: un spécialiste chrétien des pratiques asiatiques:

http://www.ktotv.com/cms/videos/fiche_vide…=video_a_la_une

à partir de la 25ème minute.

P.S: le reste de la video vaut la peine.

Merci. C'est satisfaisant d'entendre une confirmation que cette nouvelle religiosité néo-bouddhiste prétendument proche de la nature et de l'accomplissement de soi est une résurgence de l'occultisme, en plus d'un culte du néant.

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Merci. C'est satisfaisant d'entendre une confirmation que cette nouvelle religiosité néo-bouddhiste prétendument proche de la nature et de l'accomplissement de soi est une résurgence de l'occultisme.

Le discours est plus nuancé.

Cependant, la technique yogique décrite est une sorte d'étouffement (par la respiration) du soi pour se fondre dans le tout et de revenir au monisme conçu comme ultime degrés de la réalité. Il y a bien un moins-vivant dans cette logique. Le discours chrétien apparaît, par opposition, comme la voie de la rencontre de l'autre dans l'amour. La joie contre la matière.

Le culte de la réalité comme aboutissement de la spiritualité est plus courant qu'on ne le croît.

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Cependant, la technique yogique décrite est une sorte d'étouffement (par la respiration) du soi pour se fondre dans le tout et de revenir au monisme conçu comme ultime degrés de la réalité.

C'est ce que j'ai affirmé tout au long de ce fil (par exemple ici ), en assimilant ces techniques de méditation à une forme de dissolution de la personnalité, avec l'apparence d'une thérapie alternative.

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C'est ce que j'ai affirmé tout au long de ce fil (par exemple ici ), en assimilant ces techniques de méditation à une forme de dissolution de la personnalité, avec l'apparence d'une thérapie alternative.

La description de la méditation et de ses fins en est une excellente illustration.

Par contre, le rapprochement avec l'occultisme et le culte du néant est plus une preuve de votre rejet (que je comprends et trouve saint) du bouddhisme que d'une description wertfrei.

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