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Messages recommandés

il y a 37 minutes, Cthulhu a dit :

 

Je l'ai vu à un libraire hier. Du coup, je t'ai fait confiance et je l'ai pris.

 

Et The moon is a harsh mistress aussi. Depuis le temps que j'en entends parler...

Je m'étais sincèrement fait la réflexion il y a pas longtemps en lisant ses Incertos, mais Taleb est l'un de ces gars que, peut importe si je suis d'accord ou pas, au moins quand je le lis je réfléchis. Je reste pas passif à attendre. Je pose le bouquin toutes les cinq minutes pour réfléchir à ce qu'il raconte et c'est pour moi la marque typique du fait que j'ai trouvé quelque chose d'intéressant 

 

 

Bon, j'espère que pour The Moon is a Harsh Mistress, t'auras un bon feeling parce que c'est mon livre prefere de mon auteur préféré :mrgreen:

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J'avais déjà remarqué que le philosophe marxiste Denis Collin intervenait chez les souverainistes de droite, mais il donne aussi des interviews chez les eu-ro païens post-GRECE... http://www.revue-krisis.com/2017/11/le-socialisme-est-il-mort-denis-collin.html?m=1

 

C'est le genre de signes qu'il faut guetter car rien ne serait pire pour la liberté qu'une alliance entre les antilibéraux de droite et de gauche.

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2 hours ago, Liber Pater said:

Avez-vous des lectures supplémentaires à proposer (il aime bien lire et lit assez assidument, mais n'est pas habitué aux traités philo) ?

 

Capitalisme et liberté de Friedman : le premier que j'ai lu. Je suis en désaccord sur certains points importants mais ça reste un très bon ouvrage d'introduction.

 

Le libéralisme de Mises : celui-ci porte davantage sur l'aspect philosophique.

 

Basic economics de Sowell : uniquement disponible en anglais et bien plus long que les deux autres mais extrêmement complet et avec des tonnes d'exemples concrets sur pratiquement toutes les façons possibles et imaginables dont la planification économique, même avec les meilleures intentions du monde, amène à des résultats bien inférieurs à ceux d'un marché libre.

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Il y a 10 heures, Liber Pater a dit :

Avez-vous des lectures supplémentaires à proposer (il aime bien lire et lit assez assidument, mais n'est pas habitué aux traités philo) ?

La nouvelle richesse des nations de Guy Sorman.

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Moi je suis là-dedans:

 

"If such a study were made, it would remind the country that the war in Vietnam was started by President Kennedy, who is the idol of all the anti-war protesters ; that the basic premises of our foreign policy were set by another idol, President Roosevelt, and re-inforced by the United Nations and by every peace and One-World group ever since: the premises that we owe a duty to the rest of the world, that we are responsible for the welfare of any nation anywhere on earth, that isolationism is selfish, immoral and impratical in a "shrinking" modern world, etc."

-Ayn Rand, Return of the Primitive: The Anti-Industrial Revolution, Meridian, 1999 (1971 pour la première édition états-unienne), 290 pages, p.49.

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Dédicace à @poney:

 

"Dans la tradition politico-économique française, les « Idéologues » assurent la transition entre le XVIIIe et le XIXe siècles. C’est par eux que l’inspiration économique libérale de Turgot et des Physiocrates passe à Benjamin Constant, au groupe du Journal des Économistes (Charles Comte, Charles Dunoyer, Charles Coquelin, Adolphe Blanqui…), à Frédéric Bastiat, et aux fondateurs de la IIIe République comme Édouard de Laboulaye. Il vaut la peine de donner un coup de projecteur sur Antoine-Claude Destutt, comte de Tracy (1754-1836), auteur dont la pensée est d’autant plus significative qu’il n’est pas un économiste spécialisé et qu’il reflète plutôt les idées dominantes du groupe, ou du moins les idées couramment discutées en son sein (on sait que les « Idéologues » se sont constamment réunis pendant la période révolutionnaire et sous le Consulat ). Il est conduit à discuter longuement de la liberté économique dans un ouvrage où il expose une philosophie politique générale essentiellement libérale, le Commentaire sur « L’Esprit des lois » de Montesquieu.  

Destutt de Tracy ne peut, comme Condorcet dans ses Observations sur le XXIXe livre de « L’Esprit des lois », manquer de voir que Montesquieu, célébré comme libéral par le parti philosophique parce qu’il a été, un temps, compagnon de route des Encyclopédistes, est en réalité un partisan de la réaction nobiliaire. S’il est anti-absolutiste, ce n’est pas au nom d’un état de droit démocratique et libéral, mais au nom de l’ancienne société féodale. Il aime la liberté, mais celle des aristocrates, et non la liberté de tous, non plus que l’égalité devant la loi, ni en général le « règne du droit ». Le Commentaire de Destutt est donc essentiellement une condamnation, polie, mais sans appel, de la philosophie politique de Montesquieu."
-Philippe Nemo, « A. Destutt de Tracy critique de Montesquieu : le libéralisme économique des Idéologues », Romantisme, 2006/3 (n° 133), p. 25-34: https://www.cairn.info/revue-romantisme-2006-3-page-25.htm

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il y a 20 minutes, Tramp a dit :

 

Wut ?

 

Je fais du Nemo, puisqu'il traite tous ceux qui ne pensent pas comme lui de gauchiste (ou ici de vouloir retourner a l'ancien regime, en promouvant la séparation des pouvoir, la République contre le despotisme ou 'lun des premiers textes anti racistes, lol). 

 

C'est agaçant hein.

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Ceci dit, ce n'est pas totalement faux. Mais cela n'invalide pas son apport à la théorie libérale (et à la science politique en générale). Il y en a d'autres (en fait, c'est un clivage interne au sein du libéralisme : aristo contre absolutiste, Tocqueville, Montesquieu, Jouvenel v. Voltaire and co + en gros les physiocrates). Que les passions et les intérêts jouent pour empêcher et limiter le pouvoir, quelque que soit la forme du régime, c'est bien.

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Il y a 3 heures, F. mas a dit :

.... 

Ce n'est pas question ici. 

 

Le libéralisme est une théorie du 19ème, qui puise ses racines chez des auteurs plus anciens. 

Reprocher a ces auteurs d'être des demi libéraux ou des libéraux incomplets, c'est juste con et c'est avoir un gros problème d'analyse des temporalités. 

 

Deuxième chose qui nous ramène au débat sur le moyen age et le point de vue commun qu'on en a tous pour la plupart , et qui est bidon, et qui est un heritage des penseurs des lumières révolutionnaires (que j'apprécie pour beaucoup de choses, ce n'est pas la question). 

 

Condorcet et De Tracy sont deux révolutionnaires qui ont participé a régler leur compte avec ce passé et les auteurs de ce temps, qu'ils fantasmaient largement, et qui était un pur geste politique de tabula rasa et de légitimite. 

 

C'est ce qu'on voit ici et Nemo ne semble pas le décoder (razorback non plus mais ça on le savait déjà). 

Que Montesquieu ait des limites en termz de libéralisme pur, c'est évident, mais en faire un aficionados de l'ancien régime, sachant qu'il n'a pas connu le nouveau, c'est intellectuellement ridicule. 

 

En général, juger les auteurs plus sur leurs manques que sur leurs apports est une pauvreté intellectuelle. C'est tellement facile a posteriori. 

 

Aaah le gros nuuuul

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@poney: Il faut bien qu'il y ait un premier penseur libéral, non ? La diversité des formes de la doctrine, la date d'apparition du mot*, n'y changent rien.

 

*D'ailleurs les phénomènes de ce genre traduisent souvent la maturation et non l'apparition d'une école de pensée. Aucun philosophe matérialiste ne se qualifiait ainsi avant le 18ème. Les premiers communistes modernes (More**, Morelly, Babeuf, Cabet, Fourier, etc.) ne s'appelaient pas communistes.

 

**Qui soit dit en passant se réclamait de Platon: « Le plus sage des hommes, [Platon] comprit sans mal que la seule et unique voie vers le bien-être de tous résidait dans l’absolue égalité des biens. Je doute que cette égalité puisse être atteinte là où la propriété est entre les mains des individus. » -Thomas More, L'Utopie.

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Comment naissent les religions, ou de la pensée magique dans le monde moderne:

 

"Par le jeu quasi constant et combiné de l’ensemble de ces conduites et de ces interdits, les hommes construisent ensemble un déni de réalité des dimensions de l’activité qui les font souffrir. Le problème est que le déni de perception est un processus fragile qui ne demeure efficace qu’à la condition d’être soutenu par tous et partout où les manifestations de la peur et de la vulnérabilité risqueraient de faire retour. Ainsi, les accidents qui font effraction dans la communauté du déni doivent-ils derechef faire l’objet d’un traitement symbolique. Par exemple, certaines équipes de conducteurs de métro, pour conjurer leur peur des suicides sur voie, avaient affiché un tableau d’honneur avec, en regard du nom de chaque conducteur, des petites têtes de mort représentant chacune un suicide, tandis que dans d’autres terminus, les têtes de morts désignaient sur un calendrier les jours marqués par un accident de voyageur (Foot, 1997). Ces tableaux qui font la nique à la peur tendent aussi à contrôler magiquement l’étendue du risque en le localisant sur certains conducteurs qui attireraient la poisse ou sur certains jours qui seraient maudits. Ce qui résiste à la maîtrise virile est “rationalisé” dans l’ordre du fatum !"

 

https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2000-1-page-25.html

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Quote

Revue Travail, genre et sociétés

Strike one.

Quote

Virilité défensive, masculinité créatrice

Strike two

Quote

Pascale Molinier est maître de conférences à la chaire de psychologie du travail du CNAM, membre du laboratoire de psychologie du travail du CNAM et membre du comité de direction du MAGE. Ses thèmes de recherche sont : psychodynamique du travail, rapports sociaux de sexe et identité sexuelle. Elle a publié en 1997 “Autonomie morale subjective et construction de l’identité sexuelle : l’apport de la psychodynamique du travail”, Revue internationale de psychosociologie, Vol III, n? 5 et en 1999 “Prévenir la violence : l’invisibilité du travail des femmes” Travailler, revue internationale de psychopathologie et de psychodynamique du travail

Strike 3 to 5

 

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Quelqu'un a lu Frank Van Dun ? J'ai l'impression que c'est un peu le seul auteur libertarien qui est sur la même ligne anti-propriétarisme que celle qui prédomine ici, et qui réfléchit au bouzin d'abord du point de vu de la philosophie du droit et non de l'économie (ce que je cherche justement). Par contre, il ouvre la porte à la propriété intellectuelle, ce qui m'intrigue.

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Tiens je suis en train de lire une biographie de Rudolf Rocker, figure importante de l'anarchisme de la première moitié du XXe siècle, et qui a écrit un bouquin assez connu " nationalisme et culture".

Allemand, il a fuir le régime nazi pour s'exiler aux USA, c'est là je pense qu'il a fait un retour au liberalisme.  De retour en Europe il a essayé d'exposer ses nouvelles conceptions, il va sans dire que que ce changement d'attitude est complètement occulté par les orgas anarchistes.

Je cite la partie de sa bio consacrée à sa période après guerre, c'est un peu long, excusez moi de ne pas avoir la possibilité de me servir des citations " masquees".

 

 

Qu’il nous soit permis de citer ici une opinion somme toute assez significative de l’état d’esprit qui prévalait chez les libertaires allemands au sortir de la catastrophe que représenta la guerre. Elle est d’Eugen Brenner, ouvrier peintre et anarcho-syndicaliste. « Ils me font pitié, déclarait-il, tous ceux qui ne savent pas encore que la démocratie est une forme de société dans laquelle, pour des individus libertaires, il est possible de vivre, et la dictature une forme dans laquelle cela est impossible. Soit ils ont vécu sur la Lune ; soit ils n’ont connu ni les camps de concentration, les caves de la Gestapo ou les prisons nazies, ni la cruelle émigration, ni les caves du Guépéou. Aujourd’hui, je suis prêt à défendre, les armes à la main, la démocratie soi-disant capitaliste contre tout agresseur, qu’il soit de droite ou de gauche. » [36]

L’après-guerre venue sur la défaite du régime nazi, l’ « impérialisme rouge » constitue, désormais, pour Rocker, le principal danger qui menace la paix mondiale. Convaincu que l’histoire risque de se répéter, il est persuadé que l’URSS, en empêchant la démilitarisation générale des peuples, succède au Reich allemand comme bastion de la réaction. Pour lui, c’est à l’humanité tout entière de tirer les leçons du passé et d’en finir avec la funeste politique d’hégémonie des États, tâche indispensable si elle veut éviter que se produise un nouveau cataclysme mondial, à dimension probablement nucléaire cette fois [37]

Dès lors, une conviction s’ancre en lui : il faut sortir de l’ornière du mouvement ouvrier. Pour Rocker, en effet, le temps de la conquête des usines par les ouvriers est définitivement révolu. Comme l’écrit, en 1946, un de ses correspondants, l’anarchisme doit désormais dépasser la « vision prolétarienne du monde » qu’il incarne pour devenir un « humanisme ou libéralisme révolutionnaire » [38]. En l’espace de quelques décennies, entre la Première et la Seconde Guerre mondiale, l’héritage d’un siècle et demi de libéralisme a été mis à sac. À l’avenir, pense alors Rocker, il faudra redoubler d’efforts pour ré-enraciner les idées de liberté et de dignité humaines au sein des masses populaires, ce qui prendra, estime-t-il, sans doute plusieurs générations. Prenant ses distances avec la théorie kropotkinienne, il n’est plus question pour lui, comme au début des années 1920, d’éveiller les consciences, mais de les éduquer, voire de les rééduquer. Dans ces conditions, poursuit-il, le mouvement libertaire doit devenir le gardien de la tradition libérale, ce qui impose de repenser fondamentalement l’anarcho-syndicalisme classique. De l’AIT, écrit Rocker à Helmut Rüdiger au début des années 1950, « il ne reste plus que le nom, et ce qu’il faudrait envisager à l’avenir, c’est une internationale libertaire sur une base beaucoup plus large » [39]

Dans le prolongement d’une série d’articles parus, à la fin des années 1920, dans le Fanal d’Erich Mühsam, où il avait examiné les « problèmes actuels de l’anarchisme », Rocker remet maintenant en question la doctrine anarcho-syndicaliste elle-même, et en particulier la perspective d’un socialisme libertaire fondé sur les syndicats : « Il faut rejeter la croyance en un système économique unitaire parce qu’un tel système tuerait l’économie […]. Ce qui a réellement fait la grandeur de la pensée socialiste, ça n’a jamais été de chercher à donner une forme unitaire à l’économie, mais de lui donner un fondement éthique qui vise à répartir aussi équitablement que possible les produits du travail. » [40] 

Dans la même veine, il s’en prend aux « fanatiques de l’unité à tout prix » – parmi lesquels il range la CGT d’avant 1914 –, qui « croient pouvoir tout ramener à une norme unique avec leur rouleau compresseur, alors qu’en réalité ils détruisent tout ce qu’il y a d’organique, en en faisant une insipide bouillie » ; ces unitaires à tout prix oublieraient que « la réaction commence toujours là où on essaie de ramener la vie à une certaine norme » [41]. Malgré le ton général de ses remarques et les exemples qu’il choisit, il n’est pas douteux que Rocker se livre, alors, à un réexamen largement autocritique. Si l’organisation continue, à ses yeux, d’être une nécessité, il insiste désormais sur le fait qu’elle peut aussi représenter un réel danger d’étouffement de l’esprit et de l’initiative de ses membres [42]. Transposant ici à toute forme d’organisation ouvrière – et non plus seulement au socialisme autoritaire – la critique appliquée au centralisme politique, qu’on retrouve pleinement développée dans Nationalisme et culture, Rocker y voit une force tendanciellement mécanique qui incline toujours, tout comme l’État, à ne plus respecter les lois de la vie. Même s’il ne renie pas – ni ne reniera jamais – ses positions du début des années 1920, il pose les jalons d’une critique radicale de l’anarcho-syndicalisme, que va développer, dans toutes ses implications, son ami Rüdiger. En voulant se doter d’une forme d’organisation et d’une pratique adéquates puisées, au tournant du siècle, dans le syndicalisme révolutionnaire français, le mouvement libertaire se serait imprégné, au passage, de la théorie fataliste de la lutte des classes et d’une conception naïve de la révolution, aux forts relents millénaristes et jacobins. De là découlerait, selon Rüdiger, une croyance – infondée, mais largement répandue chez les anarchistes – à la révolution comme « panacée universelle » devant mettre fin, d’un seul coup, aux souffrances de l’humanité par l’action de classe et la syndicalisation de la société [43]

Désormais, Rocker pense l’émancipation d’après-guerre en des termes forts différents. Ainsi, il incite, par exemple, les anarchistes à envisager la création d’une « fédération mondiale des peuples libres », peuples eux-mêmes organisés sur le principe fédéraliste, qui se substituerait aux États autoritaires, centralisateurs et nationalistes. Dans son projet, il accorde un rôle déterminant à l’Allemagne et à l’Europe. À l’Allemagne parce qu’elle a perdu toute souveraineté étatique en 1945 et que, « pays du milieu », elle pourrait devenir le pivot d’une « fédération des peuples européens » ; à l’Europe parce qu’elle doit s’unifier sur le plan économique si elle veut venir à bout des problèmes que pose la reconstruction. 

« Désormais c’est à l’aune du projet de fédération européenne qu’on doit mesurer l’intérêt de tout mouvement social et de toute proposition visant à transformer les conditions actuelles. » [44]

Pour Rocker, la situation de l’Allemagne en 1945 permet aux libertaires de reprendre l’initiative. Ainsi, dans une brochure éditée deux ans plus tard par la SAC suédoise et préfacée par Rüdiger, il se propose de définir des champs d’intervention concrète dans l’Allemagne vaincue. Ce texte donne une image assez fidèle de son anarchisme révisé. Un anarchisme fortement teinté de libéralisme, plus pragmatique, plus « constructif » ; une pensée, en somme, qui reste attachée à la perspective anarchiste tout en rejetant les luttes de classes et la révolutionnarité. 

Rocker invite, par exemple, les rescapés de la FAUD à intervenir au niveau municipal pour mettre en pratique, dans le cadre de la reconstruction du pays, les principes fédéralistes du socialisme libertaire. Il leur recommande, par ailleurs, d’adhérer aux syndicats renaissants – qu’il pense plus ouverts aux expériences de la FAUD – dans le but de les inciter à prendre en charge la réorganisation et la gestion de la production. Pour lui, les luttes salariales doivent désormais passer au second plan. Œuvrant à la « destruction de l’économie de profit et à la transformation de la vie sociale par une répartition équitable des produits du travail », le mouvement coopératif constitue, à ses yeux, un autre terrain d’activité à ne pas délaisser [45]. Et c’est sur ces trois piliers (municipalités, syndicats et coopératives) que Rocker fait reposer l’ordre social nouveau, première étape vers la « fédération des peuples européens », qui doit préfigurer cette « fédération mondiale des peuples libres » qu’il appelle de ses vœux. 

Son programme semble abonder dans le sens des discussions des groupes anarcho-syndicalistes locaux qui se reforment depuis 1945 – au moins pour certains d’entre eux, en particulier à Darmstadt, où Alfred et Grete Leinau organisent plusieurs rencontres qui vont déboucher sur la fondation, en 1947, de la Fédération des socialistes libertaires (FSL). De fait, les activités de la FSL ne vont pas tarder à se limiter à la publication d’une revue purement théorique (Die freie Gesellschaft), au demeurant peu appréciée des militants – surtout en Rhénanie et dans la Ruhr –, qui la trouvent trop molle et trop éloignée des réalités de la vie pour attirer les jeunes travailleurs. À l’Est, s’ils ne se retrouvent pas dans les camps de concentration dont ils viennent à peine de sortir, les anarchistes ont très peu de possibilités d’action au niveau municipal, à moins d’adhérer à un des partis autorisés. 

Des voix s’élèvent alors contre la révision doctrinale de Rocker et son approche pragmatique des choses. C’est le cas, en particulier, du Groupe international Bakounine, qui rassemble des anciens collaborateurs de la revue War Commentary et dont le groupe londonien Freedom se charge de diffuser les publications. On lui reproche, et vivement, de verser dans l’opportunisme en mettant les anarchistes allemands sous la coupe du gouvernement militaire d’occupation et en promouvant une forme de capitalisme autogéré au niveau communal. Une violente polémique éclatera même à propos d’Erich Mühsam, dont les deux tendances revendiquent la filiation intellectuelle et politique. Le courant anti-Rocker cherchera, de son côté, à former – sans succès – des organisations unitaires sur le modèle des « blocs anti-autoritaires » qui sont nés spontanément, au milieu des années 1920, du rapprochement des anarchistes, des anarcho-syndicalistes et des communistes de conseils dans quelques villes allemandes. 

Dans ses derniers textes, d’inspiration sensiblement proudhonienne, Rocker critiquera tous ceux qui, parmi les anarchistes, lui semblent voir les choses « à travers les verres fumés de la tradition ». Ainsi, indiquera-t-il, le terme de compromisserait devenu un « mot-fétiche » qui déclencherait chez eux d’incontrôlables réactions de peur [46]. En faisant clairement référence au social-démocrate Eduard Bernstein, pour qui il a visiblement de l’estime [47], Rocker est d’avis qu’un « révisionniste », loin de trahir la cause, est un homme qui cherche seulement de nouvelles voies praticables. 

« L’anarchisme et l’idée de la liberté en général sont des idées, non pas absolues, mais seulement relatives et partant, elles sont soumises à de continuelles transformations […]. Les idées absolues conduisent toujours au despotisme de la pensée et, là où leurs représentants en ont le pouvoir, au despotisme du fait. » [48]

Cette mise en garde a, pour lui, valeur testamentaire : elle expliquerait pourquoi les révolutionnaires d’hier sont très souvent les réactionnaires d’aujourd’hui.

Gaël CHEPTOU
 

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Il y a 9 heures, Mégille a dit :

Quelqu'un a lu Frank Van Dun ? J'ai l'impression que c'est un peu le seul auteur libertarien qui est sur la même ligne anti-propriétarisme que celle qui prédomine ici, et qui réfléchit au bouzin d'abord du point de vu de la philosophie du droit et non de l'économie (ce que je cherche justement). Par contre, il ouvre la porte à la propriété intellectuelle, ce qui m'intrigue.

Il était très apprécié de certains Grands Anciens conservateurs.

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Je viens de lire les œuvres poétiques de Saint-John Perse, dans l'édition Rombaldi, coll Prix Nobel de littérature, de 1965.

 

Je trouve ça nul. Ni sensé, ni beau. Le néant.

 

D'une manière générale la poésie en prose me paraît plate et sans intérêt, Nietzsche Lautréamont étant l'exception* qui confirme la règle.

 

*Il y a aussi Francis Ponge, mais j'aime déjà beaucoup moins.

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Le 31/07/2018 à 22:08, PABerryer a dit :

Je suis dans "La machine révolutionnaire", l'intégrale des oeuvres d'Augustin Cochin. C'est remarquable. 

 

J'ai terminé !

 

C'était passionnant. Si l'on sent qu'il ne s'agit pas d'un travail finalisé l'essentiel de la démonstration est là. L'idée d'appliquer les outils de la sociologie aux mécanismes révolutionnaires est brillante et les exemples développés (la "campagne" à Dijon et les "élections" en Bretagne) sont particulièrement éclairante.

 

Cochin part d'un constat: comment se fait il que venant de toutes la France les cahiers de doléances semblent être tous fait sur le même canevas, de même que les motions et pétitions demandant le doublement du Tiers et le vote par tête? Sa thèse est que le développement des "sociétés de pensée" (organisme clef des Lumières et de la république des Lettres de Voltaire) en ont fait les organes moteurs de la révolution. Les mécanismes qui seront à l’œuvre entre 1789 et 1795 (épuration permanente entre autre) l'était depuis longtemps dans ces sociétés. En 1789 leurs acteurs transposent ce qui était un aimable jeu intellectuel en mode de gouvernement de la France avec les conséquences que l'on connait.

 

Par contre cela reste une attaque vigoureuse contre l'idée de 1789 libéral et 1793 terroriste et la conception de la Liberté au spectre des lumières en rend un coup des plus violent. Cochin n'est pas un auteur libéral mais il mérite clairement d'être sorti de l'oubli pour comprendre la révolution française (Furet considérait que seul lui et Tocqueville avait compris la révolution).

 

Pour la suite je m'attaque au Lénine, inventeur du totalitarisme de Courtois.

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1 hour ago, PABerryer said:

comment se fait il que venant de toutes la France les cahiers de doléances semblent être tous fait sur le même canevas, de même que les motions et pétitions demandant le doublement du Tiers et le vote par tête? Sa thèse est que le développement des "sociétés de pensée" (organisme clef des Lumières et de la république des Lettres de Voltaire) en ont fait les organes moteurs de la révolution. Les mécanismes qui seront à l’œuvre entre 1789 et 1795 (épuration permanente entre autre) l'était depuis longtemps dans ces sociétés. En 1789 leurs acteurs transposent ce qui était un aimable jeu intellectuel en mode de gouvernement de la France avec les conséquences que l'on connait.

Comme quoi les SJW ont toujours existé.

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Il y a 1 heure, PABerryer a dit :

comment se fait il que venant de toutes la France les cahiers de doléances semblent être tous fait sur le même canevas

 

J'ai eu un cours là dessus, certains cahiers de doléances étaient fait à partir d'imprimés pré-remplis que le seigneur ou la bourgeoisie du coin confiait aux manants pour qu'ils se plaignent correctement. Ce qui explique parfois l'uniformité.

 

Par ailleurs les préoccupations agricoles et fiscales peuvent être assez homogènes d'une région à l'autre.

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il y a une heure, Lancelot a dit :

Comme quoi les SJW ont toujours existé.

Les bonnes questions étant : comment est-on parvenu à les contenir au cours de la plus grande partie de l'Histoire, et quelles sont les conditions qui leur permettent de sortir de leur asile/cachot/dimension X/boîte de Pandore pour venir ruiner la vie des autres ?

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il y a une heure, Johnathan R. Razorback a dit :

Par ailleurs les préoccupations agricoles et fiscales peuvent être assez homogènes d'une région à l'autre.

Certes. Mais ça n'explique pas la formulation des doléances, assez peu variable, ni la profusion de demandes institutionnelles extrêmement précises (doubler le Tiers, tu penses que ça parle à un forgeron du Rouergue ?), pas plus que la répétition des slogans et mots d'ordre pré-révolutionnaires (qui se répèrent souvent aux substantifs dont l'initiale est mise en majuscule, une sorte de prosopopée qui échappaient sans doute à un meunier de l'Artois).

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Comme quoi la démocratie a toujours plus ou moins été un leurre, et le pouvoir aux mains des plus malins et des beaux parleurs.

Il y a des choses qui ne changent pas. Changeront elles ? 

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Il y a 6 heures, Rincevent a dit :

Les bonnes questions étant : comment est-on parvenu à les contenir au cours de la plus grande partie de l'Histoire, et quelles sont les conditions qui leur permettent de sortir de leur asile/cachot/dimension X/boîte de Pandore pour venir ruiner la vie des autres ?

 

Parce que l'absolutisme c'était cool ?

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