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Archéologie de la valeur & entropie liborgienne


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Un problème peut être très simple mais prendre des heures à décortiquer parce qu'il est enseveli sous une tonne de bullshit.

Certes, mais dans le cas qui nous intéresse, il a bien fallu qu'il se pose à quelqu'un (Aristote) avant même qu'il existe déjà tout un discours pour l'embrouiller.

 

Le problème n'est pas extraordinairement compliqué.

Difficile de croire que tous ceux qui ont opté pour la théorie de la valeur objective, d'Aristote à Bourdieu en passant par Smith, Ricardo, Marx et Keynes, étaient des simples d'esprit...

 

Et une démonstration par l'absurde marche bien pour illustrer pourquoi c'est de la merde

Vas-y, je prends tout en notes.

 

mais les défenseurs vont faire intervenir mille et une subtilités tirées par els cheveux pour justifier ceci ou cela, jouer à noyer le poisson, bref, faire leur gros touitouineur de poupouille pour jamais reconnaître qu'ils racontent de la merde.

Oh non, c'est beaucoup plus tragique que ça. Ils sont loyalement convaincus d'être dans le vrai. Les gens capables de mentir sciemment ne sont pas si nombreux que ça.

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"Je vous rappelle que la valeur d’un bien est le temps socialement nécessaire pour le produire."

Voilà sa théorie de la valeur, le reste c'est du bullshit pour traiter les gens de bourgeois.

Je dis que la production implique plus que la simple fabrication (cf n'importe quel dictionnaire) et que le "temps socialement nécessaire" est un mauvais proxy pour l'ampleur du service rendu. Bref on retombe sur de la valeur comme service à la Bastiat.

giphy.gif

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Difficile de croire que tous ceux qui ont opté pour la théorie de la valeur objective, d'Aristote à Bourdieu en passant par Smith, Ricardo, Marx et Keynes, étaient des simples d'esprit...

 

Non, justement, il était extraordinairement simple et trivial à résoudre et c'est précisément pour ça qu'il est compliqué. Parce que c'est très dur d'expliquer quelque chose d'évident.

 

T'as pas besoin d'être simple d'esprit, juste de partir dans la mauvaise direction; de la même manière, est-ce que c'est si compliqué à comprendre que "si deux hommes s’échangent quelque chose volontairement c'est qu'il y gagnent comparativement" ? Non, c'est très simple, et je doute pas que des tas de commerçants au fil de l'humanité l'ont compris sans jamais être capable de le formuler, et ça, sans qu'ils soient dotés d'esprit supérieur.

 

 

Quand à Aristote, il a dit une connerie, mais comme l'économie c'est absolument pas sa spécialité c'est pas grave.

 

Vas-y, je prends tout en notes.

 

 

Si quelqu'un passe 18 ans à fabriquer une maison, doit il être aussi bien rémunéré que quelqu'un qui en ferait une par an pendant dix huit ans ?

 

Si le valeur et accroché au temps de travail, alors plus on met longtemps à faire quelque chose, plus ça a de valeur. Donc on devrait rechercher l'inefficacité en trvaillant.

Ce qui est débile, parce qu'on recherche toujours le contraire.

Et maintenant j'attends la subtilité stupidifiante qui va servir de béquille pour rattraper cette débilité.

 

 

Voilà sa théorie de la valeur, le reste c'est du bullshit pour traiter les gens de bourgeois.

 

exactement

 

un ramassis de mots compliqués agencés d'une manière bizarre pour se donner l'air intelligent et noyer les critiques dans des discussions sur le sexe des anges.

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Il y en a toujours un ou deux qui sont vraiment curieux et qui sont juste allé voir les mauvaises autorités, sources, etc... On pourrait se dire que sacrifier 3 heures de son temps pour aider 0.0245 personnes n'est pas très efficace quand ce temps là aurait pu aider une personne entière (par exemple un proche). Cela dit ça permet de cibler des profils particuliers : le mec simplement curieux, l'idéologue, le gars motivé, etc...

J'ai personnellement manqué d'information trop longtemps pour cracher là dessus, et jusqu'à preuve du contraire, aucun moyen ne se suffit à lui-même pour convertir les gens ; dans le doute je préfère encourager Razorback que le démotiver. C'est aussi parce que je suis persuadé que la culture est le nœud du problème, j'imagine qu'un autre diagnostique implique d'autres prescriptions.

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Je vous rappelle que la valeur d’un bien est le temps socialement nécessaire pour le produire. Or, la valeur produite par le trader est très faible, incomparablement plus faible que les 16 millions qu’il gagne dans votre exemple.

 

Incroyable que l'on puisse autant confondre une monnaie avec une valeur.

 

A chaque discours dit "marxiste", c'est toujours la même confusion que l'on exergue. Et c'est normal dans le but du marxisme comme dans tout régime dirigiste d'ailleurs. On a besoin de dissimuler la valeur et la détruire afin que les individus ne la revendiquent pas et on élève une monnaie monopolistique réservé aux "élus" pour lui fabriquer une "valeur d'échange".

 

Le but de cette manipulation pour l'oligarchie dirigeante est d’être le seul bénéficiaire. Donc effectivement ces discours de valent rien, n'apportent rien et ne sont que des attrapes nigauds.

 

 

 

 

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Socialisme, gauchisme, etc,

c'est juste des "théories" à 2 balles pour :

- cacher la haine terrible des improductifs envers les productifs,

- dévaloriser complètement le travail productif d'un coté, valoriser le parasitage improductif de l'autre, de manière à pouvoir échanger en bonne conscience le vent produit par les parasites contre les biens ou services réels produits par les productifs.

- à la fin du tour de passe-passe, les improductifs s'appellent désormais productifs, et les vrais productifs sont des moins que rien, salauds, exploiteurs etc. En 2015, Martine Aubry peut ainsi sans rire (et sans faire rire la planète) déclarer que "les fonctionnaires sont des entrepreneurs".

 

ça marche hélas extrêmement bien.

Le seul hic est quand même l'assèchement inéluctable des productifs locaux.

Et donc, pas de pérennité à long terme.

 

 

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Tiens, ça me fait penser au problème avec lequel je me débat depuis quelque temps.

Déterminer les intérêts d'une personne autrement que par ses comportements effectifs permet d'en venir à l'idée qu'elle se nuit parfois à elle-même, ce que nous sentons tous intuitivement. Mais dès lors qu'on admet cette position de surplomb de l'observateur vis-à-vis de la personne observée et cette objectivité de l'erreur, comment maintenir le caractère subjectif de la valeur et l'idée que chacun est meilleur juge de son propre intérêt ?

 (Ceux qui ont une idée de la réponse peuvent l'exposer ici: http://www.liberaux.org/index.php/topic/52710-archéologie-de-la-valeur-entropie-liborgienne/page-5#entry1325118).

 

ama, se nuire à soi-même est un objectif à la fois assez répandu et parfaitement légitime.

Légitime car ça n'est souvent qu'une forme particulière de suicide, à petit feu et/ou par morceaux.

Si M. A. juge que son intérêt est de se suicider/flageller, comment pourrais-je en savoir assez sur lui, son histoire, l'histoire globale de sa famille, la façon dont il perçoit les choses, etc; assez pour considérer que le suicide (rapide ou lent), ou la flagellation, serait réellement une mauvaise option pour lui ? La flagellation peut parfaitement lui procurer réellement du bien-être.

 

Dans la même veine, il y a plein de gens qui ont de facto un adn (et/ou historique, familial, culturel) de moutons. Se conduire en moutons n'est donc pas forcément une erreur pour eux. C'est même tenter de leur infliger la liberté qui peut plutôt s'apparenter à une erreur.

 

De façon générale, nous avons tous, à des degrés divers, des déterminismes en nous, des inerties, plus ou moins fortes. Il y a des personnes capables de surpasser ces déterminismes, et d'autres pas. Et il y a peu à faire pour changer ça du dehors (à part informer).

 

edit : ce qu'on appelle masochisme, c'est souvent juste la soumission à ses déterminismes. Comment empêcher qqun de se soumettre si tel est son souhait ? a-t-on seulement idée du destin vers lequel on l'enverrai en contrariant sa manière de faire ?

"En se résignant, le malheureux consomme son malheur ... " - Balzac

 

Il y a beaucoup de gens résignés, et obstinés/entêtés à être résignés. à part leur mettre de l'information à disposition, il n'y a pas grand chose à faire pour eux. Et le plus souvent, ils ignoreront superbement l'information qu'on leur donne. Non seulement ils ne veulent pas la pilule rouge, mais même ils crachent dessus. L'illusion de la sécurité due au nombre, voilà où ils veulent se blottir et se sentir légitimement bien.

Quelqu'un a parlé de "monde en carton" sur un autre fil. C'est bien ce monde là que ces gens veulent absolument. Et l'étatisme et le socialisme répondent parfaitement à leurs voeux.

 

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  • 4 weeks later...

 

 

Tous ça n'est guère rassurant...

 

Du coup, pour discuter du problème de l'intérêt, il y a maintenant un fil dédié =>

 

Revenons ici à la valeur. Quelqu'un connaît-il bien la psychanalyse de Freud ? Je suis tombé sur une citation où Freud décrit la pulsion sexuelle, et elle fonctionne d'après lui exactement comme la valeur subjective, à savoir qu'elle n'a aucune visée préétablie, elle est générée par le sujet et n'est pas une réponse aux caractéristiques intrinsèques de l'objet:

«La pulsion sexuelle est [...] indépendante, semble-t-il, de son objet et elle ne doit pas non plus son apparition aux attraits qui émanent de lui. »

-Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle.

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La psychanalyse, c'est trois-quatre vérités de bon sens occultées par la science de l'époque, qu'on a cherché à systématiser alors qu'il n'y a pas lieu de le faire, entourées d'un charabia insensé et de pratiques à la limite du sectaire, le tout étant bien incapable de soigner qui que ce soit. Fait l'impasse, et tu me remercieras plus tard.

  • Yea 1
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 Tous ça n'est guère rassurant...

 Du coup, pour discuter du problème de l'intérêt, il y a maintenant un fil dédié =>

oui, j'ai vu passer ce fil ... mais je ne le vois plus ?

 

Ceci dit, ton dernier post sur le mineur sur la voie ferrée me semble, même si c'est pas forcément voulu, assez clair.

Ou bien on considère les gens comme mineurs, ie des enfants, et on intervient.

Ou bien non. On respecte le choix de l'individu, considéré comme majeur et responsable, aussi dur que ça semble.

 

At the bottom of all totalitarian doctrines lies the belief that the rulers are wiser and loftier than their subjects - Mises

 

"A fool can put on his coat better than a wise man can put it on for him. Which undermines most of the agenda of the left" - Thomas Sowell

 

 

Revenons ici à la valeur. Quelqu'un connaît-il bien la psychanalyse de Freud ? Je suis tombé sur une citation où Freud décrit la pulsion sexuelle, et elle fonctionne d'après lui exactement comme la valeur subjective, à savoir qu'elle n'a aucune visée préétablie, elle est générée par le sujet et n'est pas une réponse aux caractéristiques intrinsèques de l'objet:

«La pulsion sexuelle est [...] indépendante, semble-t-il, de son objet et elle ne doit pas non plus son apparition aux attraits qui émanent de lui. »

-Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle.

... ça me parait d'une telle évidence

 

The beauty is in the eyes of the beholder

 

 

 

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... ça me parait d'une telle évidence

 

The beauty is in the eyes of the beholder

 

Platon ne devait pas penser que c'était évident, parce que je crois me souvenir qu'il a consacré un dialogue complet à démontrer cette idée.

 

Sinon le topic sur l'intérêt existe toujours, il est sur la première page "philosophie, éthique et histoire". Ou ici: http://www.liberaux.org/index.php/topic/52936-archéologie-de-l’intérêt/#entry1336474

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Revenons ici à la valeur. Quelqu'un connaît-il bien la psychanalyse de Freud ? Je suis tombé sur une citation où Freud décrit la pulsion sexuelle, et elle fonctionne d'après lui exactement comme la valeur subjective, à savoir qu'elle n'a aucune visée préétablie, elle est générée par le sujet et n'est pas une réponse aux caractéristiques intrinsèques de l'objet:

«La pulsion sexuelle est [...] indépendante, semble-t-il, de son objet et elle ne doit pas non plus son apparition aux attraits qui émanent de lui. »

-Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle.

D'abord les marxistes, ensuite les psychanalystes ? Le masochisme n'a-t-il donc aucune limite ?

Pour faire court la citation est foutrement hors sujet par rapport à la discussion. Freud propose une explication au fétichisme (pourquoi certaines personnes sont-elles attirées sexuellement par des objets a priori sans rapport avec le sexe).

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  • 3 weeks later...

Chez Nietzsche, lecteur de Spinoza, la valeur est fondamentalement processus de valorisation, c'est-à-dire la conséquence de rapports entre des forces:

"Ce qui nous frappe d’emblée c’est l’approche nouvelle de Nietzsche à l’égard des affects : ceux-ci ne sont plus étudiés en vue d’établir d’une nature humaine apparemment immuable comme chez Descartes, mais au contraire sont appelés à être replacés dans une perspective historique. Il s’agirait de faire une histoire des affects. Certes le phénomène affectif en lui-même est universel, mais la façon dont s’expriment les affects évolue en fonction des « époques », varie en fonction des « peuples » ou encore des « individus ». Plus précisément, ce qui varie, c’est la configuration des affects : le paragraphe de Par-delà bien et mal qui emploie de façon apparemment indifférente les notions de passions, d’affects et de pulsions, nous dit précisément que « la pensée n’est qu’un rapport de ces pulsions les unes avec les autres ». Ainsi il pourrait exister différents complexes affectifs au sein desquels les affects ne seraient pas hiérarchisés de la même manière. Nietzsche ne s’en tient pas toutefois à un lien entre affect et histoire : il établit également un lien entre affect et « appréciation de valeur » : les affects produisent des « appréciations de valeur »; on pourrait aussi dire qu’elles produisent de l’évaluation (appréciation) si on veut insister sur le processus, ou qu’elles produisent des valeurs si on veut insister sur le résultat de ce processus. Dire que les affects orientent la façon dont nous évaluons les choses, cela signifie que les affects sont source de valorisation ou de dévalorisation."
-Roxane Khodabandehlou, Nietzsche et la conception cartésienne du bonheur, 2014-2015, p.31-32 (cf: http://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01194782/document).

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  • 2 weeks later...

Donc une âme généreuse a passé au bloggeur "Descartes" la vidéo de Lordon diffusée plus haut dans le fil. S'ensuit un débat qui tourne vite au dialogue de sourds.

Pour ceux que ça intéresse, ça se passe ici entre Descartes, moi et un autre commentateur, Antoine: http://descartes.over-blog.fr/2016/01/avec-tous-mes-voeux.html

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  • 1 month later...

Du coup j'ai retrouvé le passage au Marx se place dans la continuité d'Aristote:

« Les deux particularités de la forme équivalent, examinées en dernier lieu, deviennent encore plus faciles à saisir, si nous remontons au grand penseur qui a analysé le premier la forme valeur, ainsi que tant d'autres formes, soit de la pensée, soit de la société, soit de la nature : nous avons nommé Aristote.
D'abord Aristote exprime clairement que la forme argent de la marchandise n'est que l'aspect développé de la forme valeur simple, c'est à dire de l'expression de la valeur d'une marchandise dans une autre marchandise quelconque, car il dit :
« 5 lits = 1 maison » [...] « ne diffère pas » de :
« 5 lits = tant et tant d'argent » [...].
Il voit de plus que le rapport de valeur qui confient cette expression de valeur suppose, de son côté, que la maison est déclarée égale au lit au point de vue de la qualité, et que ces objets, sensiblement différents, ne pourraient se comparer entre eux comme des grandeurs commensurables sans cette égalité d'essence. « L'échange, dit-il, ne peut avoir lieu sans l'égalité, ni l'égalité sans la commensurabilité » [...]. Mais ici il hésite et renonce à l'analyse de la forme valeur. « Il est, ajoute-t-il, impossible en vérité [...] que des choses si dissemblables soient commensurables entre elles », c'est-à-dire de qualité égale. L'affirmation de leur égalité ne peut être que contraire à la nature des choses ; « on y a seulement recours pour le besoin pratique ».
Ainsi, Aristote nous dit lui-même où son analyse vient échouer, — contre l'insuffisance de son concept de valeur. Quel est le « je ne sais quoi » d’égal, c'est-à-dire la substance commune que représente la maison pour le lit dans l'expression de la valeur de ce dernier ? «Pareille chose, dit Aristote, ne peut en vérité exister. » Pourquoi ? La maison représente vis-à-vis du lit quelque chose d'égal, en tant qu’elle représente ce qu'il y a de réellement égal dans tous les deux. Quoi donc ? Le travail humain.
Ce qui empêchait Aristote de lire dans la forme valeur des marchandises, que tous les travaux sont exprimés ici comme travail humain indistinct et par conséquent égaux, c'est que la société grecque reposait sur le travail des esclaves et avait pour base naturelle l'inégalité des hommes et de leurs forces de travail. Le secret de l'expression de la valeur, l'égalité et l'équivalence de tous les travaux, parce que et en tant qu'ils sont du travail humain, ne peut être déchiffré que lorsque l'idée de l'égalité humaine a déjà acquis la ténacité d'un préjugé populaire. Mais cela n'a lieu que dans une société où la forme marchandise est devenue la forme générale des produits du travail, où, par conséquent, le rapport des hommes entre eux comme producteurs et échangistes de marchandises est le rapport social dominant. Ce qui montre le génie d'Aristote c'est qu'il a découvert dans l'expression de la valeur des marchandises un rapport d'égalité. L'état particulier de la société dans laquelle il vivait l'a seul empêché de trouver quel était le contenu réel de ce rapport
. »
-Karl Marx, Le Capital, Livre I, 1867.

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En soi, cet extrait ne permet pas de dire qu'Aristote est le précurseur de Marx sur le plan économique. Marx dit juste qu'Aristote aurait découvert que le caractère égalitaire de l'échange. Idée fausse (l'échange n'est pas un jeu à somme nulle), mais qu'avaient des tas d'économistes avant Marx. C'est même peut-être le cas de Bastiat si je me souviens bien.

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Je ne suis pas un spécialiste d'Aristote, mais je ne comprends pas pourquoi on veut absolument faire du chapitre V du Livre V de l'Ethique à Nicomaque une théorie économique. Le Livre V est consacré à la vertu de justice, sous ses deux formes, justice générale et justice particulière, et dans celle-ci est déterminé le juste, c'est-à-dire le droit. A quel moment il est question d'économie ? Le passage sur l'échange et la monnaie est clairement inclus dans l'étude de la justice particulière ! L'égalité que pose Aristote, c'est une égalité de justice, à aucun moment il n'écrit qu'il n'y a d'échange que lorsqu'il y a égalité de valeur. C'est très clair :

 

 

 

En conséquence, ces échanges réciproques auront lieu, quand on aura rendu les objets égaux. Le rapport qui existe entre le paysan et le cordonnier doit se retrouver entre l'ouvrage de l'un et celui de l'autre. Toutefois, ce n'est pas au moment où se fera l'échange qu'il faut adopter ce rapport de proportion ; autrement, l'un des termes extrêmes aurait doublement la supériorité dont nous parlions tout à l'heure ; c'est au moment où chacun est encore en possession de ses produits.

 

 

 

C'est très clair qu'il y a des échanges qui peuvent être fait en dehors du rapport de proportion, c'est-à-dire en dehors de ce qui est juste. On peut ne pas être d'accord avec la définition aristotélicienne de la justice et du droit, mais prendre cette théorie pour une théorie économique simplement parce qu'elle parle de l'échange et de la monnaie, c'est aller beaucoup trop loin. Aristote parle d'ailleurs du même rapport de proportion avec l'exemple du bâtisseur d'un temple, juste avant d'introduire cette étude de la justice dans l'échange : 

 

En effet, il vous faut payer de retour le gracieux bienfaiteur et vous mettre, à votre tour, à être gracieux envers lui.

 


 

La dimension éthique n'est-elle pas absolument claire ? Et voilà la phrase qui suit et qui introduit la question de l'échange monétaire :

 

Or ce qui constitue cet échange proportionnel [qu'on a vu dans l'exemple du temple], c'est l'union en diagonale. Prenons, par exemple, un architecte A, un cordonnier B, une maison C, une chaussure D. Etc.

 


 

Certes, Aristote dit aussi, quelques phrases plus loin, qu'il n'y aurait pas d'échange sans égalité, mais il faut situer dans le contexte : il parle des échanges qui ont lieu dans la communauté politique qu'ils ne doivent pas déséquilibrer, ce qui s'accorde complètement avec sa philosophie du droit établie quelques chapitres plus haut. Je cite, toujours dans le chapitre V :

 

Si l'on ne pouvait pas établir cette réciprocité, il n'y aurait pas de communauté sociale possible.

 

Quand Aristote montre que la monnaie, en tant que mesure commune, permet de donner une égalité entre des maisons, des mines et des lits, il s'agit toujours d'une égalité de justice. Aristote n'entend pas expliquer le mécanisme de l'échange, ni expliquer ce qu'est un prix. Ce qui l'intéresse, lui, c'est "cela-même qui est juste", dikaion, le droit. 

 

 

 

Donc pas de théorie de l'échange comme jeu à somme nulle chez Aristote. D'autant que pour Aristote, l'échange est justifié par le besoin, et c'est grâce au besoin qu'on peut déterminer des rapports droits. Si le cordonnier n'avait pas besoin de l'architecte, et vice versa, ce serait impossible d'établir l'égalité de proportion entre eux, qui est précisément le droit. Et comme le rappelle Michel Villey, chez les Grecs, égalité signifie d'abord harmonie.

 

Mais surtout, pas de théorie économique dans l'Ethique à Nicomaque. Ou alors j'ai raté quelque chose...

 

 

 

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Les références de Marx à Aristote dans Le Capital concernent en fait les Politiques (Livre, chapitres 8 à 10 notamment). Marx critique l'économie qui ne répond plus à la logique du besoin en invoquant le concept de chrématistique.

« Cet art d’acquérir, nous l’avons dit, a deux formes, une forme commerciale et une forme familiale : celle-ci est indispensable et louable, celle qui concerne l’échange, par contre, est blâmée à juste titre car elle n’est pas naturelle mais se fait aux dépens des autres ; et il est tout à fait normal de haïr le mériter d’usurier du fait que son patrimoine lui vient de l’argent lui-même. […] Si bien que cette façon d’acquérir est la plus contraire à la nature. » (Politiques, chapitre 10)

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Sauf erreur de ma part, le passage que cite Marx dans ta citation précédente est tirée de l'Ethique à Nicomaque, V, 5, à moins qu'Aristote ne dise très exactement la même chose dans les Politiques (pas vérifié). Mais de façon plus générale, c'est aussi une tendance libérale que de s'en prendre à ce passage de l'Ethique, ou à toute théorie du juste "prix", sur la base d'arguments économiques qui n'ont rien à voir avec elle, puisqu'il ne s'agit en rien d'une théorie du prix, mais d'une doctrine juridique et morale.

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Les références de Marx à Aristote dans Le Capital concernent en fait les Politiques (Livre, chapitres 8 à 10 notamment). Marx critique l'économie qui ne répond plus à la logique du besoin en invoquant le concept de chrématistique.

Aristote condamne simplement l'usure en disant que ce n'est pas naturel parce que l'argent serait fait pour l'échange. Que Marx ait été d'accord avec cela ne fait pas particulièrement d'Aristote un précurseur de Marx : pendant des siècles, des quantités industrielles de gens, avant et après Marx, condamnaient l'usure, à commencer par l'église.

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  • 2 weeks later...

Il faudrait reprendre ce problème de la valeur en le mettant en relation avec les théories des prix des uns et des autres:

"Nous avons déjà cité plusieurs fois l'exemple du prix comme résultat des estimations d'une série de personnes particulières. Le prix est un phénomène social, une « résultante » sociale, un produit des rapports réciproques entre les hommes ; le prix est-il égal à l'estimation moyenne ?. Non. Le prix ressemble-t-il à une estimation particulière ? Pas tout à fait. Car une estimation particulière est une affaire personnelle, elle concerne un seul homme, elle « vit dans son âme » et uniquement dans son âme, tandis que le prix est quelque chose qui opprime chacun ; c'est quelque chose d'indépendant, avec quoi il faut compter, quelque chose d'objectif, bien que non matériel (voir chap. II) ; le prix, en d'autres termes, est quelque chose de nouveau, et qui vit de sa propre vie sociale, quelque chose d'indépendant des hommes particuliers, bien qu'il soit « fait » par des hommes."

-N.I. Boukharine, La théorie du matérialisme historique, ch. IV "La société", 28: La Société et l'individu. Suprématie de la société sur l'individu, 1921 (cf: https://www.marxists.org/francais/boukharine/works/1921/index.htm).

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  • 4 weeks later...

Aristote condamne simplement l'usure en disant que ce n'est pas naturel parce que l'argent serait fait pour l'échange. Que Marx ait été d'accord avec cela ne fait pas particulièrement d'Aristote un précurseur de Marx : pendant des siècles, des quantités industrielles de gens, avant et après Marx, condamnaient l'usure, à commencer par l'église.

 

Et la scholastique médiévale condamnait l'usure en faisant appel à l'autorité d'Aristote. Bref.

Dernier résultat de mes pérégrinations: Jaurès attribue à Fichte (l'auteur de l'Etat commercial fermé, ouvrage qui plaisait tant à A. Hitler), l'idée de la valeur-travail:

"La valeur de chaque chose dépend et des dépenses et du temps nécessaires à sa production. [...] Proudhon l'a dit, la théorie de la valeur est pour ainsi dire la pierre angulaire du socialisme. Fichte, le premier, a esquissé la théorie de la valeur, développée ensuite par Marx. [...]

Dans quelques cas, je l'avoue, dans certaines circonstances extraordinaires, la valeur n'est pas déterminée par la quantité de travail. Par exemple, si l'on offre de l'eau à des hommes altérés dans le désert, si l'on offre du pain à des hommes affamés dans une île, ils achèteront ce pain très rare, cette eau très rare, à un prix énorme. Mais ces hasards que quelques sots opposent orgueilleusement au socialisme, n'ont aucune signification, comme étant en dehors de toute règle et de l'ordre normal de la société. En effet, c'est le principal devoir de la société que par un commerce toujours en mouvement, les choses nécessaires à l'existence soient facilement mises à la portée de quiconque veut les acheter. Et il ne subsiste aucune règle, lorsque la vie elle-même de l'homme dépend non pas de la société mais d'un seul homme de telle sorte que celui-ci peut exiger, en échange d'une bouchée de pain, non seulement un prix exorbitant, mais encore la servitude du corps. Dans la société ordinaire, la vraie mesure de la valeur est la quantité de travail, non pas subordonnée mais conditionnée par son utilité."

-Jean Jaurès, Les origines du socialisme allemand, traduction par Adrien Veber de la thèse latine, in Revue Socialiste (de Benoît Malon), 1892.

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J'ai déjà évoqué le fait que chez Lordon et dans la théorie de la régulation en général, la valeur est appréhendée comme désir, d'une façon extrêmement proche du marginalisme. Il est fort possible que ce déplacement, très surprenant chez des auteurs d'extrême-gauche (anticapitalistes), trouve son origine dans la philosophie de Deleuze, lui aussi grand lecteur de Spinoza:

(le passage suivant intéressera aussi les liborgiens qui ont a juste titre fait remarquer que les activistes de "Nuit debout" n'ont pas de doctrine, ignorent le marxisme, sont inefficaces, etc.)

« S’il n’existe pas de contradictions, pas de luttes de classes porteuses de la perspective d’une autre formation économique et sociale, on ne peut qu’en rester encore et toujours aux flux, et à la seule alternative de les bloquer artificiellement ou de les libérer toujours davantage. La notion de déterritorialisation risque alors de se révéler, in fine et sur le terrain économique, synonyme de dérégulation et déréglementation, dont les effets n’ont rien d’émancipateur. Et pourtant, c’est ici même que ressurgit le terme de révolution, de façon stupéfiante une fois encore, mais tempéré par des points d’interrogation, qui le transforme surtout en doute radical :

« Mais quelle voie révolutionnaire, y en a-t-il une ? – se retirer du marché mondial, comme Samir Amin le conseille aux pays du tiers-monde, dans un curieux renouvellement de la “solution économique” fasciste ? Ou bien aller en sens contraire ? C’est-à-dire aller encore plus loin dans le mouvement du marché, du décodage et de la déterritorialisation ? Car peut-être les flux ne sont pas encore assez déterritorialisés, pas assez décodés, du point de vue d’une théorie et d’une pratique des flux à haute teneur schizophrénique. Non pas se retirer du procès, mais aller plus loin, “accélérer le procès”, comme disait Nietzsche : en vérité, dans cette matière, nous n’avons encore rien vu » [Gilles Deleuze & Felix Guattari, L’Anti-Œdipe, p. 285]

La prophétie finale, même parée de l’autorité censément hérétique de Nietzsche, a de quoi faire frémir ! Il est clair que ce n’est pas d’abord la pensée de Marx qui est mobilisé ici, et qu’on retrouve une ontologie du devenir bien plutôt référée à Nietzsche, référence par ailleurs plus précisément et continûment travaillée par Deleuze qui lui consacre un livre entier de commentaire savant. Mais surtout, à lire ces lignes, il est permis de se demander si la libération des flux ne rencontre pas, avant tout, les thématiques libérales les plus radicales et les plus anarchisantes, celles d’un Hayek notamment, et sans que Deleuze n’en dise quoi que ce soit de façon explicite, même s’il s’appuie expressément par endroits sur la théorie marginaliste des néo-classiques (sans s’interroger sur sa compatibilité avec les thèses marxiennes). »
-Isabelle Garo, Deleuze, Marx et la Révolution : ce que rester marxiste veut dire.

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