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L'Arche de Zoé au Tchad


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Comme pour toute affaire qui touche aux intérêts français, il est imprudent de faire confiance à l'AFP. Quelques réflexions cependant :

1) Au Tchad l'autonomie de l'individu n'est pas la règle. Par exemple un Tchadien n'ira pas seul dans un endroit inconnu, il se fera d'abord accompagner par un proche qui connaît l'endroit. Ensuite seulement, il pourra y retourner seul car il ne sera plus totalement étranger du lieu. Cet accompagnement n'est pas optionnel. Il n'existe pas d'annuaire téléphonique, pas de plans des villes, quasiment aucune pancarte qui donnerait des noms de rues. De plus, l'étranger inconnu ne connaît ni les prix ni les personnes à respecter ni les manières qu'il faut adopter. S'il tentait de se débrouiller seul, tout lui coûterait plus cher. L'étranger qui souhaite se procurer une simple mobylette par exemple, va donc se faire accompagner par quelqu'un qui le mènera au magasin et l'aidera éventuellement à négocier l'achat. En retour, il sera de bon goût de donner un « cadeau » à son ami. Ceci n'est pas de la corruption, du moins, pas d'un point de vue local.

2) Puisqu'on ne peut trouver seul une mobylette, il paraît plus improbable encore de trouver seul des orphelins. Les membres de l'Arche de Zoé, en se dispensant manifestement de passer par des organisateurs occidentaux de l'urgence, se condamnaient à prendre des intermédiaires locaux. Intermédiaires qu'il faut rétribuer.

3) Le parallèle entre cet achat d'enfants et la traite négrière saute alors aux yeux. On peut rapprocher ce cas des explications d'Éric de Rosny dans « Les yeux de ma chèvre ». Éric raconte comment il a été confronté, à proximité de Douala (Cameroun), à une rumeur qui l'accusait de « sorcellerie de l'Ekong ». Cette pratique de sorcellerie consiste, dans les croyances locales, à rendre des personnes esclaves dans le monde invisible – lesquelles dépérissent alors dans le monde visible. Je le cite : « Après ma visite au nganga [un tradipraticien accusé ici de sorcellerie], j'ai eu le malheur de me rendre chez le chef, convaincu que cette visite était une garantie contre les interprétations fantaisistes. Je me trompais. (…) Mais pourquoi tant d'empressement à soupçonner des chefs ? Au triste temps de la traite des esclaves, certains d'entre eux ont servi d'intermédiaires, s'entremettant pour livrer aux Blancs des petites gens pour en tirer profit. (…) Un Blanc faisant le va-et-vient entre un nganga et un chef réveille dans la mémoire collective un schéma hélas trop connu. » Si cet homme, intégré et vivant « au quartier », a réveillé des craintes de commerce d'esclaves du seul fait d'une visite maladroite, que peut-il en être de Blancs fraîchement débarqués qui viennent réellement pour se procurer des enfants ?

4) La différence culturelle fait que les intermédiaires locaux et leurs commanditaires français n'ont pas la même éthique. Un langage partagé permet de partager des idées, mais non pas de faire vibrer ces idées de la même manière. Des idées peuvent être comprises intellectuellement à l'identique de part et d'autre, la compréhension en conscience reste impossible tant que l'un ne s'est pas intégré dans le contexte culturel de l'autre. Il y a nécessairement un décalage qui, s'il n'est pas perçu, est un malentendu. Pour trouver un intermédiaire qui soit à la fois local et qui accepte les valeurs Occidentales, il faut se lever de bonne heure. Il aurait été plus faisable de travailler avec des Blancs intégrés.

5) On peut peut-être (?) admettre qu'il aurait été possible de trouver un si grand nombre d'enfants vraiment orphelins en passant pas les organismes occidentaux qui gèrent l'urgence. En revanche, on comprend qu'une démarche d'inconnus étrangers avec des intermédiaires locaux ne pouvait qu'aboutir à une opération en partie sale, et de plus interprétée comme telle.

6) Je m'avance peut-être, mais même pour le personnel des organismes implantés sur place, je ne suis pas convaincu qu'il soit évident de déterminer si un enfant est ou non définitivement abandonné. À qui le demander ? Soit dit en passant, les orphelins les plus nombreux sont à mon sens ceux du sida. Et ceux-là – mis à part au travers d'orphelinats – ne sont pas gérés par des Occidentaux.

7) Par rapport à l'objectif affiché par l'association, on peut mettre en doute la réussite d'une éducation française auprès d'enfants déjà traumatisés en bas âge, puis importés dans un milieu bien éloigné du leur. Je me demande aussi quel peut être le sens de la démarche de ces parents qui souhaitent adopter un orphelin victime d'une guerre si lointaine. On ne corrige pas un problème (le décès des parents pris par une guerre) avec un autre problème (l'impossibilité de faire des enfants). On ne peut pas manipuler des vies comme des flux, on ne peut pas impunément additionner une vie d'un côté et la retrancher de l'autre.

8) Mes conclusions :

  • Il est heureux que cette initiative ait été stoppée, elle aurait créé un dangereux précédent.
  • À l'échelle du pays, des actions menées depuis des années par des acteurs Blancs locaux risquent d'être mises en difficultés. J'ai entendu lundi sur RFI la directrice (une Blanche, je pense, à l'accent) d'une école catholique d'Abéché que l'on vient de suspecter de faire du commerce d'enfants. Ceux les plus touchés sont logiquement ceux qui travaillent dans l'éducation, puisque tel était l'argument des intermédiaires de l'Arche de Zoé. Ça fait mal.

Pour revenir aux motivations du personnel de l'Arche de Zoé, je vois deux hypothèses :

a) Soit leurs intentions étaient coupables, ils avaient cyniquement accepté les différences culturelles et leurs conséquences salissantes.

b ) Soit leurs intentions étaient innocentes, ils n'ont pas compris ce à quoi ils touchaient. Ils sont alors fautifs car ce sont eux qui sont venus, à eux de s'adapter.

Dans la balance, en faveur de l'hypothèse a) on peut mettre le fait qu'ils ne soient pas passés par des associations occidentales implantées localement. D'un autre côté, s'ils avaient su qu'une telle entreprise comportait de grands risques d'échec, l'auraient-ils tenté ? J'ai aussi appris que les six détenus ont fait une grève de la faim. Or la grève de la faim est l'arme du légitime contre l'oppresseur. Cette grève donne à croire qu'ils se pensent légitimes et n'ont donc toujours rien compris. Ou alors ils sont de sacrés acteurs.

Si l'hypothèse b ) est la bonne, ont-ils tenté de passer par des organismes de Blancs ? Et si oui, pourquoi n'ont-ils pas tenu compte des motifs de leur refus ? Quoi qu'il en soit, espérons au minimum que le personnel de l'Arche ne soit pas relâché tant que n'a pas été comprise l'ampleur du mal que cette tentative devait nécessairement provoquer. Autrement il y aurait un risque de récidive.

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Même si leurs pratiques sont peut-être malhonnêtes, je n'exclus pas a priori la possibilité qu'ils soient également victimes de manoeuvres politiques de l'état tchadien, français ou des deux, pour des raisons qui m'échappent encore mais dont je ne serais pas outre-mesure surpris qu'elles aient trait au conflit en cours.

En d'autres termes, peut-être que l'opération, aussi malhonnête fût-elle, se serait déroulée sans anicroche si les politiques y avaient trouvé leur intérêt.

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En ce qui me concerne, je continue de penser qu'ils voulaient vraiment aider les enfants, quitte à tordre la vérité auprès es familles françaises.

C'est le triomphe de la gnangnantise comme je l'ai déjà expliqué dans la définition du mot.

Oh les pauvres petits nafricains il faut faire quelquechose pour les aider.

Sans parler des motivations des familles d'accueil: j'en ai vu une à la télé qui disait, toute honte bue: nos enfants sont grands, ils ont quitté le foyer, il nous manque une présence enfantine à la maison. Qu'est-il advenu de ne traite jamais autrui comme un moyen mais bien toujours comme une fin en soi?

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En d'autres termes, peut-être que l'opération, aussi malhonnête fût-elle, se serait déroulée sans anicroche si les politiques y avaient trouvé leur intérêt.

Comme je l'ai expliqué, je pense que c'est impossible. Les enfants auraient pu être enlevés sans anicroches, ça ne change rien à la nécessaire saleté d'une telle opération. EDIT: Il est évident qu'Idriss Déby instrumentalise la situation, mais rien ne prouve qu'il en soit la cause.

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Même si leurs pratiques sont peut-être malhonnêtes, je n'exclus pas a priori la possibilité qu'ils soient également victimes de manoeuvres politiques de l'état tchadien, français ou des deux, pour des raisons qui m'échappent encore mais dont je ne serais pas outre-mesure surpris qu'elles aient trait au conflit en cours.

En d'autres termes, peut-être que l'opération, aussi malhonnête fût-elle, se serait déroulée sans anicroche si les politiques y avaient trouvé leur intérêt.

Je partage ce point de vue -et il expliquerait plusieurs absences de réactions de notre gouvernement avant que l'affaire n'éclate (la France était bien au courant et a inhabituellement "laissé faire"…). Certains hommes politiques souvent à l'aise sur ce type de sujets sont d'ailleurs très discrets dans les médias, et ceux-ci les laissent respectueusement se cacher…

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C'est le triomphe de la gnangnantise comme je l'ai déjà expliqué dans la définition du mot.

Oh les pauvres petits nafricains il faut faire quelquechose pour les aider.

Sans parler des motivations des familles d'accueil: j'en ai vu une à la télé qui disait, toute honte bue: nos enfants sont grands, ils ont quitté le foyer, il nous manque une présence enfantine à la maison. Qu'est-il advenu de ne traite jamais autrui comme un moyen mais bien toujours comme une fin en soi?

Je ne cherche pas à les excuser ou quoi que ce soit, de toute façon ce sont les faits seuls qui comptent. J'essaie juste de comprendre comment ils en sont arrivés là.

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La seule chose répréhensible dans cette histoire, c'est le mensonge de l'arche de noé, d'une part envers les familles auxquelles ils avaient promis qu'ils les emmèneraient dans d'autres villages, le contrat n'est donc pas repecté; et d'autre le vol contre certaines familles francaises, certaines auraient payé 2000 euros pour pouvoir avoir un gosse et l'arche de noé leur aurait dit que finalement ca ne serait pas possible sans rendre la somme.

On a donc manquement à un accord d'un coté et vol de l'autre, pour le reste, l'état francais veut encore montrer qu'il est le plus fort en Afrique, la grande gueule président du Tchad est un corrompu de plus qui veut imposer sa loi, les journalistes s'engouffrent à coups de poncifs socialos et religieux à la fois.

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Tu n'oublierais pas un peu les africains dans l'histoire (et les enfants cela va de soit) ?

Comme l'explique Lugan, il n'y a pas d'adoptions là-bas en partie car les orphelins n'existent pas. Ils sont, au pire, toujours pris en charge par la tribu locale. L'Afrique vit et s'organise avec la mort à ses côtés. Ce n'est pas comme chez nous.

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Tu n'oublierais pas un peu les africains dans l'histoire (et les enfants cela va de soit) ?

Comme l'explique Lugan, il n'y a pas d'adoptions là-bas en partie car les orphelins n'existent pas. Ils sont, au pire, toujours pris en charge par la tribu locale. L'Afrique vit et s'organise avec la mort à ses côtés. Ce n'est pas comme chez nous.

La seule chose répréhensible dans cette histoire, c'est le mensonge de l'arche de noé, d'une part envers les familles auxquelles ils avaient promis qu'ils les emmèneraient dans d'autres villages, le contrat n'est donc pas repecté

Tu as ta réponse, je ne les oublies pas les africains, ils sont les premiers lésés. Sur les enfants, on ne sera pas d'accord c'est sûr, mais pour moi ils peuvent faire l'objet d'adoption dans le cadre d'un échange contre une somme d'argent, ils n'ont pas leur mot à dire, depuis quand on demande aux enfants ce qu'ils pensent sur tout?? à part dans une famille dont la pensée générale est boboïsante, je ne vois pas.

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Tremendo, en dehors de ton milieu, d'autres personnes raisonnent autrement…

Le "contrat" dont tu parles est impossible. Il ne peut y avoir accord lorsqu'on ne se comprend pas. Cela prendrait des années auprès de chaque famille, pour être sûr qu'on est vraiment d'accord.

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Euh, l'adoption se passe facilement au Brésil, adoption d'enfants orphelins ou non. Pour les parents, c'est une "chance" donnée au gosse de le faire adopter par des occidentaux.

Des nouvelles de l'Arche :

Huit ans de travaux forcés: au milieu d’une salle comble et surchauffée du palais de justice de N’Djamena, la sentence est tombée hier soir pour les six membres de l’Arche de Zoé. Qui ont paru sonné à l’énoncé du verdict. La vraie surprise est l’absence de distinction entre les inculpés : le logisticien Dominique Aubry ou l’infirmière Nadia Merini, qui a fondu en larmes, avaient-ils la même responsabilité qu’Eric Breteau, le véritable chef d’orchestre de cette opération ?

Je trouve ça vache pour l'infirmière, un peu couillonnée dans l'histoire, quand même.

Paris demande le rapatriement des condamnés…

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Ce qui est fort avec cette affaire, c'est que les soi-disant tiers-mondistes humanitaires se révèlent anti-tiers-mondistes. Ceux qui ne supportent pas la justice (certes imparfaite) rendue par des Noirs ne sont pas des électeurs du FN.

Il y va y avoir rupture au sein d'une certaine gauche associative.

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Ceux qui ne supportent pas la justice (certes imparfaite) rendue par des Noirs …

Il y va y avoir rupture au sein d'une certaine gauche associative.

Le procés du tribunal de N'Djamena a donné naissance à des associations qui ont pour but le soutien aux condamnés (et par la même, la contestation de la justice rendue).

Ces associations réclament et obtiennnent le droit de s'exprimer et de se montrer dans les médias.

Ne devrait-on pas interdire et dissoudre les associations qui ont pour finalité de polémiquer contre des décisions de justice , de défendre des condamnés ou même des mis en examen.Et aussi poursuivre les instigateurs de ces associations.(et pas seulement dans le cas de l'affaire Arche de Zoé)

Sinon c'est la porte ouverte à toutes les dérives (troubles à l'ordre public,manif dans les salles d'audience des tribunaux,pressions sur les juges ,les jurés etc…).

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Le procés du tribunal de N'Djamena a donné naissance à des associations qui ont pour but le soutien aux condamnés (et par la même, la contestation de la justice rendue).

Ces associations réclament et obtiennnent le droit de s'exprimer et de se montrer dans les médias.

Ne devrait-on pas interdire et dissoudre les associations qui ont pour finalité de polémiquer contre des décisions de justice , de défendre des condamnés ou même des mis en examen.Et aussi poursuivre les instigateurs de ces associations.(et pas seulement dans le cas de l'affaire Arche de Zoé)

Sinon c'est la porte ouverte à toutes les dérives (troubles à l'ordre public,manif dans les salles d'audience des tribunaux,pressions sur les juges ,les jurés etc…).

Bien sûr ! Voilà une idée lumineuse : On va interdire aux gens d'exprimer leur opinion sur les décisions de justice. Ensuite, je propose de les gazer.

Sales gens à opinion.

Sérieusement, si créer une assciation peut causer des troubles à l'ordre public, c'est le trouble qu'il faut sanctioner, pas l'opinion.

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Ah merci !! Heureusement que tu es là tiens.

Tu crois qu'en Afrique, il n'y a pas d'orphelins qui vivent dans la rue, de petits boulots, de larcins etc… ?

Ils sont à la charge de quelqu'un, that's all.

Ecoute donc ce que dit Lugan.

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Ce qui est fort avec cette affaire, c'est que les soi-disant tiers-mondistes humanitaires se révèlent anti-tiers-mondistes. Ceux qui ne supportent pas la justice (certes imparfaite) rendue par des Noirs ne sont pas des électeurs du FN.

Il y va y avoir rupture au sein d'une certaine gauche associative.

Bien vu

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Ne devrait-on pas interdire et dissoudre les associations qui ont pour finalité de polémiquer contre des décisions de justice , de défendre des condamnés ou même des mis en examen.Et aussi poursuivre les instigateurs de ces associations.(et pas seulement dans le cas de l'affaire Arche de Zoé)

Sinon c'est la porte ouverte à toutes les dérives (troubles à l'ordre public,manif dans les salles d'audience des tribunaux,pressions sur les juges ,les jurés etc…).

Tu dérives complètement.

Association ou pas, la question est : peut-on contester une décision de justice ? The correct answer is : Yes.

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Bien sûr ! Voilà une idée lumineuse : On va interdire aux gens d'exprimer leur opinion sur les décisions de justice. Ensuite, je propose de les gazer.

Sales gens à opinion.

Sérieusement, si créer une assciation peut causer des troubles à l'ordre public, c'est le trouble qu'il faut sanctioner, pas l'opinion.

+1

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Bien sûr ! Voilà une idée lumineuse : On va interdire aux gens d'exprimer leur opinion sur les décisions de justice.

Harald, juriste confirmé du forum, devrait le confirmer mais, je crois, que le faire à titre individuel, c'est interdit par la loi, donc à mon avis, le faire en montant une association ça doit l'etre davantage.

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Just… Waw.

Tran-scen-dan-tal !

(+1 +bienvu +1 = une paire de lunette)

lol

Harald, juriste confirmé du forum, devrait le confirmer mais, je crois, que le faire à titre individuel, c'est interdit par la loi, donc à mon avis, le faire en montant une association ça doit l'etre davantage.

Non mais attends tu proposes de remettre en question la liberté d'association, je vois pas pourquoi des gens n'auraient pas le droit de se réunir pour affirmer leurs convictions et opinions (tant qu'ils le font de manière pacifique), qu'importe la nature politique de celles-ci. T'estimes qu'ils disent de la merde c'est ton droit, mais t'es pas encore surpuissant au point de décider ce qu'il faut penser ou pas de tel ou tel acte.

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