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Le rôle de l'État dans la modernisation économique


Magean

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Bonsoir,

J'aimerais savoir en détail comment les partisans du laissez-faire envisagent l'industrialisation et la modernisation économique d'un pays. Bien souvent, lorsqu'un pays se trouve techniquement dépassé, et que ses producteurs n'arrivent plus à faire face à la concurrence étrangère, l'Etat a recours pour les soulager à des mesures protectionnistes, dont les effets pervers sont bien connus ici : préservation de modes de production archaïque (puisque la concurrence étrangère plus efficace n'est plus là pour aiguillonner les producteurs locaux et les inciter à se moderniser), baisse du pouvoir d'achat des consommateurs à cause de la hausse des prix, affaiblissement de secteurs normalement rentables - ceux qui perdent des ventes à cause de la baisse du pouvoir d'achat. Bref, détournement des forces productives depuis des secteurs efficaces vers des secteurs non rentables.

Néanmoins, l'Etat intervient parfois différemment dans la modernisation : des investissements d'Etat pour lui donner une impulsion, pour gérer la restructuration de l'économie, l'élimination "en douceur" des secteurs obsolètes… C'est par exemple le rôle du MITI au Japon.

Je vais prendre un exemple : celui de la crise agricole qu'a connue la France à la fin du XIXe siècle (grosso modo, les vingt dernières années). La cause principale de cette crise est l'arriération de l'agriculture française, incapable de faire face à la concurrence européenne, mais aussi américaine, australienne, argentine… alors même que la France concentrait une bonne part des meilleures terres d'Europe occidentale.

Ce retard a lui-même plusieurs causes. D'une part, le conservatisme têtu des paysans français, refusant d'abandonner les méthodes ancestrales pour adopter les nouvelles technologies (notamment celles concernant les engrais chimiques) ; il semble que cela ait beaucoup joué : on pourrait presque dire que les agriculteurs français préféraient l'appauvrissement au changement.

D'autre part, la structure des exploitations agricoles en France. Alors qu'ailleurs dans le monde moderne, les grandes exploitations réunissaient une bonne partie des surfaces cultivées, chez nous les petits exploitants étaient très nombreux, peut-être à cause de l'abolition précoce du droit d'aînesse. Ainsi, tous ces petits paysans, même lorsqu'ils souhaitaient se moderniser, étaient trop pauvres pour le faire - alors que les gros propriétaires étrangers pouvaient, eux, dégager les capitaux nécessaires. Il semble également que le manque d'éducation de ces masses paysannes ait joué un rôle dans leur conservatisme : ils étaient sans doute peu au fait de ce qui se pratiquait ailleurs, ils n'avaient qu'une vague idée des progrès techniques qui de ce fait les inquiétaient, et enfin ils faisaient sans doute de piètres négociants…

On peut également citer la mauvaise répartition des cultures : soit polyculture inefficace, les paysans cherchant à produire un peu de tout, quitte à consacrer à une production des terres qui lui étaient impropres, soit au contraire monoculture trop intensive (par exemple, les viticulteurs du midi), et donc trop grande sensibilité aux variations du prix de l'unique denrée produite, ainsi qu'aux aléas de sa production (maladies…).

Voilà pour les principales causes.

Donc, la crise commence aux alentours de 1880. Au début des années 1890, elle n'avait fait qu'empirer. Les paysans s'étaient appauvris, et la modernisation n'était pas enclenchée. En réponse, le ministre de l'agriculture, Jules Méline, mit en place ses fameux tarifs Méline - lourdes mesures protectionnistes qui permirent d'améliorer la situation des agriculteurs français, mais qui eurent les effets pervers décrits plus haut - et qui en particulier, dissuadèrent toute modernisation.

Maintenant, d'un point de vue libéral, les choses auraient, si je ne m'abuse, dû se passer ainsi : la concurrence étrangère aurait poussé les agriculteurs à se moderniser, et aurait éliminé les exploitations impossibles à rendre rentabilise ; de telle sorte que la France, et à l'intérieur d'elle chaque région, et à l'intérieur des régions chaque agriculteur, se serait spécialisée dans les productions pour lesquels elle était relativement plus efficace.

Mais si l'on en revient aux faits, il semble que ce processus était fort mal parti. Les agriculteurs n'adoptaient pas les nouvelles techniques, la structure des exploitations n'évoluait pas. Seule la pauvreté rurale s'accentuait. Cela conduisit à plusieurs reprises à de l'agitation dans les campagnes, à des troubles sociaux - qui auraient pu empirer si rien n'avait été fait. Par ailleurs, si l'on avait laissé l'agriculture française dépérir (puisque toute modernisation semblait impossible), on aurait quand même eu droit à un beau gâchis : toutes ces terres, potentiellement si rentables, et pourtant sous-exploitées…

C'est pourquoi, à mon avis, il aurait fallu que l'Etat intervienne non pas à coups de protectionnisme, mais en accompagnant, stimulant, la modernisation. Mais je ne vois pas comment la situation aurait pu s'arranger d'elle-même.

Donc, il me faudrait l'avis de partisans du laissez-faire sur la question. Et, de manière plus générale, une réponse à la question suivante : comment une économie arriérée peut-elle se moderniser face à la concurrence étrangère, et sans l'impulsion de l'Etat ? Un autre exemple, certains protectionnistes mettent en avant le cas des Etats-Unis au XIXe siècle, où le protectionnisme éducateur (destiné à permettre à des industries naissantes de se développer) a selon eux joué en rôle important. Même si je ne suis pas vraiment convaincu, en raison de ma méfiance vis-à-vis du protectionnisme, j'aimerais avoir l'avis détaillé d'un libéral. On pourrait également parler de la Corée du Sud : si l'Etat n'avait pas favorisé le développement des industries de haute technologie, ce pays ne se serait-il pas spécialisé dans l'agriculture, et donc ne serait-il pas passé à côté de tout le potentiel que l'on voit exploité aujourd'hui ?

Voilà voilà, fin de mon pavé. Merci d'avance pour vos réponses :)

EDIT : deux, trois corrections de forme dans le dernier paragraphe.

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J'aimerais savoir en détail comment les partisans du laissez-faire envisagent l'industrialisation et la modernisation économique d'un pays.

Ils ne l'envisagent pas.

Sinon, rappelle-toi Bastiat : ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas…

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on pourrait presque dire que les agriculteurs français préféraient l'appauvrissement au changement.

Oui bon heu en fait humainement c'est déjà hautement improbable. Les Français, certes, ne sont en moyenne pas des lumières, mais ce ne sont pas tous des mongoliens non plus, ce qui veut dire qu'on peut raisonnablement penser que les raisons réelles d'une arriération de l'agriculture ne sont pas celles-là.

D'autre part, la structure des exploitations agricoles en France. Alors qu'ailleurs dans le monde moderne, les grandes exploitations réunissaient une bonne partie des surfaces cultivées, chez nous les petits exploitants étaient très nombreux, peut-être à cause de l'abolition précoce du droit d'aînesse. Ainsi, tous ces petits paysans, même lorsqu'ils souhaitaient se moderniser, étaient trop pauvres pour le faire - alors que les gros propriétaires étrangers pouvaient, eux, dégager les capitaux nécessaires. Il semble également que le manque d'éducation de ces masses paysannes ait joué un rôle dans leur conservatisme : ils étaient sans doute peu au fait de ce qui se pratiquait ailleurs, ils n'avaient qu'une vague idée des progrès techniques qui de ce fait les inquiétaient, et enfin ils faisaient sans doute de piètres négociants…

Là encore, les exemples ne manquent pas dans d'autres pays pour voir que cette explication, certainement plus solide que la précédente, ne couvre pas toute les raisons non plus.

J'aurais tendance à penser que l'existence de multiples règles locales, régionales et nationales, ainsi que des corporations et des taxations diverses et variées plus des petits enjeux politiques locaux devait constituer une troisième très bonne raison à l'enlisement agricole français en plus des pb de remembrement et de conservatisme + ou - réel.

Mais des historiens (qui trainent parfois dans le coin) pourraient certainement nous donner quelques pointeurs intéressants.

C'est pourquoi, à mon avis, il aurait fallu que l'Etat intervienne non pas à coups de protectionnisme, mais en accompagnant, stimulant, la modernisation. Mais je ne vois pas comment la situation aurait pu s'arranger d'elle-même.

[/Quote]

Ah bah le manque d'imagination n'est pas une explication. En outre, dire que l'état a aidé (après tout pourquoi pas) ne veut pas dire que le non interventionnisme n'aurait pas aussi bien voire mieux fait.

Mieux : l'absence de toute intervention + une libéralisation encore plus forte de la propriété et des tarifs, taxes et divers aurait peut-être amélioré la situation encore plus vite…

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Ah bah le manque d'imagination n'est pas une explication.

Ce que je veux dire, c'est qu'en une grosse dizaine d'années, la situation n'a pas fait mine de s'améliorer. D'où mon scepticisme quant à une auto-résorbation de la crise.

En outre, dire que l'état a aidé (après tout pourquoi pas)

En fait, je ne dis pas que l'Etat a vraiment aidé puisque je critique la politique qu'il a employée (choix du protectionnisme). Je dis qu'il aurait pu aider véritablement en propulsant la modernisation.

Chitah : Oui bien sûr, les investissements d'Etat dans les innovations technologiques risquent d'être détournés et de donner lieu à des affaires de corruption grotesques… Mais ici, je ne dis pas que l'Etat aurait dû soutenir de nouveaux projets assez hypothétiques. Je dis qu'il aurait juste dû aider à implémenter ce qui marchait partout à l'étranger.

Sinon je voulais souligner le fait que ton texte est plutôt bien fait pour ton âge

Les bienfaits de l'Education Nationale. :P

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Ce que je veux dire, c'est qu'en une grosse dizaine d'années, la situation n'a pas fait mine de s'améliorer. D'où mon scepticisme quant à une auto-résorbation de la crise.

Il y a eu plus spectaculaire dans l'histoire humaine.

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D'où mon scepticisme quant à une auto-résorbation de la crise.

Effectivement, avec l'état qui ne cesse de charger la barque pendant la tempête, c'est sûr qu'on n'est pas près d'arriver à bon port.

Je dis qu'il aurait juste dû aider à implémenter ce qui marchait partout à l'étranger.

Ah ouais, paske les entrepreneurs français, ils sont trop cons pour reproduire ce qui se fait de bien à l'étranger. Faut que ce soit un fonctionnaire qui s'y colle.

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Effectivement, avec l'état qui ne cesse de charger la barque pendant la tempête, c'est sûr qu'on n'est pas près d'arriver à bon port.

Il faudrait une étude comparative des taxes et charges pesant sur les agriculteurs des différents pays. Mais je ne suis pas sûr qu'à l'époque, les Français étaient si taxés que ça relativement aux pays voisins.

Ah ouais, paske les entrepreneurs français, ils sont trop cons pour reproduire ce qui se fait de bien à l'étranger. Faut que ce soit un fonctionnaire qui s'y colle.

Bah apparemment, rien n'a bougé en plus de dix ans. Les agriculteurs étaient toujours (et même encore plus) incapables de financer une modernisation de leur méthodes et matériels, et les organismes de crédit ne semblaient pas prendre le relais pour les aider. Donc, que fallait-il faire ?

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Bah apparemment, rien n'a bougé en plus de dix ans. Les agriculteurs étaient toujours (et même encore plus) incapables de financer une modernisation de leur méthodes et matériels, et les organismes de crédit ne semblaient pas prendre le relais pour les aider. Donc, que fallait-il faire ?

Pourquoi serait-il nécessaire de les moderniser, si le profit à en tirer est nul ?

Si le profit à en tirer n'est pas nul, dans ce cas, il ne fait aucun doute que le marché (spécialement si à l'étranger c'est déjà validé) à un moment donné fournira les capitaux pour financer cette modernisation.

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Je vais être un peu cynique: et si, dans le cas du dépérissement, au bout d'un certain temps le nombre d'agriculteurs se serait réduit ? Les plus réfractaires ou incapables de changement auraient disparu. Ceux qui essayaient de s'adapter seraient restés, auraient récupéré les terres des autres. Le nombre de propriétaires aurait diminué (résolution d'un des problèmes) et par cette concentration l'augmentation des moyens aurait permis une modernisation plus rapide et un plus grand intérêt des investisseurs.

Dans cette hypothèse, les aides de l'Etat sous forme de subvention a aidé les agriculteurs voués à disparaître, et a empêché ce processus.

Avec la PAC aujourd'hui c'est pareil, on permet juste aux agriculteurs de survivre sans rien changer donc sans rien résoudre.

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Pourquoi serait-il nécessaire de les moderniser, si le profit à en tirer est nul ?

Si le profit à en tirer n'est pas nul, dans ce cas, il ne fait aucun doute que le marché (spécialement si à l'étranger c'est déjà validé) à un moment donné fournira les capitaux pour financer cette modernisation.

La France est quand même l'un des pays européens les plus généreusement dotés par la nature pour ce qui est de la quantité et de la qualité des terres cultivables. Toutes choses égales par ailleurs, l'agriculture française devrait être beaucoup plus productive que celle de ses voisins. J'ai donc du mal à croire que le profit à tirer d'une modernisation aurait été nul.

Sinon, il se peut en effet qu'il y ait eu des obstacles réglementaires au niveau de la formation et de la gestion des organismes de crédit dans les zones rurales. Pourquoi pas ? A voir.

Je vais être un peu cynique: et si, dans le cas du dépérissement, au bout d'un certain temps le nombre d'agriculteurs se serait réduit ?

Au bout d'un certain temps, étant donné la part des ruraux dans la population française de l'époque (plus de 60%), on aurait surtout fini par gagner des jacqueries, voire une révolution.

Dans cette hypothèse, les aides de l'Etat sous forme de subvention a aidé les agriculteurs voués à disparaître, et a empêché ce processus.

Je suis tout à fait d'accord. Les tarifs Méline ont d'ailleurs joué un rôle important dans le creusement du retard industriel de la France vis-à-vis, notamment, de l'Allemagne.

Néanmoins, il semble que les agriculteurs français, même avant la mise en place du protectionnisme, ne se soient pas déplacés dans les villes aussi massivement que les Allemands à la même époque, ou que les Anglais cinquante ans plus tôt. Peut-être ressentaient-ils un attachement plus fort à la vie rurale ?

En tout cas, peut-être que l'Etat aurait pu "aider" l'exode rural. Encourager les agriculteurs à vendre leur terrain et à s'installer en ville… Histoire d'éviter aussi bien une lente agonie et douloureuse agonie à l'agriculture française, qu'un protectionnisme rétrograde.

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En tout cas, peut-être que l'Etat aurait pu "aider" l'exode rural. Encourager les agriculteurs à vendre leur terrain et à s'installer en ville… Histoire d'éviter aussi bien une lente agonie et douloureuse agonie à l'agriculture française, qu'un protectionnisme rétrograde.

Le problème, c'est qu'il aurait tout aussi bien pu faire l'inverse. Car tu étudies l'hypothèse selon laquelle l'Etat aurait su ce qu'il fallait faire; mais la situation de base aurait plutôt été "l'Etat agit". Et quand l'Etat agit, ça peut être bien ou mal, en l'occurrence ça a été mal…

Donc au final le truc c'est qu'en supposant que l'Etat agit bien, tu pourras effectivement trouver des avantages à cet interventionnisme face au libéralisme. Le problème c'est que ce n'est absolument pas généralisable à la réalité. C'est d'ailleurs précisément ce que dit la philosophie libérale: il est impossible d'avoir des omniscients à la tête d'un Etat planificateur, et pour quelques bonnes actions on va en avoir pas mal de mauvaises + actions dérivées par clientélisme, avarisme, etc (bonjour les subprimes).

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Ah ouais, paske les entrepreneurs français, ils sont trop cons

On enlève le mot "entrepreneurs" (ou pas) et on reconnait bien là le style de Lucilio. Ce n'est donc pas de l'ironie.

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Néanmoins, il semble que les agriculteurs français, même avant la mise en place du protectionnisme, ne se soient pas déplacés dans les villes aussi massivement que les Allemands à la même époque, ou que les Anglais cinquante ans plus tôt. Peut-être ressentaient-ils un attachement plus fort à la vie rurale ?

Ou bien peut-être étaient-ils nettement plus productifs, et pouvaient-ils donc faire encore subsister leur famille sur leurs terres.

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Le problème, c'est qu'il aurait tout aussi bien pu faire l'inverse. Car tu étudies l'hypothèse selon laquelle l'Etat aurait su ce qu'il fallait faire; mais la situation de base aurait plutôt été "l'Etat agit". Et quand l'Etat agit, ça peut être bien ou mal, en l'occurrence ça a été mal…

Donc au final le truc c'est qu'en supposant que l'Etat agit bien, tu pourras effectivement trouver des avantages à cet interventionnisme face au libéralisme. Le problème c'est que ce n'est absolument pas généralisable à la réalité. C'est d'ailleurs précisément ce que dit la philosophie libérale: il est impossible d'avoir des omniscients à la tête d'un Etat planificateur, et pour quelques bonnes actions on va en avoir pas mal de mauvaises + actions dérivées par clientélisme, avarisme, etc (bonjour les subprimes).

Oui, c'est vrai. En laissant aux politiciens et aux bureaucrates les clefs de l'économie, on s'expose à de gros risques.

Néanmoins, c'est cet épisode de crise qui me laisse perplexe. Peut-être que ces problèmes auraient fini par disparaître d'eux-mêmes, sans intervention de l'Etat - mais cela aurait sans doute pris très longtemps (étant donné la situation que j'ai décrite plus haut), et ce processus aurait été accompagné d'un certain nombre de révoltes, troubles… Du moins, en ce qui concerne le problème structurel lié à la fragmentation des terres cultivables en France.

Après, pour ce qui est de la modernisation des techniques, je me demande également ce qui retenait les investisseurs privés… Peut-être des contraintes réglementaires, sait-on jamais. J'aurais une autre réponse : les petits paysans français étaient dans un état d'endettement chronique. Les banques rechignaient peut-être à leur prêter encore plus d'un coup.

Ou bien peut-être étaient-ils nettement plus productifs, et pouvaient-ils donc faire encore subsister leur famille sur leurs terres.

Rendements de blé en quintaux par hectare :

1880 :

France : 11 Belgique : 15,6 Allemagne : 12,9 Angleterre : 16,4 Hollande : 16,9 Danemark : 24,6

1890 :

France : 12,7 Allemagne : 14,4 Angleterre : 20,6 Hollande : 17,7 Danemark : 22,2

1900 :

France : 12,9 Belgique : 22,5 Allemagne : 18,7 Angleterre : 19,2 Hollande : 20,4 Danemark : 27,5

Chiffres tirés de ce document (p. 533 de l'extrait) :

http://www.persee.fr…num_21_4_407929 (dont la lecture m'a incité à venir ici me renseigner) et donc indirectement de l'Annuaire statistique de 1938.

Il est donc clair que la France n'était pas assez productive, du moins pour le blé, et progressait trop lentement pour pouvoir rattraper ses voisins dans des délais raisonnables.

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Attention aux rendements à l'hectare : les grands pays (en surface) ont beaucoup de bonnes terres et la nécessité des hauts rendements n'est pas la même que lorsque les surfaces sont plus restreints. Faut normaliser avec la densité d'habitant. Ça coûte des sous d'investir dans ce qu'il faut pour des hauts rendements : quand on a de grandes surfaces c'est plus simple d'atteindre un bon revenu.

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Certes, selon cette optique on peut peut-être éliminer la Belgique, le Danemark, la Hollande, voire l'Angleterre (qui n'était plus du tout un pays agricole). Par contre, l'Allemagne reste dans la même catégorie que la France. Et, du coup, on s'aperçoit en effet que la productivité en quintaux par hectare a augmenté de 1,7 en France et de 1,5 en Allemagne dans la période 1880-1890. C'est-à-dire à peu près d'un même montant. La période 1890-2000 est faussée par les tarifs Méline qui ont maintenu la productivité française dans l'arriération. Du coup, peut-être que l'Allemagne a subi le même genre de crise au même moment…

La différence principale étant que la population rurale était quand même en proportion plus importante en France qu'en Allemagne. Si je peux retrouver mes chiffres…

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Rendements de blé en quintaux par hectare :

1880 :

France : 11 Belgique : 15,6 Allemagne : 12,9 Angleterre : 16,4 Hollande : 16,9 Danemark : 24,6

1890 :

France : 12,7 Allemagne : 14,4 Angleterre : 20,6 Hollande : 17,7 Danemark : 22,2

1900 :

France : 12,9 Belgique : 22,5 Allemagne : 18,7 Angleterre : 19,2 Hollande : 20,4 Danemark : 27,5

Je rejoins Mathieu_D : Il faut rapporter ça à la population.

La différence principale étant que la population rurale était quand même en proportion plus importante en France qu'en Allemagne. Si je peux retrouver mes chiffres…

Et elle était plus importante en France parce que l'agriculture pouvait y soutenir plus de gens, probablement. L'exode rural commence quand il y a trop de bras à la campagne par rapport à la productivité qu'on peut en attendre, ou trop de bouches à nourrir par rapport à ce que la Terre peut livrer comme fruits. Si la moitié de la population vivait encore à la campagne dans les années 30 en France, dont les deux tiers directement occupés aux champs, c'est parce que l'agriculture française était suffisamment productive.

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@Magean : attention avec ce genre d'exercice de pensée, tu peux verser dans l'utilitarisme : dire "ça, c'est plus utile, il faut donc le favoriser absolument", c'est très dangereux si tu laisse la part "favoriser" à faire effectuer par l'Etat. Et comme déjà dit plus haut, on est plus intelligent après qu'avant. Tu peux dire que telle ou telle politique est meilleure, parce que tu as le paradoxe du survivant. Tu regardes la situation vue d'aujourd'hui.

La meilleure solution, émergente, c'est de laisser chacun faire à son échelle ce qui est mieux pour lui. Au final, dix ans plus tard, la situation a changé.

Si tu veux un parallèle avec aujourd'hui : l'explosion des nouvelles technologies et de leurs bénéfices demandent aujourd'hui des réseaux beaucoup plus gros. La fibre optique partout : imagine ce que tu pourrais faire avec du 100 Mbits/seconde chez toi, pour envoyer et recevoir.

Pour l'instant, c'est impossible (personne n'a les fonds pour faire ça au niveau européen, ni même au niveau national).

En tant qu'informaticien, et geek qui plus est, je devrais sauter à la gorge de tout le monde (spécialement des parlementaires), pour réclamer des lois et des subventions pour avoir La Fibre Pour Tous. Imagine les business qui vont se développer ! Imagine l'industrie de la connaissance du XXI° siècle ! Imagine les emplois qui vont se créer, ou tout simplement les possibilités de recaser les chômeurs actuels (un mec qui doit regarder passer des pièces sur une chaîne de montage devant un écran lumineux, ça coûte cher pour ce qu'il représente comme coût. Avec de la fibre, tu le laisses chez lui, tu streames les vidéos de la chaîne de montage en temps réel, et le boulot est fait… Tu imagines les bénéfices pour tout le monde ?)

L'IT, je voudrais voir ça comme l'agriculture du XXI° siècle.

Pourtant, la plus grave erreur serait de laisser faire ça par l'Etat. Si aucun investisseur privé n'est dessus pour l'instant, c'est que le coût en réglementation, les barrières à l'entrée sont trop importantes. Les profits sont pour l'instant inexistants en regard de l'investissement. Tu dois d'abord éduquer les gens à ça, et qu'ils voient les bénéfices, un par un.

En conclusion, un Gosplan, ça ne marche pas, jamais. La seule chose qu'une autorité centrale devrait faire, c'est laisser les gens construire l'avenir tout seul, en s'assurant que pendant le temps de la crise, la propriété et les droits de chacun soient respectés (pour éviter les jacqueries dont tu parles, justement).

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Si tu veux un parallèle avec aujourd'hui : l'explosion des nouvelles technologies et de leurs bénéfices demandent aujourd'hui des réseaux beaucoup plus gros. La fibre optique partout : imagine ce que tu pourrais faire avec du 100 Mbits/seconde chez toi, pour envoyer et recevoir.

Pr00000000000000000000000000n !

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attention avec ce genre d'exercice de pensée, tu peux verser dans l'utilitarisme

Hélas, le pire c'est que j'en ai bien conscience. Je me dis souvent que je dois éviter l'écueil utilitariste. Mais, parfois, j'y retombe - et ici, ce que je sais de cette crise agricole, et de sa durée, me laisse perplexe face à une résolution spontanée du problème.

Après, il faudrait effectivement comparer les impôts et normes entravant le travail des agriculteurs français avec ceux en vigueur à l'étranger. Mais, justement, je crois que la France avait, à cette période, l'un des Etats d'Europe occidentale les moins interventionnistes : les Anglais avaient eu les lois sociales de Disralei, les Allemands le système bismarckien de retraite et de sécurité sociale… Ce qui laisserait penser que les Français devaient être un peu moins imposés que leurs voisins. Idem pour le code du travail.

Si la moitié de la population vivait encore à la campagne dans les années 30 en France, dont les deux tiers directement occupés aux champs, c'est parce que l'agriculture française était suffisamment productive.

C'était surtout parce que les tarifs Méline avaient préservé la nature rurale de la France au détriment de son industrialisation, à mon avis.

D'une manière générale, je ne suis pas d'accord avec l'argument consistant à dire : "l'agriculture française était suffisamment productive". S'il n'y avait pas eu de problème de productivité, il n'y aurait pas eu d'appauvrissement des ruraux (voir les graphiques du lien que j'ai indiqué à la page d'avant) et de difficulté à lutter contre la concurrence étrangère. Et donc pas de crise ressentie.

c'est laisser les gens construire l'avenir tout seul, en s'assurant que pendant le temps de la crise, la propriété et les droits de chacun soient respectés (pour éviter les jacqueries dont tu parles, justement).

Faire respecter les droits de propriété, dans ce cas, ça veut dire tirer dans le tas si jamais des émeutiers ruinés s'en prennent à la propriété d'autrui. Mieux vaudrait éviter d'en arriver là, non ? Dans ce cas-là, une solution libérale serait un "safety net", je me trompe ?

Pour résumer, mon problème, c'est que je n'ai pas l'impression que les choses s'amélioraient- ou s'amélioraient suffisamment rapidement rapidement pour éviter des troubles.

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En tant qu'informaticien, et geek qui plus est, je devrais sauter à la gorge de tout le monde (spécialement des parlementaires), pour réclamer des lois et des subventions pour avoir La Fibre Pour Tous. Imagine les business qui vont se développer ! Imagine l'industrie de la connaissance du XXI° siècle ! Imagine les emplois qui vont se créer, ou tout simplement les possibilités de recaser les chômeurs actuels (un mec qui doit regarder passer des pièces sur une chaîne de montage devant un écran lumineux, ça coûte cher pour ce qu'il représente comme coût. Avec de la fibre, tu le laisses chez lui, tu streames les vidéos de la chaîne de montage en temps réel, et le boulot est fait… Tu imagines les bénéfices pour tout le monde ?)

Ce que tu dis est juste mais l'argument le plus important est bien plus profond : pour faire un enfant, une femme a besoin de 9 mois. Si tu prends neuf femmes, tu n'auras pas un bébé en un mois.

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Hmm ok. Cela nécessite plus ample réflexion.

A part ça, que pensez-vous du rôle du MITI dans l'économie japonaise ?

Et de l'argument consistant à dire : les USA se sont industrialisés au XIXe siècle parce que leur Etat a permis le développement de l'industrie nationale, en mettant en place des barrières douanières contre les produits britanniques plus compétitifs ?

Ah, et j'aimerais une réfutation un tout petit peu détaillée - pas un troll monoligne.

Merci d'avance

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A part ça, que pensez-vous du rôle du MITI dans l'économie japonaise ?

Je dirais que quand j'étais aussi jeune que toi, le MITI me fascinait aussi. Je ne dis pas ça pour être vilain, la valeur n'attendant pas le nombre des années, mais je suis convaincu que petit à petit les défauts de ce genre de structures dont la vocation est ahurissante de manque de modestie.

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